Malgré de belles opportunités, le PSG a dû rendre les armes face à un Bayern Munich trop fort en finale de la Ligue des champions. Quels furent les plans de jeu des deux équipes et comment le match a basculé ? Analyse.
« Paris est une équipe top avec beaucoup de vitesse, des joueurs avec beaucoup d’expérience. (...) Ce sera un match très intéressant. Mais ces dix derniers mois, nous avons toujours imposé notre philosophie, joué du football attractif, toujours pressé très haut et c'était la garantie du succès. Donc on ne veut pas changer grand-chose.» En avant-match, Hans-Dieter Flick, l’entraîneur du Bayern Munich avait prévenu que son équipe n’allait pas renier son identité de jeu face au PSG en finale de Ligue des Champions malgré les failles qu’elle avait pu laisser transparaître contre l’Olympique Lyonnais et le FC Barcelone, et la menace que présentaient Mbappé et Neymar en contre-attaque et dans la profondeur. Dès les premières minutes du match, on a pu constater que les paroles de Flick n'étaient pas du vent.
Les plans de jeu
Du côté du Bayern Munich, il n’était pas question de laisser le PSG trouver tranquillement Neymar dans l'axe, et plus globalement le trio d’attaque parisien, sur ses sorties de balle. On a donc assisté à un pressing haut et intense du Bayern Munich sur les remises en jeu du PSG dans son camp tandis que Mbappé et Neymar étaient souvent marqués par deux joueurs lorsqu’ils parvenaient à toucher la balle.
Sous la pression des Munichois dans leur camp, Kimpembe, Bernat et Thiago Silva s’en sont plutôt bien sortis mais ce ne fut pas le cas des milieux de terrain parisiens (Marquinhos, Herrera, Paredes), qui ont perdu de nombreux ballons dans leurs 30 mètres en raison de l’agressivité défensive de Goretzka, de Müller et de Thiago Alcantara.
Grâce à leur pressing haut, les Bavarois ont pris le contrôle du jeu et du ballon, bien aidés aussi par leur maîtrise technique supérieure au milieu de terrain, illustrée par la masterclass de Thiago Alcantara, le maître du tempo et des espaces. Le milieu de terrain espagnol, qui avait parfois fait preuve de nonchalance contre l’OL, a été d’une justesse technique et d’un calme impressionnants pour se défaire du pressing adverse. Il a été le joueur qui a fait basculer le rapport de forces en faveur du Bayern Munich.
Du côté du PSG, le plan de Thomas Tuchel se résumait à vouloir sanctionner le Bayern Munich en contre, en exploitant la profondeur dans le dos des défenseurs munichois et la vitesse de Mbappé. Contrairement aux matches contre l’Atalanta Bergame et le RB Leipzig, Neymar a évolué très haut sur le terrain et n’a pas vraiment cherché à décrocher bas sur le terrain pour favoriser les sorties de balle de ses partenaires. Ce choix a sans doute été dicté par la volonté de Tuchel de mettre une grosse pression sur la dernière ligne défensive munichoise en cas de sorties de balle réussies des défenseurs et milieux de terrain. Défensivement, le PSG a alterné entre un bloc haut en 4-3-3 et un bloc médian en 4-4-2, avec une ligne intermédiaire pas véritablement alignée mais compacte (laissant beaucoup d'espace sur la largeur).
À la manière de Karl Toko-Ekambi en demi-finale, Di Maria avait pour mission de gêner les transmissions de passe entre Alaba et Davies, et se plaçait donc très à droite tandis que Herrera et Marquinhos se relayaient pour marquer Thiago Alcantara lors des sorties de balle du Bayern Munich et que Mbappé suivait les déplacements de Kimmich, quitte à se placer au niveau des milieux de terrain voire même plus bas comme sur son intervention face à Gnabry en début de match.
Le PSG n’avait pas la volonté de presser agressivement les deux centraux du Bayern Munich pour justement pousser les Bavarois à se livrer pour laisser des espaces dans leur dos. Un pressing plus haut et agressif parisien s’effectuait lors de chaque passe munichoise vers l’arrière, ce qui a notamment permis aux Parisiens de récupérer des ballons après 8 premières minutes passées à être acculés dans leur camp.
Avec cette approche tactique et ce bloc médian, les Parisiens se sont privés de l’une de leur force sur leurs derniers matches de C1, le contre-pressing haut sur le terrain, qui leur aurait permis d’avoir davantage le contrôle du ballon et de s’installer durablement dans le camp du Bayern.
Le plan de Tuchel annihilé par Neuer et la maladresse du trio d’attaque parisien
Au cours d’une première période équilibrée, les Parisiens se sont créés les meilleures opportunités de marquer. Si le Bayern Munich a réussi à mettre le pied sur le ballon d’entrée de jeu, sans toutefois se montrer vraiment dangereux, le PSG s’est crée de belles opportunités sur des attaques éclair. La première est intervenue à la 14e minute après la première sortie de balle sous pression réussie des Parisiens, avec au départ Paredes qui élimine Gnabry sur le côté droit avant de renverser le jeu vers Kehrer, puis une ouverture du même Paredes en profondeur, en direction de Mbappé à gauche.
La deuxième est survenue une minute plus tard (15e) avec une passe géniale en profondeur en une touche et en première intention de Paredes toujours vers Mbappé, après une balle perdue dans le camp munichois. Sur ces deux premières opportunités, l’attaquant des Bleus butait sur Kimmich.
La troisième opportunité, à la 18e minute, a coïncidé avec une récupération de balle près de la ligne médiane de Kimpembe sur Gnabry, qui a profité à Marquinhos qui a ensuite lancé Mbappé, toujours dans la profondeur. Ce coup-ci, l’attaquant français décidait de servir Neymar, qui perdait son duel face à Neuer, auteur d’une parade improbable avec sa main gauche placée derrière ses jambes.
La quatrième opportunité a été consécutive à une nouvelle sortie de balle réussie sous pression, avec un dégagement de Paredes dévié de la tête par Herrera en direction de Mbappé qui est parvenu à réaliser une déviation en aile de pigeon vers Neymar au niveau de la ligne médiane, qui, par la suite, est arrivé lancé pour servir idéalement Di Maria (23e).
La cinquième et dernière occasion parisienne de la première période a fait suite à un contre-pressing très haut dans la camp du Bayern Munich après une perte de balle de Di Maria puis d’une mauvaise passe latérale d’Alaba dans l’axe qui a profité à Mbappé qui, après un une-deux avec Herrera dans la surface de réparation, a écrasé sa frappe qu’a facilement capté Neuer (45e).
Le Bayern Munich aurait pu lui aussi ouvrir le score en première période sur deux actions de Lewandowski. La première est venue d’un renversement de jeu de Thiago Alcantara vers Davies qui a ensuite trouvé Lewandowski, qui après un tir en pivot touchait le poteau de Navas (22e). La deuxième, après une perte de balle de Neymar dans son camp en appui qui a été récupérée par Thiago Alcantara, qui a ensuite parfaitement servi Müller, qui avait dézoné à droite, et dont le centre tendu a trouvé la tête du goleador polonais qui a buté sur Navas (31e).
Un PSG amorphe sanctionné par un Bayern Munich trop fort et en contrôle
Après 45 minutes prometteuses gâchées par plusieurs occasions de but manquées, les Parisiens ont paru complètement amorphes au retour des vestiaires. Dès les premières secondes de la seconde période, le PSG a reculé sans parvenir à se donner de l’air en raison des pertes de balle trop rapides dès la récupération du ballon dont certaines dans des situations de contre-attaques favorables. À l’origine du but de Coman (59e), le seul de la rencontre, il y a notamment eu un deux-contre-deux mal négocié par Di Maria, avec un crochet trop long face à Süle.
Pour perturber l’organisation défensive parisienne, Hansi Flick a procédé à des ajustements tactiques à la mi-temps en faisant évoluer Joshua Kimmich plus haut et dans une position plus intérieure, tandis que Gnabry et Müller se sont davantage excentrés à droite afin de surcharger le côté de Mbappé, qui a fini par changer d’aile avec Di Maria. Le but munichois est arrivé de ce côté droit, avec au départ Thiago Alcantara qui a trouvé Kimmich dans le demi-espace droit grâce à une diagonale chirurgicale.
Quelques instants plus tard, les Munichois auraient pu inscrire un but similaire avec toujours ce déplacement vers l’intérieur de Kimmich, avec, cette fois-ci, Müller excentré sur le côté avec du temps et de l’espace.
Après l’entrée de Verratti à la 65e minute, Thomas Tuchel a effectué des modifications dans l’organisation offensive de son équipe avec un repositionnement de Neymar à gauche et de Mbappé en tant qu’avant-centre. Bien que limité physiquement, l’Italien a fait du bien à son équipe par sa faculté à jouer sous la pression et à se mettre dans le sens du jeu. Son coup franc rapidement joué en profondeur pour Di Maria aurait pu aboutir à une égalisation de Marquinhos mais le Brésilien butait sur un Neuer invincible (70e) avec un arrêt de la jambe dont il a le secret.
Les 20 dernières minutes du match ont démontré la supériorité du Bayern Munich, toujours impérial pour ressortir le ballon sous la pression tandis que Neymar a enchaîné les pertes de balle sur des erreurs techniques inhabituelles. La dernière occasion du PSG est venue d’un dribble de Verratti sur Kimmich dans le camp parisien, et d’une énième passe en profondeur pour Mbappé qui a ensuite servi Neymar dont le centre/tir en pivot a filé en sortie de but.
Plus complet, plus serein et sans doute plus sûr de ses forces, le Bayern Munich a fini par imposer sa loi à des Parisiens vaillants mais trop maladroits pour espérer un meilleur sort. Le Bayern Munich a aussi pu compter sur un Neuer magistral qui a littéralement écœuré les attaquants parisiens et un Thiago Alcantara royal au cœur du jeu.
Les regrets du PSG et les pistes d’amélioration
On ne saura jamais quelle aurait pu être l’issue de la rencontre si Thomas Tuchel avait décidé d’effectuer un pressing haut régulier mais quand on regarde les occasions que se sont créées les Parisiens sur des récupérations de balles hautes (15e, 18e, 45e), on peut tout de même penser que cette situation aurait mis davantage en difficulté les Munichois.
On peut aussi questionner le fait d’avoir limité les décrochages de Neymar au niveau des milieux de terrain parisiens lors des sorties de balle, domaine où le PSG a souffert. Le Brésilien, qui a eu du mal à être trouvé plus haut sur le terrain, a par exemple réalisé quelques différences balle aux pieds en partant de plus bas en fin de match.
Cette finale aura tout de même permis aux dirigeants parisiens de cibler les faiblesses de l’effectif. Face à la crème de la crème, le talent individuel de Neymar, Mbappé ou Di Maria ne suffisent pas. Il faut de la qualité technique sur toutes les lignes. Dans son effectif actuel, le PSG manque également de joueurs capables de jouer efficacement en pivot, ce qui leur aurait notamment permis de jouer long pour se sortir plus facilement du pressing agressif du Bayern Munich. Un milieu de terrain comme Sergej Milinkovic-Savic, capable de jouer sous la pression et en pivot, est plus que jamais intéressant pour les Parisiens, tout comme une sentinelle polyvalente comme Thiago Alcantara.
En atteignant la finale de la Ligue des Champions, le PSG a touché du doigt son rêve de grandeur, mais il sait désormais ce qu’il lui manque pour le réaliser. Et vu le niveau affiché par le Bayern Munich, il faudra être très fort pour chiper le titre aux hommes d’Hans-Dieter Flick lors des saisons à venir. Cela promet déjà une édition 2020/2021 de toute beauté.
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