Parti libre de Bordeaux l'été dernier, Julien Faubert a travaillé ces derniers mois loin des projecteurs et de l'effervescence des terrains de Ligue 1. C'est en Ecosse que le Français a repris du service motivé comme jamais. Pour Foot Mercato, il évoque ses mois de galère, sa carrière atypique et ses ambitions. Entretien.
Julien Faubert n'est jamais là où on l'attend. À 32 ans, le Français a connu une carrière faite de transferts surprenants, mais toujours enrichissants. Ce fut le cas lors de son passage à West Ham entre 2007 et 2012 : «J'en garde des souvenirs extraordinaires, avec des supporters qui m'ont toujours soutenu. Quand je vois Dimitri Payet qui parle d'histoire d'amour avec les supporters de West Ham, je le comprends tout à fait. Ce sont des supporters fous, mais dans le bon sens. Dans un match, ils sont capables de te donner la force, les dix mètres qui te manquent. J'ai vécu une montée avec un scénario superbe à Wembley. Ça a été une histoire d'amour du début à la fin». Une histoire mise en stand-by le temps d'un passage au Real Madrid : «Malgré les railleries que j'ai pu entendre, surtout de la France, ça a été une expérience extraordinaire même si j'ai peu joué. De sentir un intérêt certain d'un club de ce niveau, on est flatté et on se dit qu'on n'est pas si mauvais que ça, même si je ne pensais pas être mauvais. Il y a peu de joueurs qui peuvent se vanter d'avoir été au Real Madrid. M'entraîner tous les jours avec des joueurs de haut niveau et d'expérience, ça m'a appris sur le métier et sur le professionnalisme. Ça a été une belle expérience au sein de l'un des deux meilleurs clubs du monde».
Dans un vestiaire madrilène peuplé de stars, Faubert ne s'est jamais senti comme un ovni : «Ça a été spécial les cinq premières minutes. Les gens se font toute une montagne, mais c'est un vestiaire comme un autre avec des gars avenants qui rigolent, blaguent. Lassana Diarra était là donc il m'a aidé. Il y avait beaucoup de Néerlandais donc on parlait anglais. J'ai vite appris l'espagnol, ça a été facile de s'intégrer». Après un retour à Londres, le Frenchy s'est envolé pour Elazigspor en Turquie. «D'un point de vue personnel et humain, ça m'a ouvert l'esprit sur différentes cultures. En Turquie, les gens vivent pour le football. C'est de la folie et j'aime ça. J'ai un caractère assez fort, c'est quelque chose qui me représente énormément. Ça reste un pays musulman et vu que c'est ma religion ça a été facile pour moi de m'adapter aux coutumes. J'en retire que du positif». Une période importante avant un retour en 2013 à Bordeaux où son contrat s'est achevé l'été dernier. Une fin qui lui laisse quelques regrets : «Mon départ s'est fait d'un commun accord. L'entraîneur, je pense, ne voulait pas me garder. Moi, je n'avais plus trop envie de travailler avec lui. Ça s'est fait comme ça. C'était une fin de cycle, une fin d'histoire qui ne s'est pas très bien terminée car je n'ai pas très bien vécu les six derniers mois. Je ne comprenais pas trop mon éviction de l'équipe de départ».
Une traversée du désert compliquée
Libre, il a logiquement été sollicité au mercato d'été : «Il y a eu trois offres concrètes de l'étranger. Deux des Etats-Unis et l'une d'un bon club chypriote. Mais je n'ai pas eu la lucidité et l'intelligence de répondre positivement, ou même de répondre tout court à ces offres, car je pensais que j'allais avoir mieux tout simplement. Mais quand on rate le train, c'est assez compliqué de le reprendre surtout à cette période-là où beaucoup de joueurs étaient sur le carreau». Il faut dire que le Français avait une petite idée de la destination où il souhaitait poursuivre sa carrière : «Je ne voulais pas rester en France. J'avais l'espoir de retourner en Angleterre, en Championship (...) Depuis que je suis parti d'Angleterre, c'est assez compliqué car j'ai un décalage avec la mentalité française, avec la façon d'aborder les matches en France. L'Angleterre, ça a été 5 années merveilleuses de ma carrière. On a tout là-bas. L'engouement, des matches de très haut niveau, c'est un rythme qui me convient. Je suis tombé amoureux de la mentalité et du football anglo-saxon. Ma première idée était d'y retourner. J'ai eu des touches mais ça n'a pas été au bout».
Sans club, Faubert a continué à travailler d'arrache-pied depuis son départ de Gironde. «J'ai rejoint ma famille qui vit à Barcelone. Je me suis entraîné tous les jours avec l'Hospitalet, une équipe de troisième division. Les matins, j'avais entraînement. Je touchais beaucoup le ballon. J'avais aussi un entraîneur personnel. Tous les soirs, j'allais à la salle pour garder la forme. On peaufinait l'aspect physique, la musculation, le cardio. Le but était de garder un minimum de forme et d'éviter de prendre du poids». Malgré tout son quotidien de footballeur professionnel a été impacté. «Etre dans un groupe, s'entraîner tous les jours m'a manqué. Même si je me levais tous les matins pour aller m'entraîner, ce n'était pas pareil. Je ne faisais pas partie intégrante d'un groupe. Je suis un compétiteur dans l'âme donc les matches, l'adrénaline me manquaient». D'autant que l'ancien Bordelais sentait qu'il en avait sous le pied : «Ça a été une longue traversée du désert. C'était compliqué surtout psychologiquement. Je savais que j'étais encore compétitif. Je sais que j'ai encore trois ou quatre ans devant moi. Mon corps répond bien. Ça a été dur mais je savais qu'à un moment donné, ça allait tourner. J'ai été pro à l'âge de 17 ans. J'en ai 32 aujourd'hui. Je sais comment cela se passe dans le football. On vous oublie vite. C'est ma passion, mais c'est un milieu qui n'est pas forcément agréable. Dans cette période difficile, j'ai pu compter sur mes enfants, mes proches, des amis agents. J'ai passé 6-7 mois difficiles. Mais c'est plus facile quand on est entouré».
Une nouvelle aventure en Ecosse
Des proches qui lui ont donné la force de ne jamais lâcher. Après un essai non concluant à Saint Johnstone malgré une semaine positive, Julien Faubert a été contacté par le club écossais de Kilmarnock : «Je connais bien le nouvel entraîneur (Lee Clarck) qui est arrivé il y a trois semaines. Il a un gros bagage et a beaucoup coaché en Championship. Il a une vision du football qui me convient parfaitement. Quand il a su que je n'avais pas d'accord avec Saint Jonhstone, il m'a demandé de venir une semaine. Il voulait voir comment je me sentais physiquement, si je pouvais tenir au moins 70-80 minutes. Il a été surpris. Ça s'est fait naturellement». Le joueur né en 1983 s'est donc engagé jusqu'à la fin de la saison. Et il compte bien prouver qu'on a eu raison de croire en lui : «Je suis motivé. Motivé par l'envie de rendre ce qu'on m'a donné. Le club et le coach m'ont fait confiance. Je suis le premier joueur qu'il a fait signer depuis son arrivée. C'est un club méconnu en France, mais c'est un club doyen en Ecosse et très professionnel. Je me sens super bien ici. Je suis motivé pour aider le club parce qu'on est mal classé, même si ça ne remet pas en cause la qualité de l'équipe. Vu la façon dont on aborde les matches, on ne mérite pas d'être à cette place». Son équipe est classée 11e avec 28 points : «On est avant-dernier. L'objectif est de sortir de la zone des playoffs. On est ex-aequo avec le premier non relégable. On veut grappiller des points dans ce championnat qui va très vite. Si on peut rattraper cette 6e place voire au-dessus, ce serait bien».
Pour cela, Julien Faubert compte aider son club : «Je vais essayer d'apporter mon expérience, mon vécu de footballeur et d'encadrer certains jeunes, comme on a une équipe jeune. Je vais jouer mon rôle d'ancien comme à Bordeaux. Mon second objectif est de me relancer. Je sais que je peux encore jouer donc j'ai besoin s'accumuler des matches, des minutes. Je veux montrer que je ne suis pas fini». Il a pu le faire lors des deux matches qu'il a joués sous le maillot de Kilmarnock. Et c'est peu dire que Faubert était motivé lors de sa première le 27 février dernier, lui qui n'avait plus joué de match officiel depuis le 2 mai 2015 : «J'avais le couteau entre les dents. J'en avais marre de ne plus jouer. Objectivement, je me suis senti pas trop mal. Au niveau physique, je n'ai pas souffert. Sauf au niveau des jambes sur la fin je commençais à fatiguer (...) Je me sens de mieux en mieux au fil des semaines. On travaille physiquement pour que je rattrape mon retard. Je peux tenir 70-80 minutes mais je ne suis pas encore à 100% de mes capacités». Kilmarnock aura besoin d'un Faubert à 100% pour atteindre ses objectifs. Car une descente pourrait impacter malgré tout l'avenir du Français qui refuse de penser à cela : «J'ai signé jusqu'à la fin de la saison. Je suis concentré sur l'équipe. Après on verra ce qu'on compte faire avec mes représentants et le club. Pour le moment, mon objectif est de revenir à mon meilleur niveau et surtout d'aider le club à sortir de cette situation». Une mission taillée sur mesure pour un Julien Faubert qui revient de quelques mois de galère.
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