André Villas-Boas a claqué la porte de l'Olympique de Marseille. Il a utilisé le cas Ntcham, qu'il ne voulait pas, pour exprimer un désaccord sur la politique sportive. En réalité, le mal est plus profond.
Ce mardi, l'Olympique de Marseille a vécu une scène comme seul ce club peut en fabriquer : André Villas-Boas, l'entraîneur de l'OM, à qui il restait quatre mois de contrat, a claqué la porte, avec pertes et fracas. « J'ai présenté ma démission à la direction à cause de ça. Sans rien voler de la part de l'OM sur mon contrat. Je ne suis pas d'accord avec la politique sportive et cette prise de décision par rapport aux besoins de l'équipe et au joueur qui est arrivé. J'ai pris la décision de présenter ma démission à la direction. Je ne veux rien de l'OM ni de Frank McCourt, je veux seulement partir à cause d'un différend sur la politique sportive. C'est dommage qu'on en arrive à ce point là », s'est-il exprimé.
La raison ? Un désaccord concernant la venue d'Olivier Ntcham et une incompatibilité d'humeurs sur la politique sportive. « Le mercato a fini avec l'arrivée d'un nouveau joueur, une décision pas prise par moi, je n'ai rien à voir avec cette décision. Je l'ai apprise par la presse le matin au réveil. C'est précisément un joueur sur lequel j'ai dit non. Ca n'a jamais été un joueur dans notre liste. Et il a fini par venir, je n'étais pas pour », s'est-il justifié.
Aldridge, le point de départ
Mais la tension remontait à plus loin que cela. AVB l'a dit, s'il est venu à Marseille, c'était pour Andoni Zubizarreta. Mais l'arrivée de Paul Aldridge, en fin d'année 2019, débarqué pour aider à vendre des joueurs en Angleterre, a été mal perçue. Première conférence de presse hallucinante du Portugais fulminant d'apprendre dans la presse la venue de l'ancien de West Ham. Cette arrivée ouvrait la porte au départ d'Andoni Zubizarreta. Ce qui devait arriver, arriva. « C'est au président de justifier ce choix. Je ne pense pas que ça facilite les ventes vers les clubs anglais, c’est plutôt la compétitivité sportive qui permet aux joueurs de partir, ce n’est pas en mettant un agent ou un conseiller que ça va mieux fonctionner, mais bon... Au président de s'expliquer. J'ai appris cette décision avec surprise, mais je ne veux pas trop la commenter. Si c'est pour aider l'OM à survivre sur l'aspect économique, je peux comprendre, mais pour moi le plus important est de garder tout mon groupe et d'atteindre les objectifs que j'ai dit vouloir atteindre, à savoir la qualification pour la Ligue des champions », avait-il expliqué alors.
L'été dernier, l'Espagnol avait été libéré de son contrat et AVB était lui aussi sur le départ. Premier revirement de situation, Jacques-Henri Eyraud avait refusé son départ et ne voulait verser aucune indemnité. Coincé entre sa fidélité envers Zubi et celle envers ses joueurs, AVB décidait finalement de rester en laissant même pointer l'idée d'une future prolongation. La première offre était rejetée par le Portugais, il n'y en aura pas d'autres.
Les problèmes avec la presse
Outre la prise de bec musclée, pour laquelle il s'était excusé, avec un journaliste de La Provence, André Villas-Boas n'a eu de cesse, ces derniers temps, d'allumer la radio RMC, expliquant qu'il allait essayer de trouver qui était la « taupe ». Il apprenait par voie de presse le départ acté de Nemanja Radonjic du côté du Hertha Berlin, et même l'accord final entre l'Olympique de Marseille et Aston Villa concernant Morgan Sanson, qui avait refusé de jouer pour forcer son départ.
Si ses proches pouvaient éventuellement lâcher quelques bribes d'informations ci et là, c'est bien vers RMC que son regard était posé et en privé, il ne se privait pas d'expliquer ses incompréhensions vis-à-vis de la ou des personnes qui lâchaient certaines indiscrétions. Cela a aussi amené un autre point de la montée des tensions : son rapport à la hiérarchie et surtout ses valeurs concernant l'institution Olympique de Marseille.
Seul au front
Depuis quelque temps, André Villas-Boas répétait que l'OM était l'équipe la plus avertie de Ligue 1 (Marseille 63 cartons jaunes, dix de plus que l'avant-dernier, Monaco). D'aucuns expliqueront cela par le fait qu'il dévie le débat et qu'il se trouve des excuses, en pointant notamment l'arbitrage. AVB a été halluciné de la communication incendiaire de l'OM, notamment la publication de communiqués fustigeant les informations de certains médias. Depuis quelque temps, il était bien seul à défendre le club face aux attaques extérieures et aux décisions arbitrales.
L'impression d'être seul au front est aussi ce qui a beaucoup usé l'entraîneur portugais. Dans sa longue interview offerte à Ojogo (qui aurait d'ailleurs peut-être pu mériter une mise à pied), il expliquait le problème de gouvernance du football français et il visait principalement son président. Mais, sur cette fin d'aventure, les relations avec le nouveau head of football de l'OM, Pablo Longoria, se sont aussi détériorées.
Il s'est senti trahi par Longoria
L'été dernier, l'ancien de Tottenham voulait un attaquant, l'Uruguayen Darwin Nuñez, qui a finalement signé à Benfica (pour 24 M€ depuis Almeria). Pablo Longoria lui a alors proposé un jeune brésilien : Luis Henrique. AVB explique le profil que lui a justement présenté Longoria : un joueur capable d'évoluer aux trois postes devant. L'ennui ? Dans les faits ce n'est pas le cas. Pendant un long moment, AVB a défendu ce choix et attendait que Longoria prenne la parole. Ce ne sera pas le cas. C'est à ce moment-là qu'il s'est senti trahi. Cet hiver, Longoria et AVB avaient un accord : Longoria choisissait qui il voulait sauf les joueurs qu'AVB ne voulait pas. C'était le cas de Lovro Majer (Dinamo Zagreb) notamment.
La première des tensions de l'hiver a concerné Morgan Sanson. AVB pensait qu'il valait plus cher et n'a surtout pas apprécié l'attitude du joueur à la fin, ce dernier refusant de jouer contre l'AS Monaco. Olivier Ntcham est un jeune élément qu'il apprécie, qu'il trouve particulièrement fort. Mais, contrairement à l'été 2019, moment où son profil était étudié par Zubizarreta, le technicien lusitanien a expliqué ne pas en vouloir pour une question de profil. Cette fois, en agissant dans son dos, Pablo Longoria a fait couler l'ultime goutte d'eau qui a fait déborder le vase. Libre à tout le monde de se faire un avis, de penser qu'il ne faut pas laisser l'entraîneur, encore moins quand il n'a plus que quatre mois de contrat, influer sur le choix des joueurs. Cela paraît légitime. Mais faut-il au contraire recruter un joueur que le coach ne désire absolument pas ? C'est pour toutes ces raisons qu'André Villas-Boas a claqué la porte.
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