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Comores : la folle histoire de William Vouama, un rescapé du football

À 26 ans et pour la première fois de sa carrière, William Vouama s’apprête à arborer le maillot des Comores ce samedi face au Lesotho (16h00). La récompense d’un travail de longue haleine pour un joueur qui pensait pourtant, il y a encore trois ans, à tout arrêter.

Par Jordan Pardon
6 min.
William Vouama sous les couleurs de Fleury-Mérogis @Maxppp

Les dix derniers jours furent émotionnellement chargés, et c’est un euphémisme, pour William Vouama. Si l’affliction a naturellement rythmé les heures qui ont suivi la désillusion de Fleury-Mérogis dans le championnat de National 2, dauphin d’Épinal et condamné à évoluer une saison de plus dans le quatrième ordre du football français, à cinq buts près, un faisceau lumineux est apparu sur l’archipel des Comores. La semaine dernière, le natif de Corbeil-Essonnes a en effet eu l’insondable bonheur d’apprendre sa convocation dans le groupe des Cœlacanthes, en vue du match de qualification pour la CAN 2024 face au Lesotho, ce samedi (16h00). «Choqué», se dit-il, au moment de l’appel du sélectionneur Younès Zerdouk pour lui annoncer sa pré-sélection : «Quand le coach m’appelle et me parle, je n’ai pas les mots, en fait, je ne sais pas quoi dire. Il m’annonce soudainement que je suis pré-convoqué, mais je n’étais pas du tout au courant, raconte-il encore tout émoustillé. Si le moi d’il y a deux ou trois ans pouvait s’imaginer cela ? Jamais, je pensais plus à arrêter le foot qu’à m’imaginer jouer les éliminatoires de la CAN avec mon pays,» rembobine-t-il le sourire jusqu’aux oreilles.

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Faire un break et prendre ses distances avec le football, il connaît, mais heureusement ce ne fut que transitoire. Car avant d’emprunter cette autoroute étoilée de la réussite, Vouama a parfois dû démarrer à reculons sur des voies escarpées, trébucher sur les obstacles, et se relever. En 2018, tandis qu’il sort d’une première - et donc dernière - saison avec la réserve d’Amiens, le Franco-Comorien bifurque et décide de rejoindre Marseille Consolat, alors pensionnaire de National 1. Un échec fracassant. «En février (2017), je m’entraînais avec le groupe professionnel d’Amiens qui jouait la montée en Ligue 1. Le club m’a alors promis de signer pro après le mercato, une promesse finalement reportée. J’étais jeune et insouciant à cette époque et je leur ai indiqué que je préférais partir et résilier mon contrat», se remémore-t-il, sans regrets. Pourtant, les zones de turbulences se sont intensifiées à partir de ce moment. Si j’ai eu des moments de doute après Amiens ? Oui, de très gros même. J’ai fait seulement trois mois à Marseille Consolat (aujourd’hui Athlético Aix Marseille Provence) où c’était compliqué, et j’ai arrêté le football pendant une saison et demi. C’est mon coach formateur que j’ai toujours eu à Viry-Châtillon qui m’a remotivé et qui m’a convaincu que ma carrière ne s’arrêtait pas à cette étape, relate-t-il avec humilité.

Il incarne un message d’espoir pour les plus jeunes

Outre cette obstination à fer forgé qu’il s’est cultivée au fil des années et qu’il revendique comme «primordiale» pour réussir, Vouama incarne également un message d’espoir par le fait qu’il n’ait pas connu de centre de formation. Et manifestement, il reste convaincu que cela a favorisé son évolution : «Pour moi ce n’est plus indispensable de faire un centre de formation. Quand tu arrives en centre, on te bride très rapidement à un style de jeu, puis une fois arrivé à la passerelle du monde professionnel, on te refait changer ce style. Si tu ne fais pas de centre, tu as la possibilité d’épurer ton jeu et de le faire évoluer au fil des années», analyse le joueur arrivé à Amiens à l’âge de 20 ans.

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À l’époque, Vouama débarque dans la Somme en provenance de Viry-Châtillon, club situé dans le département de l’Essonne et où il s’est aiguisé les dents dès l’âge de 16 ans en CFA. «Ça donne une grande avance de jouer avec des adultes très tôt, pèse-t-il. J’ai assimilé beaucoup de choses, notamment dans la compréhension du jeu. Je faisais des choses en jeunes que je ne pouvais pas me permettre de faire avec des adultes. Mais le processus a été long, j’ai débuté à 16 ans en CFA et je n’ai confirmé qu’à 21 ans. C’est compliqué d’être davantage jugé sur les statistiques que sur ton évolution», déplore Vouama. À 21 ans, l’explosif ailier droit semble tout de même arriver à maturité. En ralliant Amiens en janvier 2018, il n’est pas véritablement surpris par ce qui l’attend.

«Forcément, le joueur en centre de formation accumule un bagage technique et tactique que n’aura pas le joueur qui n’en a pas fait. Mais en arrivant, j’avais faim et je savais que c’était une énorme opportunité pour moi. J’avais déjà plusieurs années chez les adultes derrière moi et ça m’a aidé», rembobine cet ami d’enfance de Tanguy Ndombele, son relais majeur à Amiens : «Tanguy a aussi été très important pour moi à mon arrivée, on se connaît depuis l’enfance (Ndombele est né dans la commune de Longjumeau, à quelques encablures de Corbeil-Essonne) et il m’a montré la voie en arrivant à Amiens. C’est mon pote. Il m’a félicité pour ma convocation avec les Comores la semaine dernière et je dois d’ailleurs aller le voir toute à l’heure», s’amuse-t-il, dressant par ailleurs un portrait de l’international français en décalage avec l’image qui lui a pourtant souvent collée à la peau : «À Amiens, Tanguy avait compris qu’il fallait saisir la moindre chance. Sur ses premiers entraînements et ses premières minutes, c’était impressionnant. Il avait la dalle et finalement ça a payé.»

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La Ligue 2, voire plus, en ligne de mire

Devenu une valeur sûre à son poste en National 2 cette saison, Vouama entend lui aussi nourrir de nouvelles ambitions. À 26 ans, il est conscient que l’horloge tourne et que le train du monde professionnel ne circule pas à des horaires réguliers : «*Les années passent donc forcément j’aimerais voir plus haut. Mes ambitions ? D’ici un ou deux ans, j’aimerais être en Ligue 2 minimum, si on peut voir plus haut, on ne refusera pas (sourire). Mais oui, je suis ouvert à un départ cet été, je veux encore évoluer. Je sais que des clubs viennent me voir, mais rien de concret pour le moment», assure ce grand fan du championnat allemand et anglais.

Ces dernières saisons en France, voir des joueurs de National 2 effectuer le grand saut vers le monde professionnel se fait d’ailleurs monnaie-courante. Saint-Étienne avait notamment eu le nez creux en allant déloger Jean-Philippe Krasso d’Épinal en 2020. Cette saison, l’Ivoirien cumule 17 buts et 12 passes décisives en Ligue 2, ce qui en fait le deuxième joueur le plus décisif du championnat. Un destin dont rêve bien évidemment Vouama. Déjà très «excité», il s’apprête à étrenner son nouveau statut d’international face au Lesotho samedi. Avec une jolie performance, le Comorien pourrait se voir offrir un abonnement sur la durée avec la sélection, et peut-être, la perspective de signer un premier contrat professionnel.

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