Naples : Aurelio De Laurentiis, un président aux mille méthodes incompréhensibles
La situation au Napoli, avec le départ à venir de Rudi Garcia et les recherches de son successeur, remet en lumière la manière, parfois curieuse, dont le président napolitain, Aurelio De Laurentiis gère le club de Campanie depuis son rachat en 2004.
On le connaît pour son caractère bien trempé, ses déclarations parfois polémiques, son côté arrogant et fier ou encore son apparence digne d’un film de gangsters italiens. Mais le président charismatique du Napoli, Aurelio De Laurentiis, fait également couler beaucoup d’encre depuis plusieurs années en raison de certaines curieuses décisions sportives, à l’heure où l’homme d’affaires italien de 74 ans prend de plus en plus de place depuis le départ du directeur sportif italien, Cristiano Giuntoli, pour la Juventus l’été dernier. Et le nouveau et très long feuilleton du départ de Rudi Garcia et les recherches interminables d’un successeur mettent sous les feux des projecteurs les méthodes de De Laurentiis, souvent remises en question par les tifosi napolitains, les journalistes italiens, voire même les collègues du président au club depuis 20 ans.
Pour rappel, le magnat du cinéma italien a racheté le club du Napoli en septembre 2004 pour 30 millions d’euros et l’a renommé «Napoli Soccer», après la faillite du SSC Napoli et sa rétrogradation en Serie C. Il a ensuite acquis les droits de la marque «SSC Napoli», afin de pouvoir redonner le nom historique aux Partenopei en 2006. En trois ans, il a réussi à ramener la ville de Naples en Serie A, avec d’excellents résultats et des bases économiques solides. Un long travail de reconstruction récompensé la saison dernière par un quart de finale en Ligue des Champions et le premier Scudetto du club de Campanie après 33 ans d’attente. De ce côté, Aurelio De Laurentiis est presque irréprochable, mais sous sa houlette, difficile de dénombrer les tempêtes, les orages et les brouillards au pied du Vésuve, notamment avec ses entraîneurs qui sont au nombre de six en 10 ans, et de dix en 20 ans.
Une gestion troublante des entraîneurs
Rembobinons un peu les derniers mois du Napoli. Après avoir célébré un Scudetto historique, l’artisan de cet exploit, Luciano Spalletti, a décidé de quitter le club de Campanie, en laissant derrière lui une équipe performante à la confiance maximale et au collectif déjà bien huilé. Le plus dur restait à faire pour la direction napolitaine, portée par le président d’Aurelio De Laurentiis. Mais curieusement, le patron des Partenopei a tardé avant de trouver le successeur de l’actuel sélectionneur de la Nazionale. Une liste d’une dizaine d’entraîneurs avait alors été dressée : Thiago Motta, Luis Enrique, Julian Nagelsmann, Vincenzo Italiano, Fabio Cannavaro, Raffaele Palladino, Sérgio Conceição, Christophe Galtier, Rafael Benitez, Antonio Conte, Gian Piero Gasperini, Roberto De Zerbi ou encore Alessio Dionisi… Un nombre incalculable de prétendants, plus ou moins intéressés par le poste. Une majorité avait d’ailleurs rencontré Aurelio De Laurentiis au restaurant, au point où le gimmick humoristique «ADL au restaurant» était devenu légion dans les communautés de tifosi napolitains. A la surprise générale, il avait choisi l’entraîneur français Rudi Garcia et lui avait réservé un accueil de rockstar dans les rues de Naples.
Cinq mois plus tard, bis repetita. Le président du Napoli doit se mettre à la recherche d’un nouveau chef d’orchestre pour son banc, à l’heure où Rudi Garcia attend patiemment à Nice auprès de sa famille de lire le communiqué officiel de son licenciement. La défaite contre Empoli (0-1) dimanche a été celle de trop pour la direction du club, qui s’est rapidement réunie à Rome, avec les présences d’Aurelio De Laurentiis et de ses conseillers Mauro Meluso (qui choisit souvent les coachs), Maurizio Micheli et Antonio Sinicropi, pour profiter de la trêve internationale afin de discuter de l’avenir de la saison et de cocher les premiers noms envisagés pour reprendre les rênes d’un navire qui se noie. Tout le monde pensait naïvement qu’Igor Tudor allait être logiquement nommé à la tête du Napoli, alors que les discussions s’étaient intensifiées lundi et que toutes les parties étaient tombées d’accord pour un contrat de quelques mois après une rencontre positive à Rome avec l’entraîneur croate. Mais De Laurentiis reste De Laurentiis et la presse italienne a annoncé, ce mardi matin, que le président napolitain avait organisé un entretien surprise avec Walter Mazzarri, ancien entraîneur du Napoli et proche d’Aurelio De Laurentiis, qui devrait s’engager jusqu’en juin prochain.
Des relations professionnelles houleuses
«Je ne te frapperai pas car tu es un vieil homme, mais je vais quand même te licencier». Cette douce phrase prononcée par Aurelio De Laurentiis après un match nul contre la Lazio à l’entraîneur de l’époque, Edoardo Reja, met en lumière un autre souci du président napolitain : l’aspect relationnel compliqué avec ses coachs. Difficile d’oublier les bras de fer constants avec Carlo Ancelotti qui a d’ailleurs poussé l’actuel entraîneur du Real Madrid vers la sortie. Il avait également connu plusieurs frictions et autres échauffourées avec Roberto Donadoni, sur le banc du Napoli en 2009 : «Donadoni a dit que nous avions besoin d’un milieu de terrain gauche ? Pourquoi n’en achète-t-il pas un alors ? S’il l’achète, ce sera bien», avait déclaré De Laurentiis. Hormis avec Rafa Benitez, Walter Mazzarri et Maurizio Sarri, Aurelio De Laurentiis a souvent été au centre de batailles intenses avec ses staffs techniques, qui ont paralysé le vestiaire et agacé certains cadres.
Avec Rudi Garcia encore récemment, Aurelio De Laurentiis avait déclaré dans la presse début octobre : «Je passe un mauvais moment avec lui. Je suis un entrepreneur, j’ai le devoir de m’intéresser à mon entreprise. L’entraîneur et le directeur sportif sont à votre service. Je prendrai les décisions les plus appropriées le moment venu. Toute décision hâtive est mauvaise». Une déclaration qui sentait la fin de l’aventure de l’ancien de l’OM et de l’OL, mais après des échecs de négociations avec Antonio Conte, le producteur de cinéma de 74 ans avait finalement décidé, à la surprise générale, de conserver Garcia à la tête du Napoli, en lui réitérant publiquement sa confiance, prenant même sa défense. Un maintien, mais sous certaines conditions, avec notamment une présence presque quotidienne de De Laurentiis aux entraînements collectifs, souhaitant ainsi surveiller le travail de Rudi Garcia. Finalement, le départ du Français semble désormais bien acté. La défaite contre Empoli a sonné le glas de ce mariage surprenant qui s’est soldé par un lamentablement échec, que ce soit dans le coaching de Rudi Garcia ou dans la gestion d’Aurelio De Laurentiis qui est aussi l’un des fautifs majeurs de la crise actuelle chez les Partenopei.
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