Allemagne - France : le pari défensif raté des Bleus !
Au Signal Iduna Park de Dortmund, les Bleus ont mis fin à leur excellente dynamique face à une Allemagne, pourtant en crise (1-2). Infranchissable depuis le début de l’année 2023, la défense tricolore - certes remaniée - a vécu une soirée pour le moins compliquée. Explications.
Sous le ciel pluvieux de Dortmund, l’heure était au changement ce mardi soir. Tout d’abord dans l’organigramme de la sélection allemande, quadruple championne du monde mais frappée par une crise profonde. Architecte de ces fondations instables, Hansi Flick s’en est ainsi allé, emportant avec lui ses doux rêves de disputer l’Euro 2024 à la tête de l’Allemagne, pays organisateur de la compétition (14 juin au 14 juillet prochain). Propulsé à la tête de la Mannschaft, Rudi Völler - nommé sélectionneur intérimaire en attendant la possible arrivée de Julian Nagelsmann - avait alors la lourde tâche de jouer les pompiers de service face aux Bleus, finalistes du dernier Mondial au Qatar et plus que jamais en passe de rallier le pays natal de John McEnroe l’été prochain. Des changements également perceptibles au sein des compositions de départ. Pour Didier Deschamps, privé de Kylian Mbappé touché au genou, exit le 4-2-3-1 mis en place jeudi dernier contre l’Irlande.
Todibo, Saliba, Pavard… les perdants du soir !
Place à un 4-4-2 où Benjamin Pavard et Théo Hernandez débutaient sur les ailes alors que William Saliba, préféré à Dayot Upamecano, était titularisé aux côtés de Jean-Clair Todibo, auteur de sa grande première avec les A. Au milieu de terrain, le duo 100% madrilène Eduardo Camavinga-Aurélien Tchouameni accompagnait, de son côté, Kingsley Coman et Adrien Rabiot, excentré à gauche. Devant, Randal Kolo Muani et Antoine Griezmann, capitaine du soir, commençaient. De retour sur le banc allemand en tant que numéro 1, après une première expérience entre 2000 et 2004 (29 victoires, 11 nuls et 13 défaites en 53 matches), Rudi Völler optait lui pour un 4-2-3-1. Présents lors de la dernière débâcle face au Japon (1-4), Nico Schlotterbeck, Joshua Kimmich et Kai Havertz sortaient du onze. Devant Marc André ter Stegen, Niklas Süle, Jonathan Tah, Antonio Rüdiger et Benjamin Henrichs formaient la défense allemande. Dans l’entrejeu et juste derrière Leroy Sané, Florian Wirtz et Serge Gnabry, Emre Can était quant à lui associé au capitaine Ilkay Gündogan. Seul sur le front de l’attaque, Thomas Müller frappait d’entrée.
Pris dans son dos sur une jolie combinaison entre Gnabry et Henrichs, Pavard laissait filer le latéral gauche du RB Leipzig. Ce dernier centrait en retrait où Müller, esseulé au cœur de la défense française, fusillait Maignan pour ouvrir le score (1-0, 4e). Une action symbolisant malheureusement, à elle seule, les difficultés rencontrées par l’arrière-garde tricolore face aux Allemands. Des défaillances confirmées dans les derniers instants de ce choc suite à nouvelle bévue. Fautif sur sa relance, Todibo voyait alors Havertz lancer Sané en profondeur. Bien plus vif que Saliba et Tchouameni, l’attaquant du Bayern doublait la mise (2-0, 87e) et sécurisait ainsi la victoire des siens malgré la réduction du score trop tardive de Griezmann (2-1, 89e). Une fragilité défensive inhabituelle pour une équipe qui n’avait toujours pas encaissé le moindre but en 2023 mais une déroute justifiable à bien des égards. Sur le plan individuel tout d’abord avec de nombreuses prestations plus qu’insuffisantes, à l’instar de Benjamin Pavard, William Saliba ou encore Jean-Clair Todibo…
De retour dans le onze titulaire des Bleus, le nouveau joueur de l’Inter Milan - qui n’avait plus rejoué depuis le 12 août dernier - a logiquement payé son manque de rythme en match officiel. Très souvent pris à revers par la vitesse de Gnabry et les montées incessantes d’Henrichs, élu homme du match par la rédaction FM, le numéro 2 tricolore n’a pas marqué de points dans son match à distance avec Jules Kounde, entré en jeu peu après l’heure de jeu. Coupable d’un certain laxisme sur le premier but allemand et auteur de 9 pertes de balle, le natif de Maubeuge n’a, par ailleurs, que très peu apporté sur le plan offensif. Un constat également applicable à William Saliba, peu rassurant avec le ballon, souvent pris de vitesse et trop laxiste sur de nombreuses séquences. Pourtant réputé pour sa solidité avec les Gunners, le Bondynois de 22 ans, crédité d’un 3 par notre rédaction, a finalement affiché un visage bien triste en terres allemandes. Et que dire de la grande première de Todibo… Plongé dans le grand bain, le défenseur de l’OGC Nice s’est, à plusieurs reprises, noyé. Pas exempt de tout reproche sur le premier but, il offrait finalement le second but sur une nouvelle erreur de relance.
Griezmann et Rabiot, principales victimes d’un 4-4-2 décevant !
«C’est une première frustrante au regard du résultat, on aurait préféré rester sur la dynamique qui était la notre depuis un moment. Personnellement pour moi, c’est un bonheur d’être sur le terrain, malheureusement sur le deuxième but c’est moi qui perd le ballon mais d’un point de vue personnel, je le vois bien, je dois encore bosser, je n’ai pas le droit de rater cette passe, c’est bien pour moi, ça me permet d’apprendre. Le coach m’a félicité pour ma première. Sur le but, il m’a dit d’assurer ma passe, qu’à ce niveau là, je n’avais pas le droit de la rater.», regrettait d’ailleurs l’intéressé présent en zone mixte. Plus que des performances individuelles trop éloignées du niveau international, cette défaite s’explique, également, par le manque d’automatismes d’une défense peu expérimentée (11 sélections au total pour la charnière centrale) et finalement pas habituée à jouer ensemble. Symbole de cet apprentissage - encore en cours - l’absence de connexion entre Todibo et Pavard où les deux hommes ont souvent tergiversé dans leur communication, faisant preuve, par ailleurs, de quelques lacunes dans leurs compensations respectives.
«Ca arrive parfois. Nous sur la pointe des pieds, et eux agressifs. On était en retard. On était présent mais pas assez actif. Il y a eu des décalages et on est pas assez près. Avec la qualité de ces joueurs, ça a fait mouche pour eux. Ce n’est pas ce que j’attendais. Je ne vais pas enfoncer le clou, il y a des circonstances atténuantes. On n’était plus habitués à perdre. Mais la remise en question… le haut niveau est impitoyable. L’Allemagne n’a pas eu énormément d’occasions. On n’a pas fait en début de match ce que demande le très haut niveau», déclarait, à ce titre, Didier Deschamps au micro de TF1 avant d’en remettre une couche en conférence de presse : «si on a perdu, c’est qu’on n’a pas bien fait les choses face à une Allemagne très agressive. Le début de match était catastrophique en matière d’agressivité et d’intentions, et ça leur a permis d’ouvrir le score. C’est un onze qui n’a pas l’habitude de débuter, il y avait de l’adversité mais ils ont besoin de temps de jeu pour qu’on les voie, ça demandera répétition aussi. Dans les changements, certains étaient contraints et forcés à cause de l’entraînement d’hier (lundi), en ce qui concerne Dayot Upamecano et Kylian Mbappé. À partir du moment où Kylian ne peut pas débuter, à cause d’un problème au tendon rotulien, ce n’est pas le faire entrer qui va améliorer sa situation. C’est pareil pour Upamecano, il n’y avait pas de risque à prendre».
Contraint de changer ses plans, Didier Deschamps a ainsi opté pour un 4-4-2. Un système tactique qui aura, certes, permis aux Bleus de graver une deuxième étoile sur leur maillot, mais qui s’est, une nouvelle fois, montré défaillant. Une organisation jouant, par ailleurs, des tours à certains cadres tricolores, à l’instar d’Adrien Rabiot, excentré à gauche et bien moins impactant, ou encore Antoine Griezmann, associé à Randal Kolo Muani à la pointe de l’attaque et coupable d’un déchet technique inhabituel malgré son but tardif sur penalty. Interrogé sur le dispositif décidé par son sélectionneur, Kingsley Coman ne souhaitait, pourtant, pas tirer de conclusions hâtives… «Ça dépend, c’est un match seulement, on ne peut pas juger sur un match. Avec le 4-4-2, l’équipe a été championne du monde (rires), on a gagné beaucoup de matches donc il ne faut pas tout jeter après un mauvais match». Une chose est sûre, avec ce système peu efficient, une équipe remaniée et une défense aussi jeune que friable, le pari tenté par Didier Deschamps pour pallier les absences de Kylian Mbappé ou encore Dayot Upamecano n’aura pas fonctionné. Opposée aux Pays-Bas le 13 octobre prochain, l’équipe de France pourrait alors revenir à un schéma et des fondamentaux jusqu’alors si séduisants…
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