Les confessions surréalistes d’Eden Hazard sur sa carrière hors du commun !
Quatre mois après avoir annoncé sa retraite, Eden Hazard s’est longuement confié dans un entretien accordé à France Football. Désormais installé à Madrid, l’ancien joueur du LOSC Lille ou encore de Chelsea est ainsi revenu sur les coulisses d’une carrière aussi vertigineuse que discutée. Sans le moindre remord et avec un franc-parler propre à lui, l’attaquant belge de 33 ans a alors détaillé sa personnalité et sa vision du football. Morceaux choisis.
À sa manière, Eden Hazard (33 ans) aura marqué l’histoire du football. Loin des standards époustouflants d’un Cristiano Ronaldo ou d’un Lionel Messi, considérés aujourd’hui comme les deux plus grands joueurs de notre génération, le natif de La Louvière s’est pourtant distingué tout au long de sa carrière. Talent pur, doté d’une technique supérieure à la moyenne et fort d’un caractère bien trempé, qui en aura agacé plus d’un, l’ex-international belge (126 sélections, 33 buts) a finalement décidé de raccrocher les crampons en octobre 2023. Sans club après l’annonce de son départ du Real Madrid, l’ailier gauche, qui aura remporté le Championnat de France, d’Angleterre, d’Espagne, une Ligue des Champions et qui aura amené la Belgique en demi-finale du Mondial 2018, disait stop.
Le football comme un jeu !
«Il faut savoir s’écouter et dire stop au bon moment. Après 16 ans de carrière et plus de 700 matchs disputés, j’ai décidé de mettre un terme à ma carrière de footballeur professionnel. J’ai pu réaliser mon rêve, jouer et m’amuser sur les terrains à travers l’Europe et le monde. Il est désormais temps de profiter de mes proches et vivre de nouvelles expériences. À bientôt en dehors des terrains», assurait l’intéressé. Quatre mois plus tard, celui qui aura régalé les pelouses de Ligue 1 avec le LOSC avant de s’affirmer comme un leader à Chelsea et de connaître une fin plus douloureuse du côté du Real Madrid est revenu, en longueur, sur ce long voyage. L’occasion pour lui de détailler sa vision du football : «pour moi, le foot ç'a toujours été pareil : du plaisir, en donner et en prendre, en amical comme en demi-finales de Coupe du monde. Ç'a été mon chemin et c’est mon identité».
Peu intéressé par les statistiques - plus par les émotions qu’il pouvait véhiculer aux amoureux du ballon rond - l’homme aux 167 buts et 157 passes décisives en 623 matches professionnels n’avait finalement qu’une idée en tête : s’amuser. «Le football un métier ? Non, c’est un jeu. Et j’ai essayé de pousser ça jusqu’à la fin. Quand c’en était plus un, j’ai arrêté. Je savais que c’était mon job, je gagnais ma vie avec. Mais je voulais être loin de ça. C’est mon kif, mon jouet. Et c’est pour ça que j’ai fait cette carrière. C’est mon ressenti», confiait, à ce titre, l’ancienne pépite des Dogues. Souvent pointé du doigt pour sa personnalité nonchalante, Hazard a également profité de cet entretien accordé à France Football pour mettre les choses au clair sur son attitude hors norme. «Ça agaçait à mes débuts, ce que je peux comprendre. Il ne faut pas oublier : c’était il y a presque vingt ans, une autre génération, d’autres mentalités», rappelait cependant le Belge avant de poursuivre.
Docteur CR7 et Mister Hazard…
«Arriver avec une telle assurance, c’était mal vu, ça ne passait pas très bien. On parle beaucoup de la génération 87 en France, ç'a été un peu ça pour Benzema et les autres. Maintenant, c’est différent. J’applaudis le petit qui, à 16 ans, arrive et dit : "Eh, donnez-moi le ballon, je vais tous vous dribbler." Chapeau ! Respect. Je pouvais être vu comme un petit merdeux, je pense. J’arrivais, je ne faisais même pas mes lacets et je disais : "Vas-y, c’est bon." Après, ils ont vu. Surtout, ils ont vu que je ne parlais pas dans le vent. "Donnez-moi le ballon", OK, bam, bam, but ! Les gars font "ouah". À la fin, c’était quoi le plus important ? T’es bon, tu fais gagner, tu prends des primes, tout le monde est content. J’avais ce côté "je m’en fous", petit merdeux sur le terrain, mais, en dehors, j’étais respectueux. Je ne foutais pas la merde dans le vestiaire. Je rigolais avec tout le monde». Impressionnant sous les couleurs lilloises, Hazard rejoignait finalement Chelsea en 2012 contre un chèque de 35 millions d’euros.
À Londres, où il restera sept saisons, le frère aîné de Thorgan Hazard (RSC Anderlecht) écrira sans aucun doute les plus belles pages de son histoire, devenant l’une des principales références à son poste en Europe. Champion d’Angleterre sous les ordres de José Mourinho (2014-2015), Hazard marquera alors les esprits outre-Manche, prouvant alors son plein potentiel. Toujours aussi impressionnant lors des exercices 2016-2017 ou encore 2018-2019, l’intéressé aura également eu le mérite d’emmener les Diables Rouges jusqu’en demi-finale du Mondial 2018, finalement remporté par l’équipe de France. Une compétition où l’ailier brillera de mille feux, notamment lors des quarts de finale où la Belgique domptait (2-1) le Brésil, l’un des grands favoris à la victoire finale. «Je me sentais tellement fort, mentalement, physiquement. J’étais injouable. Pas marqué, pas de passe décisive, j’ai même raté. Mais c’est moi. Le joueur que j’ai rêvé d’être, je l’ai été sur ce match. Et j’ai fait rêver les gens, sans marquer, sans rien», assurait, à ce titre, l’ex-star des Blues.
«Aller une heure dans le bain froid ? Laissez-moi tranquille, avec mes potes, on rentre chez moi, on joue aux cartes, on boit une bière !»
Un constat lui permettant, par ailleurs, de regretter l’évolution du football et cette omniprésence des statistiques à l’heure de juger la performance d’un joueur. «Maintenant, il y a que ça qui compte. T’as des joueurs, je ne vais pas les citer, je respecte ce qu’ils font, mais ils mettent trois buts en faisant trois fois comme ça (il mime un pied tendu), et, après, on dit "ouah"… Ils jouent dans de grandes équipes, voilà. Oui, ils font gagner mais ne peuvent procurer un truc qu’à un supporter de leur équipe, à moi, rien. Je regardais le PSG pour Verratti. Peu importe son hygiène de vie, ses cartons, il ne pouvait pas changer. C’est un peu le même moule que moi. Il dribble dans sa surface, peut-être il perd le ballon et but derrière. "Ouais Verratti…" Il s’en fout, il va recommencer. Chapeau l’artiste. Tu m’as fait kiffer. Hatem (Ben Arfa). Il jouait avec ses enfants sur le terrain. Ronaldinho. Les gens disent : "Il n’a pas fait la carrière. Il aurait pu avoir dix Ballons d’Or si…" Non. C’était comme ça qu’il devait être. Il n’en a gagné qu’un (2005) mais demande aux joueurs pros de maintenant : sur mille, neuf cents vont te dire : "C’était mon idole." Riquelme, il n’allait pas vite, c’était le boss. Zidane, Robinho… Moi aussi, j’ai essayé de procurer des émotions et le plus beau, c’est juste ça. Même avec 5 kilos en trop. Je t’ai procuré des émotions ? Oui ? OK ! Non ? Dommage pour toi, t’iras voir quelqu’un d’autre», lâchait Hazard, assumant complètement ce mode de vie très éloigné de ce que peut exiger le football de très haut niveau.
«Après une rencontre, aller une heure dans le bain froid, non. Laissez-moi tranquille, avec mes potes, on rentre chez moi, on joue aux cartes, on boit une bière. Je joue deux heures avec mes fils dans le jardin. C’était ma récup. Si j’avais été comme Cristiano, c’est l’exemple, il y en a d’autres, j’aurais fait un burn-out. Quand t’es bon sur le terrain, tu fais ce que tu veux. Je pars de ce principe. Je me gérais. Je n’allais pas à la salle tous les trois jours, je ne faisais pas trois heures de kiné pour récupérer. Mais je faisais la différence. L’exigence, c’est d’être bon. Je ne vais pas dire que j’abusais. Je ne faisais pas attention. Mais je n’allais pas au McDo tous les jours. Tu ne tiens pas seize ans pro. Je n’y accordais pas d’importance. Je suis un bon vivant, j’aime manger, avec des amis, on boit un verre. Ça m’est arrivé veille de match, de manger à la maison, boire une petite bouteille, tac. Oh moi, Boxing Day, c’est Noël, raclettes, vin (il tape dans ses mains), on allait je ne sais pas où, but, but… Alors que les gens me disent de faire attention. C’est bizarre… La diététique, c’est nul, ça ne sert à rien. Enfin, c’est bien si tu veux jouer jusqu’à 40 ans. Je savais que ce ne serait pas mon cas. Un petit Ruinart blanc de blancs, il est tout le temps dans le frigo».
Une fin douloureuse au Real Madrid…
Un ton détaché et opposé aux discours actuellement prononcés sur la planète football qu’Eden Hazard a conservé précieusement. Déterminé à l’idée de ne pas trahir son identité - quitte à froisser quelques certitudes ancrées chez certains de ses coachs - le talentueux ailier a, dès lors, souvent avancé à contre courant, même à l’heure de préparer les rendez-vous les plus importants de sa carrière… «Je ne pouvais pas me concentrer deux heures avant, sinon, après, je faisais n’importe quoi. J’ai essayé de faire dans l’autre sens, concentration, préparation, échauffement : je faisais de la merde sur le terrain, mais vraiment. Alors que tennis-ballon, Mario Kart, tu rigoles, tu fais n’importe quoi dans le vestiaire, t’oublies carrément le match, son importance, et puis t’y vas ! Demi-finale de Coupe du monde contre la France, pareil. Souvent, échauffement dégueulasse, je jouais bien. Mon père en rigolait. À l’inverse, frappe lucarne, bim, bam, j’arrivais, et les trois premières minutes, tu ne me voyais pas». Clairvoyant et globalement satisfait de l’héritage laissé, Hazard est malgré tout revenu sur les dernières heures plus douloureuses de son oeuvre. Arrivée au Real Madrid en 2019 contre 115 millions d’euros, la star des Diables Rouges se savait très attendue. Malheureusement pour le Belge, les blessures à répétition ternissaient sa fin de carrière.
Avec 76 petites rencontres disputées en quatre ans, quelques polémiques sur son poids et seulement 4 buts inscrits en Liga, Hazard ne s’imposait jamais réellement dans le collectif madrilène. «J’étais triste pour les vrais supporters, déçu pour eux. Quand je suis arrivé, ils étaient plein d’espoir. J’ai un peu le sentiment de les avoir laissé tomber. J’ai envie de leur dire : "Eh, c’est pas de ma faute, mon corps m’a lâché. J’ai essayé, ça n’a pas réussi. Je suis désolé." Mon corps me fait payer toutes ces années où j’ai commencé tôt, charbonné sans quasiment jamais m’arrêter, tous les coups pris. Pas parce que j’ai mangé ci, ça. Je me le dis, je ne peux pas le prouver. Ceux qui connaissent tout vont dire "c’est parce qu’il n’a pas fait attention". J’accepte, chacun son avis. Je suis juste un peu triste que ça se termine comme ça. L’histoire parfaite aurait été hat-trick et ciao. À Lille, ça s’était bien terminé, à Chelsea encore mieux. Je savais que c’était fini et je n’avais même pas envie d’entrer. Déjà, peut-être que les gens allaient me siffler. "Ouh, ouh", pour une dernière, c’est nul. Eh, t’sais quoi, laisse-moi sur le banc, je profite», analysait celui qui profite, aujourd’hui, de sa retraite. Avant de conclure par une punchline résumant, à elle seule, son état d’esprit et l’ensemble de son oeuvre. «Je suis un petit gars de Braine-le-Comte, la campagne, j’ai kiffé le foot à ma manière et ce qui prend le dessus, c’est que j’ai donné des émotions. Ma carrière a été magnifique, c’est un super best-seller.»
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