OM : le dilemme comptable de l'échange Ünder-Malinovskyi
Auteur d'un nouveau mercato ambitieux avec plus de 70 millions d'euros dépensés, l'Olympique de Marseille compte bien encore profiter de cette fenêtre estivale. À l'affût pour enrôler, au moins, un défenseur avant le 1er septembre, le board marseillais prépare également un échange surprise avec l'Atalanta Bergame. Un deal qui pose notamment une question comptable. Explications.
Options d'achat levées, nouvelles arrivées, prêts, l'Olympique de Marseille, sous l'impulsion de son président Pablo Longoria et de Javier Ribalta, multiplie les transactions depuis le début du mercato estival. Ambitieux et prêts à figurer au mieux sur la scène européenne, les dirigeants marseillais s'activent donc logiquement sur tous les fronts et les renforts arrivent en masse sur la Canebière. Luis Suarez, Isaak Touré, Jonathan Clauss, Jordan Veretout, Alexis Sánchez, Issa Kaboré, Jelle Van Neck, Nuno Tavares, Rubén Blanco, Chancel Mbemba - sans parler de Pau Lopez, Mattéo Guendouzi, Arkadiusz Milik ou encore Cengiz Ünder définitivement marseillais - le visage de l'OM version Igor Tudor, successeur de Jorge Sampaoli, prend forme.
L'OM prépare un deal avec l'Atalanta !
D'ores et déjà dauphin du PSG après deux journées de Ligue 1 (une victoire, un nul), l'OM ne semble pourtant pas rassasié. Pour preuve, le board phocéen continue de prospecter sur le marché et aimerait recruter, au moins, un défenseur avant la fermeture définitive du marché. Dans cette optique, Eric Bailly est suivi de près et Manchester United serait, comme nous vous le révélions dernièrement, ouvert à un prêt. Mais ce n'est pas tout. Sur le front de l'attaque, l'OM prépare aussi un nouveau coup. Forcé de dégraisser, malgré les départs de Luan Peres à Fenerbahce, de Pol Lirola, prêté avec OA à Elche et de Konrad de La Fuente, prêté sans OA à l'Olympiakos, le club olympien pourrait également se séparer de Cengiz Ünder. Oui mais voilà, alors que la presse turque évoquait dernièrement un probable intérêt de Galatasaray pour l'ailier phocéen, on parle désormais d'un échange avec... l'Atalanta Bergame !
En effet, d'après les dernières informations de Sky Sport Italia, reprises depuis par la presse européenne, l'Olympique de Marseille et l'Atalanta Bergame discutent actuellement d'un éventuel échange entre l'attaquant turc, qui a déjà connu le football italien sous le maillot de l'AS Roma entre 2017 et 2020 (88 matches TCC, 17 buts et 12 passes décisives), et Ruslan Malinovskyi, milieu offensif international ukrainien (49 sélections, 7 buts), évoluant sous les couleurs de la Dea depuis juillet 2019 (129 rencontres TCC, 29 réalisations et 27 offrandes). Un deal qui semble, sur le papier, relativement équitable puisque Ünder, sous contrat jusqu'en juin 2025, est estimé à 22 millions d'euros par Transfermarkt alors que Malinovskyi, meilleur passeur de Serie A en 2021 mais libre de tout contrat l'été prochain, est lui valorisé à 28 M€.
Un dilemme comptable pour la direction marseillaise !
Sportivement, l'international turc (42 sélections, 13 buts) sort lui d'une saison relativement convaincante à l'OM. Auteur de 13 buts et 6 passes décisives en 47 matches toutes compétitions confondues, l'ancien joueur de Leicester a laissé apprécier aux supporters marseillais toute sa vivacité et sa technique dans le couloir droit. De l'autre côté, Ruslan Malinovskyi, doté d'un profil plus créatif, peut lui se targuer de 10 buts et 7 passes décisives en 41 rencontres lors de l'exercice 2021-2022. Selon FB Ref, l'Ukrainien fait d'ailleurs partie des 5 % des milieux de terrains qui tentent et réussissent le plus de passes vers l'avant dans les cinq grands championnats. De quoi définitivement convaincre Igor Tudor, amoureux de la transition rapide et du jeu direct. Pour autant, si cette opération pourrait satisfaire les attentes des différentes parties, elle pose malgré tout un véritable dilemme pour l'OM.
Désireux de conclure un échange sec avec la formation italienne, la direction marseillaise doit malgré tout prendre en compte la dimension comptable d'un tel deal. En échangeant purement et simplement les deux joueurs concernés, la comptabilité des deux formations se verra impactée (salaire et éventuelles primes). Si, dans ce cas de figure, l'OM n'aura, en revanche, rien à donner à la Roma, les hautes sphères olympiennes ne pourront cependant pas profiter d'une entrée comptable dans le bilan annuel. Un vrai moins quand on connaît l'importance de ces apports dans l'équilibre financier d'un club, qui plus est à l'heure où Frank McCourt, propriétaire de l'OM, s'inquiète de la tournure des événements. En montant, en revanche, une opération avec une indemnité de transfert gonflée, manœuvre courante ces dernières années, l'OM pourra amortir cette indemnité en fonction de la durée de contrat signée par Malinovskyi mais devra, alors, verser 20% du transfert à l'équipe romaine.
Attention aux dérives...
En effet, lors d’une transaction, pour le club acheteur, le coût de l’investissement est amorti et réparti comptablement sur la durée du contrat, tandis que pour le club vendeur, la plus-value à la vente (le prix de vente moins la valeur résiduelle du contrat du joueur) est immédiatement inscrite dans les comptes. Autrement dit, d’un point de vue comptable, l’acheteur étale le coût sur plusieurs années tandis que le vendeur enregistre le gain immédiatement. Pour illustrer les effets comptables d'un possible échange entre Ruslan Malinovskyi, acheté 13,6 millions d'euros au KRC Genk en juillet 2019, et Cengiz Ünder, acheté 8,4 millions d'euros à l'AS Roma en juillet 2022, sous la forme de deux transferts définitifs, voici un exemple chiffré (les chiffres mentionnés ne sont que pour exemplifier et n'ont aucune réelle valeur). Dans le cadre de cette illustration comptable, Malinovskyi signe un contrat de 4 ans à l'OM en échange de 28 millions d'euros (valeur marchande actuelle) et Ünder s'engage pour 4 saisons avec l'Atalanta contre un chèque de 22 millions d'euros (valeur marchande actuelle).
Pour l'Atalanta, le coût, cette année, de Cengiz Ünder pourrait donc être de 5,5 millions d'euros (22 millions d’indemnités / 4 ans de contrat) tandis que les recettes obtenues pour Malinovskyi seraient de 24,6 millions d'euros (28 millions – 3,4 millions de valeur nette comptable au moment du transfert).
Pour l'OM, le coût, cette année, de Ruslan Malinovskyi serait de 7 millions d'euros (28 millions d’indemnités / 4 ans) et les recettes de 9,2 millions (22 millions d’indemnités – 8,4 millions de VNC au moment du transfert - 4,4 pour la Roma).
Comme nous l’expliquions dans un précédent article, l’amortissement des indemnités de transfert permet ainsi d’étaler comptablement le coût de l’investissement réalisé sur la durée du contrat du joueur nouvellement signé. Prudence tout de même car à l'heure où plusieurs formations cherchent à corriger leurs bilans par des «plus-values fictives», les instances tentent de réagir. En 2018, le Chievo Vérone avait ainsi été sanctionné d’une amende et d’un retrait de points après une multitude d’opérations jugées fictives avec Cesena, qui lui avaient permis d’équilibrer ses comptes et de pouvoir s’inscrire au championnat. En novembre 2021, la brigade financière italienne investiguait, encore, sur 11 clubs italiens et 59 de leurs dirigeants, accusés de gonfler des indemnités de transferts pour augmenter leurs plus-values. En plus de l’échange Pjanic-Arthur, 62 autres transactions auraient ainsi été passées au crible.
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