Liga : et si la Real Sociedad était le meilleur centre de formation d’Europe ?
Troisième en Liga, la Real Sociedad continue de s’affirmer comme l’un des meilleurs clubs du pays depuis quelques années. Et c’est en énorme partie grâce à son centre de formation.
S’il y a un club qui est en train d’entrer dans une nouvelle dimension en Espagne, c’est la Real Sociedad. L’écurie de Saint-Sébastien a déjà, épisodiquement, connu quelques belles épopées tout au long de sa belle histoire, mais c’est maintenant qu’elle s’installe durablement parmi les meilleures équipes du pays. Et c’est en (très) grande partie grâce à son centre de formation. Derrière le titre de cet article qui peut sembler démesuré et éxagéré, dans la mesure où il reste difficile de placer l’académie du club basque devant l’Ajax, le FC Barcelone ou même le Real Madrid et le PSG, et les voisins de l’Athletic, il y a un véritable travail de fond qui porte ses fruits. Si on met de côté la formation voisine de Bilbao du fait de sa politique sportive, on peut affirmer sans sourciller que c’est le club qui donne le plus d’importance aux joueurs issus de son académie, et où ces derniers ont le plus d’importance dans les succès de l’équipe.
Les chiffres le confirment. Lors d’un récent rapport, le CIES, Centre International d’Etude du Sport a prouvé que la Real Sociedad est le deuxième club qui compte le plus de joueurs formés à la maison dans l’effectif de son équipe première, derrière le MSK Zilina en Slovaquie. Parmi les clubs du top 5, les Bleu et Blanc sont donc ceux qui font le plus confiance aux joueurs de leur académie, avec 63% de joueurs utilisés cette saison qui sont passés par le centre de formation de Zubieta. Un pourcentage qui devrait théoriquement être encore plus élevé, puisque Mikel Oyarzabal par exemple, la star de l’équipe, n’avait pas encore joué cette saison au moment de la publicaton de cette étude, la faute à une longue blessure datant de la fin du dernier exercice. Et ces joueurs formés à la maison ne sont pas là pour faire de la figuration, clairement pas, puisqu’Imanol Alguacil, coach également issu des catégories inférieures, leur confie d’énormes responsabilités.
La méthode Zubieta, reconnue à l’international
Dans l’effectif, on compte ainsi de nombreux joueurs majeurs formés localement, comme Oyarzabal cité ci-dessus, ou Martin Zubimendi, appelé à être le futur grand milieu défensif de la sélection espagnole. On est aussi obligé de mentionner la charnière centrale composée d’Igor Zubeldia et du Français Robin Le Normand, ou du virevoltant ailier Ander Barrenetxea. Dans le même temps, de nombreux espoirs comme l’attaquant Jon Karraburu (20 ans), le milieu de terrain Beñat Turrientes (20 ans) et le défenseur central Jon Pacheco (21 ans) commencent à pointer le bout de leur nez et devraient avoir un rôle majeur dans un avenir relativement proche.
Il faut dire que la saison dernière, l’équipe B du club évoluait en deuxième division, ce qui est très rare, puisque généralement les filiales jouent en D3 et D4 et montent rarement aussi haut. Mais c’est la preuve que les joueurs issus du système txuri-urdin sont très rapidement opérationnels au niveau pro.
Comment expliquer ce succès ? Toutes les équipes de jeunes la Real Sociedad, masculines comme féminine, s’entraînent au même endroit. Cela peut sembler anecdotique et même évident pour beaucoup, mais c’est loin d’être le cas partout. Le tout, avec des méthodes d’entraînement similaires et une philosophie plutôt basée sur la possession de balle. Dès les catégories les plus basses, les gamins jouent comme l’équipe première. On retrouve ainsi beaucoup de similitudes avec La Masia du FC Barcelone, mais contrairement au club catalan qui se veut très ouvert sur le reste de l’Espagne et même sur l’international, l’énorme majorité des jeunes qui débarquent à Zubieta sont des gamins du coin. Le club a ainsi un réseau de plus de 80 partenaires amateurs de la région dans lesquels il n’hésite pas à piocher pour trouver les talents de demain.
Il y a clairement la volonté, en appliquant cette politique de captation de talents quasi exclusivement locaux, de créer un sentiment d’appartenance fort. Non seulement ces jeunes ont intégré les concepts footballistiques du club depuis petit, se connaissent déjà et sont très proches pour la plupart, mais ils ont en plus cette motivation supplémentaire de défendre les couleurs de leur ville et/ou de leur région. Ce qui permet aussi d’avoir généralement un vestiaire très sain et une grosse cohésion au sein du groupe, auxquels viennent s’ajouter quelques joueurs étrangers ou du reste du pays, à l’image de David Silva, Take Kubo ou Mikel Merino cette saison. Clairement, à la Real Sociedad, on ne recrute des joueurs que s’ils apportent une vraie plus-value et comblent des lacunes que le centre de formation ne peut pas satisfaire. Sinon, on fait monter les gens de chez nous !
Tradition et modernité
Si la Real Sociedad peut sembler un club familial aux premiers abords, c’est l’une des institutions les plus avancées en termes d’application de la technologie dans le foot. C’est l’ancien joueur Roberto Olabe - à noter que le club n’hésite pas à employer d’anciens joueurs pour transmettre cet esprit et prolonger le modèle - qui s’occupe de tout ça, et il a été l’un des premiers si ce n’est le premier à introduire le big data dans le football espagnol. Et il l’applique dès les équipes de jeune. Pour lui, le club s’articule autour de cinq piliers qui vont déterminer la réussite ou non du club et de ses joueurs : l’entraînement, la compétition, l’éducation, l’évaluation et la sélection. Si certains peuvent penser que les jeunes joueurs basques sont plutôt tranquilles et peuvent se développer de façon plutôt posée, ils sont soumis à une exigence et à un rythme pour le moins élevé et seuls les meilleurs parviennent à atteindre l’équipe professionnelle. Et généralement, à la Real, on ne se trompe pas avec les jeunes. La preuve, il n’y a aucun joueur de haut niveau formé à la Real Sociedad qui a explosé sans avoir eu sa chance en équipe première, ce qui est pourtant très souvent le cas au FC Barcelone (Mauro Icardi, Onana, Grimaldo) ou au Real Madrid (Fabinho, Juan Mata, Eto’o) pour citer quelques exemples.
En interne, on travaille notamment avec une plateforme commune à tous les éducateurs du club et dans laquelle chaque joueur est évalué au quotidien. On peut notamment avoir accès aux performances physiques de chaque jeune, à une infinité de données statistiques, à des aspects liés à la nutrition ou à leurs prestations en match. Les joueurs eux ont accès à une application dans laquelle ils doivent répondre à des questions liées à leur état physique et mental avant et après les entraînements, comme révélé par El Pais récemment. Vous l’aurez compris, rien n’est laissé au hasard, tout est sous contrôle, et les jeunes pousses basques connaissent un parcours formateur aussi efficace qu’exigeant. Et c’est pour cette raison que la Real Sociedad a remporté la Copa del Rey en 2020 et qu’on risque de la revoir en Ligue des Champions très rapidement…
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