Temps Additionn’Elles : les confidences de Gaëtane Thiney, footballeuse tout terrain

Demain, l'Équipe de France Féminine affronte l'Allemagne en match amical. La sélection de Philippe Bergeroo pourra compter sur Gaëtane Thiney. La Bleue aux 112 capes est le fer de lance de l'attaque tricolore. En plus de mener de front une carrière de footballeuse, cette jeune femme de 28 ans arrive à jongler à la perfection entre son métier de professeur de sport et sa mission de conseillère technique nationale à la FFF. Une femme active qui a accepté de se confier pour Foot Mercato. Entretien.

Par La Rédaction FM
8 min.
Gaëtane Thiney se livre pour Foot Mercato @Maxppp

Foot Mercato : Comment est née votre passion pour le football ?

Gaëtane Thiney : J'ai un univers familial favorable. J'ai commencé super jeune dans la ville où je suis née à Brienne-le-Château dans l'Aube. J'avais 5 ans et depuis je n'ai jamais arrêté.

FM : Samedi, l'Équipe de France Féminine affronte l'Allemagne en amical. Comment abordez-vous ce match ? Qui craignez-vous côté allemand ?

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GT : Disons que dans l'équipe d'Allemagne, il faut juste craindre l'équipe d'Allemagne. Avant de sortir le nom d'une joueuse, je pense qu'avant tout elles ont un collectif qui est puissant. Ensuite, comment on fait ? On se prépare avant d'arriver. Je pense qu'on va s'entraîner sérieusement, retrouver nos automatismes pour pouvoir affronter cette équipe samedi dans les meilleures conditions.

FM : Un match qui permet de préparer la Coupe du Monde 2015 à laquelle les Bleues participeront. J'imagine que c'est un rêve pour vous...

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GT : Oui, évidemment. On a le souvenir de la Coupe du Monde 2011, où on a vécu des moments d'émotion très intenses. Donc on espère revivre les mêmes au mois de juin et ce serait encore mieux si on arrive à décrocher le titre.

FM : Quels seront les objectifs lors de cette compétition ?

GT : Comme toutes les compétitions, on a envie d'aller au bout. Maintenant, on sait que plusieurs équipes veulent le faire également. Je pense qu'il faut prendre les objectifs les uns après les autres. On va à la Coupe du Monde pour donner le meilleur de nous-mêmes, jouer le mieux possible et essayer d'atteindre effectivement le titre. Mais il y aura plein d'étapes. Ensuite, il y a la qualification pour les Jeux Olympiques qui se jouera là-bas. Donc plein d'objectifs qui seront vus avec le staff en temps voulu. Certainement à partir du mois de mai comme nous serons en préparation.

FM : D'un point de vue individuel, vous avez terminé co-meilleure buteuse de la Zone Euro avec 16 réalisations durant les éliminatoires. Vous serez forcément attendue ...

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GT : Je ne sais pas s'ils feront forcément attention à ça. Ça fait des années que je suis en Équipe de France. Donc attendue, je ne sais pas. Ce dont j'ai envie, c'est que l'Équipe de France soit attendue, qu'on produise un jeu de qualité et qu'on embête les plus grosses équipes.

FM : Durant ce Mondial au Canada, vous allez évoluer sur des terrains synthétiques. Ce qui a créé une polémique. Certaines joueuses ont saisi la justice car cela constituerait une affaire de discrimination sexuelle. Quel regard portez-vous là-dessus ?

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GT : Personnellement, je pense qu'il faut se concentrer sur notre préparation. Pour le reste, on verra puisqu'il y a quand même des institutions qui sont là pour organiser les choses. Il faut aussi respecter leur travail. Maintenant, je ne suis pas forcément habituée à jouer sur synthétique. Je pense qu'on n'a pas le choix. Quand on accepte de participer à une compétition, on accepte les avantages et les inconvénients.

FM : Jeudi prochain, la France va déposer son dossier de candidature pour l'organisation de la Coupe du Monde 2019. Qu'en pensez-vous ?

G.T. : Je suis évidemment très positive concernant cette candidature. Je serai présente à la Fédération pour la conférence de presse jeudi prochain afin de soutenir la candidature de la France. Ce serait évidemment une grande compétition féminine sur le sol français. Ce serait plus que bien pour la FFF. Ce serait une certaine reconnaissance pour le travail accompli par la Fédération depuis des années et également pour toutes les personnes qui œuvrent pour le foot féminin. Médiatiquement, il est certain que ce serait une grande fenêtre pour le foot féminin en France. J'espère que la France obtiendra l'organisation de cette Coupe du Monde 2019.

Juvisy, le choix du cœur

FM : Vous êtes également très sollicitée avec votre club Juvisy. Comment se passe votre saison ? Quels sont les objectifs ?

GT : La saison se passe bien. On est troisième aujourd'hui (à 6 points de l'OL et du PSG). Je suis un petit peu déçue juste par rapport au match face au PSG (défaite 2-0, Ndlr). Je pense qu'on a fait une très belle partie. On n'a pas été récompensé au niveau du résultat final. Un match nul n'aurait pas été volé. Mais c'est aussi le football. Je suis très contente du club, puisqu'il a énormément évolué. On a eu une phase de préparation qui était très intense mais importante. Je pense qu'on est réellement dans une progression très positive. Après, on n'est pas première du championnat car les autres, Lyon, le PSG, progressent aussi. Il faut s'accrocher et je pense qu'être troisième dans ces circonstances c'est aussi une belle performance.

FM : Vous parliez justement de l'OL et du PSG, deux écuries qui recrutent les meilleures joueuses en France et à l'étranger. Avez-vous été sollicitée par l'un de ces clubs ?

GT : Oui, les années précédentes. Aujourd'hui, j'ai 28 ans et je viens de signer avec Juvisy pour deux années de plus. Donc je ne me pose plus ces questions-là. J'ai des objectifs de carrière qui me sont propres et je veux déjà remplir mon engagement sur les deux années qui arrivent. Ensuite, je déciderai de mon avenir.

FM : Vous avez aussi prouvé que vous n'aviez pas besoin d'être à l'OL ou au PSG pour être élue meilleure joueuse de D1 Féminine. Ce fut le cas encore la saison dernière. Quel est votre sentiment là-dessus ?

GT : C'était une belle récompense. J'étais très heureuse avant tout pour Juvisy. Pour moi, c'est un peu compliqué de recevoir une récompense individuelle dans un sport collectif. J'étais fière pour ma famille, mes amis, auxquels j'accorde peu de temps, puisque je suis souvent en déplacement, en stages, etc... C'est une petite récompense pour eux et mon club, qui me permet de m'entraîner dans les meilleures conditions au quotidien.

Une footballeuse engagée

FM : On a pu voir il y a quelques années des joueuses françaises comme Sonia Bompastor ou Camille Abily aller tenter leur chance aux États-Unis. Est-ce qu'évoluer à l'étranger vous tente ?

G.T. : Oui, ça pourrait être une option afin de découvrir une autre culture, une autre langue, un autre championnat et d'autres méthodes d'entraînement, puisque j'ai aussi mes diplômes d'entraîneur. J'ai envie de voir ce qui se fait ailleurs, en tant que joueuse et puis c'est aussi formateur en tant que peut-être future entraîneur. Peut-être que je ne le serai jamais, mais je suis quelqu'un qui aime découvrir un petit peu tout. Aller à l'étranger, ce serait une belle expérience. Je dis ça mais je vis beaucoup au jour le jour. Dans deux ans, je dirai peut-être l'inverse.

FM : Vous évoquiez votre après-carrière. À quelle reconversion pensez-vous ?

G.T. : J'ai déjà un double projet actif puisque je suis professeur de sport et conseillère technique nationale à la FFF. Ce poste me va très bien. La Direction Technique Nationale me fait confiance sur des missions de développement. Je suis très épanouie d'avoir cette bulle professionnelle qui me permet de m'ouvrir à autre chose et d'utiliser des compétences autres que celles sportives. (...) Je suis chargée du développement des pratiques du football chez les jeunes des U6 aux U13. Sur ces catégories d'âges, j'ai comme mission de développer cette pratique en développant un outil pour modéliser les saisons chez les petits.

FM : En 2009, vous aviez posé dénudée dans une campagne visant à promouvoir le foot féminin. Avec le recul, qu'en pensez-vous ? Cela a-t-il porté ses fruits ?

G.T. : Je préfère qu'on parle du football féminin à travers les résultats. Aujourd'hui, si c'était à refaire je laisserais les jeunes le faire. Mais je ne regrette pas de l'avoir fait. Dans le contexte qui était celui du foot féminin à l'époque, ça avait fait un buzz et ça ne m'avait pas forcément dérangée. Si c'était à refaire cette année, je ne pense pas que je le ferais.

FM: Le 28 octobre vous fêterez vos 29 ans. En tant que femme, pensez-vous à la maternité ? Votre carrière influence-t-elle éventuellement votre décision concernant ce sujet ?

G.T. : C'est sûr que ce n'est pas forcément simple dans le sport féminin. En règle générale, avoir un enfant c'est aussi arrêter en partie sa carrière et ne pas être sûre de la reprendre. Ce sont des questions de femmes qu'on se pose qu'on soit sportive ou engagée professionnellement dans des postes à hautes responsabilités. Dans la vie, on se fixe des objectifs. Quand on est sportive de haut niveau, on a des objectifs de haut niveau. Parfois, il faut faire certains sacrifices. Voilà, mon choix aujourd'hui il est de faire du sport à fond et de profiter de ma bonne santé pour continuer à vivre ma passion et des émotions intenses sur le terrain. Il me reste encore quelques années. Je réfléchirai après. Mais pour le moment, c'est le sport avant tout.

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