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Footsider, le "LinkedIn du football" qui prend de l’ampleur pour les jeunes

Footsider, une application lancée tout récemment sous l’impulsion de Ronaldinho et Yacine Brahimi, a organisé la plus grande journée de détection en France, le 24 février dernier. Foot Mercato était présent dans l’est parisien pour y rencontrer les acteurs de ce projet ambitieux, qui fait le bonheur de tout le monde dans le microcosme du ballon rond.

Par Lucas Billard
9 min.
Ronaldinho et Yacine Brahimi pour Footsider @Maxppp

Le LinkedIn du football. Voilà comment présenter Footsider, cette jeune application, lancée il y a deux mois avec l’aide de Ronaldinho et Yacine Brahimi. C’est simple : elle met en relation les clubs professionnels avec les joueurs issus des centres de formation et du monde amateur. « Pour les Joueurs, Footsider est ainsi l’opportunité d’entrer en contact avec des clubs et de se faire repérer par des recruteurs du monde professionnel et amateur grâce à des opportunités de détection. Pour les Clubs, l’application permet de simplifier le recrutement, de publier des annonces et d’avoir accès gratuitement à une base de données qualifiée de joueurs, afin d’organiser des essais ou des détections », éclaire Footsider, grâce à qui 2 joueurs ont déjà pu signer avec des clubs professionnels (Sassuolo et Sochaux), sur son site internet.

Footsider, dans la continuité de l’Académie Seconde Chance, a organisé la plus grande journée de détection en France

Forte de son partenariat tout frais avec le Stade Lavallois, à qui elle organise des détections et ramène 200 joueurs en échange simplement de la mise à disposition de ses terrains, l’application Footsider s’inscrit en fait dans la continuité de l’Académie Seconde Chance, créée il y a quatre ans avec Yacine Brahimi, son frère et son cousin, qui avait pour but d’organiser des détections une fois par mois dans toute la France. Mais la crise du Covid-19 est passée par là. « Les clubs nous appelaient et nous disaient qu’ils voulaient des détections », se remémore Rihane Mouhib, co-fondateur de Footsider, à notre micro. Ce qui les a poussés à digitaliser le concept. Après un an de développement, l’application a donc vu le jour tout récemment.

Les recruteurs lors d’une journée de détection organisée par Footsider

« Au lieu de dire merci et au revoir aux jeunes des centres qui ne sont pas conservés, ils vont être accompagnés par nous pendant un an », précise Rihane Mouhib, que nous avons rencontré au bord des terrains, lors de la plus grande journée de détection jamais organisée en France avec la présence de 45 clubs pros (dont Lens, Toulouse, Lorient ou encore le Torino, des clubs belges et espagnols), le 24 février dernier, dans l’est de Paris. « Ça veut dire qu’ils nous font quand même confiance. On leur facilite le travail », se félicite Rihane Mouhib. Ce jour-là, 115 joueurs, pré-sélectionnés par les recruteurs Footsider (des entraîneurs, des anciens joueurs) lors de détections organisées à Marseille, Bordeaux et Paris en amont, étaient présents pour tenter d’impressionner les observateurs.

Des joueurs comblés

Le 24 février dernier, la détection a porté ses fruits et plusieurs joueurs ont tapé dans l’oeil des recruteurs ayant fait le déplacement en Île-de-France. À commencer par Jibril Abdelaziz (16 ans), capitaine et attaquant des U16 R1 de Fleury-Mérogis, venu en voiture avec son père et son frère et auteur d’un triplé lors de la victoire 7-3 des siens dans le troisième et dernier match de la journée. « Le jeu était abordable pour mon niveau, il y avait des plus petits, mais franchement, j’ai tout donné, reconnaît, avec une lucidité déjà déconcertante, le jeune buteur. Un agent m’a contacté, j’ai installé l’application. J’ai rempli mes statistiques en à peine une soirée. J’ai postulé, j’ai pris un abonnement de même pas 10 euros, le prix est abordable, se remémore-t-il, avant de juger positivement cette détection. J’étais choqué quand tout le monde s’est mis à noter. C’est bien organisé, personne ne jouait personnel. J’ai déjà fait des détections où tout le monde jouait perso, franchement, c’est pas du jeu. Tout le monde jouait pour l’attaquant, pour son équipe. Dans les clubs pro, ils nous mettent souvent par deux ou trois. Là, c’est dans la région parisienne, c’est chez nous. »

Yves Hendrickx, défenseur central gaucher carrément venu de Bruxelles avec son père et qui évolue aux Enfants de Bruxelles, au niveau national, valide lui aussi l’organisation de tout cela. « J’avais déjà participé à une détection à Saragosse, avec l’Académie Seconde Chance, qui m’avait invité à Footsider. Les inscriptions étaient très faciles. On a dû jouer contre deux clubs, dont deux clubs de D2 espagnoles. » Une chose est sûre : le jeune Belge croit en ses chances d’être repéré. « Je n’ai pas vraiment de regrets… j’aurais pu soigner deux, trois passes qui pouvaient avoir des conséquences pour l’équipe, mais à part ça, ça va. Ça ne s’arrête pas ici. Il y a d’autres opportunités. Si ce n’est pas Footsider, ça sera quelque chose d’autre. J’espère que je pourrais signer un contrat avec un club professionnel. »

Un constat partagé par Jibril Abdelaziz, qui n’est en revanche pas aussi pressé et garde la tête bien ancrée sur les épaules. « Les clubs pro, ça m’intéresse, mais j’aimerais bien monter en 17 Nat avec mon club, confie le jeune homme, déjà bien mature. Si je performe et que je joue en 19 Nat, c’est le top niveau. Ma philosophie c’est tout le temps d’attendre quand j’ai le choix, de bien réfléchir. Il faut que mon avenir soit sûr. Je ne baisserai jamais les bras. S’il y a des clubs pro, tant mieux, sinon je continuerai de m’améliorer. » Cela tombe bien pour eux, les recruteurs présents sur place ont pu trouver leur bonheur. Selon nos informations, Jibril Abdelaziz a d’ailleurs déjà été appelé par plusieurs clubs.

Les recruteurs à l’affût et pointilleux

« Il y a un dossier urgent, on est déjà en train de faire ce qu’il faut pour organiser un essai, assure Joris Crolbois, commentateur pour Prime Video et RMC Sport, mais aussi recruteur pour Vicenza (5e de Serie C). En Italie, on a un vrai problème en D3, on ne peut pas faire venir de joueur en dessous de 18 ans. Il y avait un 2006 qui m’intéressait fortement, je vais devoir croiser les doigts pour qu’il ne parte pas ailleurs en attendant. Je vais continuer à le suivre s’il reste en France. Je vais envoyer mes rapports, ils vont regarder les vidéos, on va se concerter, on va faire une réunion et on va étudier tout ça.
Je ne parle pas aux joueurs, il y a le côté humain : je préfère rester discret pour le joueur pour éviter qu’il fasse des plans sur la comète. Quand tu as des faux espoirs, c’est terrible. J’essaye de les ménager, l’humain passe avant tout, surtout pour des jeunes comme ça.
»

Preuve que l’événement profite à tout le monde. « C’est toujours intéressant de voir des joueurs aux qualités différentes s’affronter », souligne Giuseppe Geria, directeur du centre de formation à Reggina, passé par la Juventus et Pescara. « Cette détection, c’est très bien, ça permet de regrouper les joueurs qui passent un peu sous les radars, analyse Joris Crolbois. Il y en a quelques-uns que j’avais déjà vus. Ça les met dans un environnement avec un petit peu plus de pression aussi, ça permet de se rendre compte de la capacité d’adaptation en plus de leur talent. »

Le monde amateur profite également des services de Footsider

Et les recruteurs d’insister sur un élément essentiel à prendre en compte dans leur réflexion. « Le langage corporel et l’image que renvoie un joueur, c’est même aussi important que le talent, estime Joris Crolbois. Par exemple, il y avait un joueur que je trouvais excellent, c’était même le meilleur dans le premier match. Mais il avait une nonchalance qui me faisait dire que je préfère un joueur un peu moins bon, mais qui aura plus la niaque. Mais si déjà aujourd’hui, devant des recruteurs, alors que ça peut être un tournant pour sa vie et sa carrière, il est déjà nonchalant, en club, avec le confort, ça peut être encore pire. Le comportement, c’est rédhibitoire. Par exemple, c’est tout bête, mais dans le premier match, il y avait un joueur qui m’intéressait. Par son talent, son physique. Il y a eu un penalty. Il est avant-centre. Il a pris le ballon, il est allé relever son coéquipier et il lui a donné le ballon. C’est un petit geste qui dit que le mec a déjà un très bon mental et qu’il n’y aura pas de problème dans un club. »

Mais si la possibilité de devenir professionnel fait forcément rêver la majorité des utilisateurs, Rihane Mouhib met aussi l’accent sur leur importance pour le monde amateur. « On est vraiment le LinkedIn du foot. Par exemple, un joueur à Toulouse qui arrive à Bordeaux pour ses études, il ne connaît pas lez clubs à Bordeaux, il lui suffit de postuler et il envoie une notif’ à tous les clubs. Le contraire marche aussi. Un club de R1 ou même en D1, il recherche un joueur, il dit "je cherche un attaquant, niveau R1, 1,80 m…" tous les joueurs reçoivent la notification. Les joueurs postulent alors à ce qu’on appelle une "opportunité" et le club fait son choix. »

Ronaldinho et Yacine Brahimi, véritables leaders impliqués d’un projet ambitieux

Loin des terrains, mais près du cœur, Ronaldinho et Yacine Brahimi chapeautent donc tout ce petit monde. « Leur point d’orgue, c’est vraiment le social, pour aider ces jeunes-là, précise le co-fondateur de Footsider. Yacine et Ronaldinho suivent tout. On leur fait des rapports chaque semaine. Ils sont complètement investis, c’est un projet social hyper important pour eux. On essaye de les voir une fois par mois. Ce n’est pas évident, il faut voyager. Yacine est au Qatar (il joue à Al Gharafa, NDLR). Ronaldinho lui voyage beaucoup donc quand il est en Europe, on essaye d’y aller. On a eu la chance de les voir dernière semaine du Mondial au Qatar tous les deux. Et il y a 10 jours ils y étaient encore, Ronaldinho pour ses projets à lui. »

Footsider, l’application fondée par Ronaldinho et Yacine Brahimi

Et Rihane Mouhib d’en dire plus sur les ambitions du Ballon d’Or 2005 et de l’international algérien. « Leur objectif, c’est qu’on développe ça à l’international en 2024. Ils veulent qu’on développe en Afrique et en Amérique du Sud. Ils veulent aussi qu’on combatte les "mauvais agents" qui vont prendre de l’argent au joueur, le ramener en Europe sans jamais lui trouver une opportunité. L’application sera gratuite pour tout le monde et il y aura un volet pédagogique. Notre rêve, avec Yacine et Ronaldinho, c’est de partir au Sénégal, au Congo, en Algérie, d’organiser ce genre d’événement. De ramener 50 clubs étrangers et de développer des clubs locaux. » L’application, qui compte déjà presque 30 000 joueurs et 600 clubs, espère pouvoir se rapprocher de la LFP et de la FFF pour encore viser plus haut. Footsider est en tout cas sur la bonne voie.

L’application Footsider disponible ici

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