Parc des Princes : le PSG peut-il vraiment avoir un nouveau stade d’ici 4 ans ?
Les déclarations chocs de Nasser Al-Khelaïfi sur la possibilité d’avoir son nouveau stade "dans 3 ou 4 ans" font plus office d’un nouveau coup de pression sur la mairie de Paris que de réelles intentions. Et ce malgré la volonté du président du PSG d’aller vite.
Le bras de fer entre le PSG et la mairie de Paris à propos de l’avenir du Parc des Princes est reparti de plus belle hier. À l’occasion de l’inauguration du Campus PSG à Poissy, Nasser Al-Khelaïfi a profité de son passage sur les ondes de RMC pour remettre un coup de pression en direction d’Anne Hidalgo et de son équipe municipale. «J’aime beaucoup le Parc des Princes, tout le monde l’aime. Si je décide avec mon cœur, je dis : “on ne part pas”. Mais quand je réfléchis avec la tête, on est mort. En Europe, tous les grands clubs ont 80 000 ou 90 000 places. (…) On va partir. On n’a pas le choix. La ville ne nous laisse pas le choix», affirme le président du club, laissant entendre qu’il voulait aller vite, très vite malgré le désaccord des supporters à ce sujet. «On a besoin d’un stade dans 3 ou 4 ans. On n’a pas le temps d’attendre (les élections) sinon on est derrière d’autres clubs en Europe.»
Une déclaration d’intention sans doute sincère, mais très (trop ?) optimiste au regard des derniers dossiers de construction de stades en France. L’OL a par exemple mis un peu moins d’une décennie pour obtenir son Parc OL, (Groupama Stadium aujourd’hui). Le projet de construction a été déposé en 2007, mais les travaux ont démarré en 2012 pour s’achever en 2015 et inaugurer ce tout nouvel écrin l’année suivante. Initialement, le club rhodanien souhaitait entrer dans son stade en 2010 puis 2012, mais la quête du terrain idoine, la lourdeur administrative, les diverses révisions du plan local d’urbanisme (PLU), la forte opposition locale et les difficultés à trouver les différentes sources de financements ont causé de nombreux retards. Propriété du club, le Groupama Stadium a été financé sur des fonds privés, comme ça devrait être le cas du PSG.
Lorrain Merckaert, maire de Montigny-le-Bretonneux : «C’est un projet qui mettra dix ans à se mettre en place»
Les autres récents projets de stades, construits pour l’Euro 2016, ont pris moins de temps en raison de partenariats public-privé. Lille a par exemple mis 6 ans pour obtenir le stade Pierre-Mauroy, Bordeaux et Nice 5 ans. Le nouveau Campus PSG a lui pris 7 ans (2016-2023). Dans ces conditions, difficile d’imaginer un bâtiment de l’envergure d’un stade de «80 000 ou 90 0000 places» sortir de terre d’ici 2028 ou même 2029, alors même que le PSG n’a toujours pas de terrain. Voisin du Bois de Boulogne, l’hippodrome de Saint-Cloud (Hauts-de-Seine), propriété de France Galop qui n’est pas vendeur, fut un temps une option, mais sa transformation est quasi impossible. Il faudrait modifier le plan local d’urbanisme, ce que la mairie refuse de faire. «Les hippodromes resteront des hippodromes, c’est leur vocation première. Ce n’est pas compatible avec les projets annoncés» indiquait même une source à RMC au début de l’année.
Il faut regarder ailleurs, plus loin en banlieue. Les deux sites favoris se concentrent autour de Montigny-le-Bretonneux (Yvelines), à une grosse vingtaine de kilomètres de la capitale, et d’Aulnay-sous-Bois en Seine-Saint-Denis, légèrement plus proche. Pour le premier, un terrain de 50 hectares a été identifié au nord de l’île de loisirs de Saint-Quentin-en-Yvelines, à proximité du vélodrome national qui a notamment accueilli les épreuves de cyclisme sur piste pendant les Jeux Olympiques. Les échanges ont démarré il y a deux ans déjà pour une réponse espérée dans les prochaines semaines. «Les discussions sont en stand-by. Normalement, on devrait avoir une réponse officielle d’ici la fin de l’année civile. Si l’option est sérieuse, nous entamerons toutes les discussions. C’est un projet qui mettra dix ans à se mettre en place», avertissait déjà le maire de la commune, Lorrain Merckaert en octobre dernier.
Deux sites se dégagent
L’édile Divers Droite se satisfait de ce projet. Il s’agit pour lui d’attirer des entreprises et des emplois sur sa commune, tout en étant réaliste sur le calendrier. Même en étant réélu en 2026, il n’est pas certain d’être toujours à son poste 6 ans plus tard pour voir ce stade sortir de terre. Les maires de gauche de l’agglomération ont déjà fait part de leurs inquiétudes et il faudra sans doute compter avec des associations de riverains mécontents, voire des associations écologistes, en plus de contraintes environnementales à respecter. La coquette banlieue ouest parisienne conserve jalousement son cadre paisible. On en oublierait presque certains désagréments liés à l’envergure de ce type de chantier comme la découverte éventuelle de zones archéologiques. Autant d’obstacles qui allongent la frise chronologique, et ce même si la Région Île-de-France a proposé un terrain de 50 hectares, sans en préciser sa localisation.
La commune d’Aulnay-sous-Bois a, elle, été plus bruyante dans sa communication. Elle fut la première à se positionner pour accueillir le PSG. La ville a même publié sur X un clip à grand renfort de stars locales (l’ancien footballeur Olivier Dacourt et l’acteur Saïd Taghmaoui) donnant un aperçu de son projet. Elle utiliserait les friches de l’ancienne usine PSA, fermée en 2014, comme terrain pour cet hypothétique nouveau stade. Le lieu a l’avantage d’être dans une immense zone (environ 180 hectares encore disponibles) « prêts à l’emploi » argumente le maire Bruno Beschizza, dont il ne sait que faire. «Nous avons à disposition des terres déjà artificialisées, sans projet agricole comme c’est le cas du Triangle du Gonesse et sans voisinage direct, desservies par trois autoroutes, deux aéroports et bientôt une gare du Grand Paris Express», poursuit l’élu.
Un dossier aux multiples contraintes
Diverses activités ont déjà commencé à remplir ces 300 hectares, participant à la redynamisation d’un site, autrefois symbole de pertes d’emplois et désindustrialisation. La venue du PSG donnerait une très forte valeur ajoutée à une ville dont l’image est rarement valorisée dans les médias. Reste que la localisation, loin des quartiers cossus de la capitale ou des villes bourgeoises de l’Ouest parisien détonne dans cette candidature. « On prospecte toujours, plusieurs projets sont sur la table pour accueillir un stade de 60 000 places. C’est compliqué, on ne va pas le cacher. Il faut une superficie suffisante, il y a des contraintes législatives, environnementales… Il n’y a pas des dizaines de lieux, mais il y en a » indiquait Victoriano Melero, le nouveau directeur général du PSG à L’Equipe début octobre. Ce dernier tablait sur « huit ans au minimum » dans ce dossier, soit le double de ce qu’espère Nasser Al-Khelaïfi.
La déclaration de jeudi s’apparente surtout à un nouveau coup de pression face à une mairie, qui elle aussi campe sur ses positions. Le Parc des Princes n’est pas à vendre, surtout pas au tarif de 40 M€ proposé par le PSG en 2022. La municipalité estime le stade à au moins 350 millions d’euros. À titre de comparaison, la construction du Parc OL a coûté 450 M€. Face à ces délais interminables, c’est peut-être le temps politique qui fera pencher la balance. Très discutée, Anne Hidalgo (PS) ne briguerait pas un 3e mandat en 2026 à la tête de Paris. Sa principale opposante, Rachida Dati (LR), maire du 7e arrondissement par ailleurs ministre de la Culture, entretient des relations plus étroites avec le PSG et Nasser Al-Khelaïfi. Elle était d’ailleurs présente à Poissy pour l’inauguration du Campus. Son souhait est de voir le PSG rester dans la capitale. «Le PSG doit rester à Paris», exprime celle qui devrait être candidate en 2026.
Les élections municipales de 2026 comme réel facteur de changement ?
Un changement d’équipe municipale rebattrait les cartes. La question de la vente du Parc des Princes, où le PSG a signé un bail de location jusqu’en 2043 moyennant un loyer annuel de 2,5 M€ par an, pourrait être réouverte. Le conflit s’est même étendu à la région Île-de-France. En septembre dernier la région présidée par Valérie Pécresse (LR) a officiellement mis à disposition un espace de 50 hectares au club, sans en préciser sa localisation. «Le club a demandé, pendant l’enquête publique, de réserver, dans le schéma d’aménagement de l’Île-de-France, qui autorise les grandes infrastructures de l’Île-de-France, 50 hectares pour un éventuel déménagement du PSG en dehors de Paris. Nous avons dit oui parce que nous n’allons pas priver notre club de l’infrastructure qui est nécessaire pour lui. Si le PSG est chassé de Paris, évidemment, nous l’accueillerons ailleurs, en Île-de-France.»
Cette décision a provoqué le courroux des élus parisiens. Toujours partisan d’une modernisation du Parc, le conseil de Paris a formulé le voeu de saisir « la justice administrative aux fins d’annulation de l’amendement porté au SDRIF (le schéma directeur de la région Île-de-France, document définissant la politique d’urbanisme et d’aménagement du territoire) en faveur de l’installation du PSG dans un stade en Île-de-France, en dehors de Paris, et sans localisation. » Certains élus de la capitale sont aussi des conseillers régionaux Les Républicains et n’ont pas voté contre le voeu du conseil de Paris, risquant de se mettre à dos la présidente de région. Le dossier risque de traîner une nouvelle fois en longueur. C’est plutôt l’arène politique qui pourrait orienter les décisions à venir, au mieux en mars 2026 à l’occasion des prochaines élections municipales. D’ici là, le PSG aura pu avancer dans son projet, mais pour voir le club dans son nouvel écrin flambant neuf, il faut regarder bien plus loin.