Adil Hermach dresse un constat étonnant du Moyen-Orient et de ses pétrodollars

Parti depuis quatre ans de L1 au Moyen-Orient, Adil Hermach dresse un bilan lucide de son expérience. Comme un poisson dans l’eau aux Émirats Arabes Unis, il évoque son bonheur dans les colonnes de la Voix du Nord et hésite même à rentrer en France. Un constat suffisamment surprenant qui méritait qu’on s’y attarde quelque peu.

Par La Rédaction FM
5 min.
Adil Hermach @Maxppp

Partir au Moyen-Orient a toujours été considéré comme une pré-retraite dorée pour footballeurs en fin de carrière. Mais depuis quelques années, il n’est pas rare de voir de grands espoirs de L1, voire même quelques joueurs confirmés en pleine force de l’âge, décider contre toute attente de céder aux sirènes des pétrodollars. C’est typiquement le cas d’Adil Hermach. Le Gardois, formé au RC Lens, a quitté le club artésien en 2010 à l’âge de 24 ans pour rejoindre l’Arabie Saoudite. En dépit de six mois convaincants au TFC entre janvier et juin 2013, l’international marocain est comme un poisson dans l’eau aux Émirats.

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Dans une interview accordée à la Voix du Nord, Hermach assume pleinement son choix et le revendique, et ce, même s’il assure que prendre la décision de signer au Moyen-Orient est tout sauf une partie de plaisir et une assurance tous risques pour gagner beaucoup d’argent. « C’est difficile de durer dans le Golfe. Moi, ça fait quatre ans que j’y suis et on n’est pas beaucoup dans ce cas-là. David Trezeguet ou Luca Toni sont venus ici et n’ont pas laissé un grand souvenir. Il y a des tas d’exemples comme ça. Pour faire sa place ici, il faut faire plus que ce qu’on attend de toi en tant que joueur étranger. Il faut constamment être à 100 % et c’est parfois compliqué avec la chaleur. Ce n’est pas toujours facile à comprendre vu de France, mais il n’y a que quatre étrangers par équipe, dont un Asiatique. En Arabie saoudite, j’ai vu des joueurs partir au bout de trois matchs. Quand tu viens dans le Golfe, tu dois te dire que tu as un contrat de six mois, que tu seras constamment sur un siège éjectable. »

Une période d’adaptation compliquée… mais un gros chèque à la clé

Mais à l’écouter, une fois passée la période d’adaptation, il y a tout ce qu’il faut pour s’épanouir en tant qu’homme, mais également en tant que footballeur. « S’il n’y avait que l’argent, personnellement, je serais resté en Arabie Saoudite. Moi, je me vois vieillir aux Émirats, honnêtement. Pour l’instant, je fais mon métier, qui est le plus beau métier du monde, dans un cadre de vie incroyable. Tous les jours, je me demande si je vais vraiment rentrer en France. Dubaï, c’est plus bling-bling, mais Abu Dhabi est une ville différente. Pas d’insécurité, tu peux laisser ta voiture avec le moteur qui tourne, les portières ouvertes avec le portable, l’ordinateur sur le siège, on ne te prendra rien. Il fait beau toute l’année, pas de racisme, je suis musulman dans un pays musulman, pas d’impôts… On ne te regarde pas de travers parce que tu as une belle voiture, il n’y a pas de discrimination monétaire. Par contre, il y a du respect pour tout le monde. À côté de ça, si tu veux jouer pour l’argent, tu peux aussi aller en Chine, à Oman… »

La Ligue 1 est désormais bien loin pour un joueur qui aurait pu signer au TFC à l’issue de son prêt, mais le club français était bien trop loin des salaires standards proposés par les clubs du Moyen-Orient. « J’aurais pu signer à Toulouse, qui me proposait trois ans de contrat, mais là, tu sors la calculette, tu réfléchis. Un an de salaire ici, c’est trois ou quatre ans pour un joueur moyen de Ligue 1. Le truc, c’est qu’il y a ce risque de ne pas faire un an. Le club nous met dans les meilleures conditions, mais il ne faut pas de suffisance. Ici, ils n’aiment pas ça. Mais si tu mouilles le maillot sur le terrain, ils ne sont pas ingrats. » D’autant que le niveau du championnat local ne serait pas si éloigné que celui de la L1. « Ici, il y a de bons joueurs individuellement et un jeu qui n’a rien à envier au jeu français, franchement. C’est juste qu’il y a la chaleur et le style arabe : ça entraîne moins de rigueur. »

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Le championnat Emirati, nouvelle terre d’asile d’anciens de L1

Aujourd’hui, l’ancien Lensois, qui évolue depuis deux ans au sein du club émirati d’Al Wahda est devenu un véritable cadre de son équipe et voit arriver de nombreux anciens joueurs et entraîneurs du championnat de France tels que Jonathan Pitroipa (ex-Rennes), Érik Gerets (ex-OM) et Cuperly (ex-Auxerre) à Al Jazira, Boucacar Sanogo (ex- ASSE) à Fujairah, Karim Ziani et Baky Koné (ex-OM) à Ajman. D'ailleurs, il se mue en véritable VRP du championnat émirati et n’hésite pas à louer ses avantages aux nombreux joueurs intéressés par le challenge. « C’est vrai qu’il y a de plus en plus de Français. Avant, on disait qu’ici, c’était un cimetière, le cimetière des éléphants. Maintenant, on voit arriver des joueurs de plus en plus jeunes, comme cet Argentin de 20 ans que l’Europe s’arrache et qui a signé à Al Jazira (Manuel Lanzini). Vous seriez étonné par les noms des Européens qui m’appellent, car ils veulent jouer ici. […] Les infrastructures sont vraiment pas mal, les pelouses sont des galettes, ce qui est un exploit vu la météo, les clubs sont aux petits soins des joueurs et de leurs familles. Ça progresse. Dans quelques années, on verra les championnats du Golfe dans l'Équipe du dimanche, j’en suis sûr. » D’ici là, nul doute qu’Adil Hermach continuera à traîner sa grande carcasse sur les terrains des Émirats Arabes Unis fier de marquer à sa façon le football. Une chose est sûre, les dirigeants émiratis ne pouvaient espérer de meilleur ambassadeur.

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