Ligue 1 : comment Didier Digard a déjà convaincu l’OGC Nice
Devenu entraîneur intérimaire après le départ de Lucien Favre, Didier Digard (36 ans) réussit de très bons débuts, autant qu’il étonne par son style décontracté, plus proche de celui des joueurs que des techniciens des bancs de touche. Derrière cette fraîcheur se cachent de vrais changements sur et en dehors du terrain qui permettent pour le moment à l’OGC Nice de se relancer en cette seconde partie de saison de Ligue 1.
Didier Digard n’est pas du genre à prendre son temps. Papa pour la première fois à 16 ans, titulaire et capitaine du Havre à 18 ans, au PSG trois ans plus tard, le voilà déjà entraîneur de l’équipe première à l’OGC Nice à 36 ans. L’ancien milieu de terrain ne perd pas de temps à brûler les étapes. Nommé à la tête du Gym le 9 janvier dernier, deux jours après une humiliante élimination en 32e de finale de Coupe de France contre Le Puy (15e de National 1), il est parvenu en un mois à redresser la situation sportive de son équipe, au point qu’elle peut de nouveau croire en une qualification européenne en fin de saison.
C’était encore inespéré au soir du départ de Lucien Favre. Depuis, Nice a enchaîné 4 victoires et un nul en Ligue 1, et pointe désormais à la 8e place, à seulement 6 points de Rennes, dernier virtuel détenteur d’un ticket européen. Le club sort même d’une semaine de rêve, alignant trois succès de suite face à des concurrents de la première partie de tableau : Lille à domicile (1-0) et surtout deux victoires à l’extérieur à Lens (1-0), qui jusque-là avait remporté tous ses matchs chez lui depuis le début de la saison, et à Marseille (3-1). Digard et son staff (Frédéric Gioria et Julien Sablé) espéraient prendre 4 points, ils en ont obtenu 9…
Sweat à capuche et gros coups de gueule
En un mois seulement, "l’intérimaire-débutant" a transfiguré les Aiglons. «C’est grâce au coach, je le dis clairement. Avec son staff, ils font un très bon travail, ils nous donnent vraiment de la confiance. Il a été joueur, connaît le haut niveau. Il nous pousse au-delà de nos limites sur chaque entraînement. Tout le monde se sent concerné, on voit un groupe uni. C’est ce qu’il nous manquait», rapportait Jordan Lotomba après la victoire au Vélodrome. Le technicien insuffle une nouvelle énergie auprès d’un groupe dont il était déjà proche en tant qu’adjoint de Lucien Favre. Mais à la différence de son prédécesseur, sa méthode dénote complètement.
Là où le Suisse de 65 ans était distant et vouvoyait tout le monde, Digard adapte un style très différent. Entraîneur adjoint des U17 il y a quelques années, puis entraîneur principal de la réserve, il a l’avantage de connaître la plupart des jeunes qu’il a lui-même promus ces dernières semaines comme Badredine Bouanani (18 ans) et Antoine Mendy (18 ans). Habillé d’un sweat à capuche et d’un survêtement large dans lequel il plonge ses mains dans les poches les 3/4 du temps, le Normand la joue tout en décontraction, plus en adéquation avec les codes vestimentaires et sociaux de la nouvelle génération.
Plus d’intensité exigée aux entrainements
Gare aux apparences trompeuses, car ça ne masque pas son charisme, ni son exigence et encore moins sa capacité à prendre le leadership, lui l’ancien capitaine niçois. Melvin Bard en a par exemple fait les frais à la mi-temps de Nice-Lille. «J’ai pris une bonne soufflante. Il m’a dit qu’il fallait que je montre un autre visage, que je réagisse vite et que je sois au niveau. Il m’a bien fait comprendre que j’en étais capable. Il ne m’a pas du tout vexé, j’étais moi-même conscient que je n’avais pas fait une bonne première période. (…) Le coach emploie des bons mots, qui touchent, qui ont un impact. Après ça, on sait qu’on n’a pas le droit de décevoir.»
Des joueurs derrière lui et des résultats positifs grâce à un entraînement basé sur l’intensité. Quand Favre s’évertuait à des mises en place tactique basées sur la possession du ballon, Digard exige un jeu plus énergivore. Il demande à son équipe d’évoluer plus haut et d’intensifier le pressing. Surtout, il met fin aux temps morts durant ses séances, perfectionnant du même coup le physique de ses joueurs. À l’image d’un Aaron Ramsey bien plus performant lors de la première partie de saison, les Aiglons finissent leurs matchs avec plus de fraîcheur par rapport à leurs adversaires.
Un intérim durable ?
«Il y a beaucoup plus d’intensité, beaucoup plus de rythme, beaucoup plus de dynamisme. Et on voit que cela nous fait du bien. Tandis qu’avant on était plus sur la tactique, plus sur l’idée du jeu. Et je pense qu’ils ont très bien fait de rehausser notre intensité, notre agressivité et notre discipline sur les entraînements pour justement pouvoir mettre ces idées en place», confirme un Dante sur RMC mardi soir, de trois ans l’aîné de son entraîneur. Boudaoui est retrouvé, la recrue Ndayishimiye s’est tout de suite mise au diapason, Laborde fait parler sa polyvalence sans perdre ses qualités de finisseurs (3 buts sur les 3 derniers matchs).
La fin de saison du Gym a de quoi être particulièrement emballante. Même Florent Ghisolfi, le nouveau directeur sportif, peut souffler, lui qui a vécu des premiers mois agités entre le mercato, des résultats décevants et un Lucien Favre assez mutique dans sa communication. Alors qu’INEOS a des moyens ambitieux pour propulser l’OGC Nice vers les sommets, c’est «jusqu’à nouvel ordre» le novice et détonnant Didier Digard qui est en train de lui sauver la mise, lui qui n’a même pas le BEPF. D’ailleurs, à partir de ce week-end contre Ajaccio, le club paiera une amende de 25 000 euros pour cette absence de diplôme. Pour combien de temps encore ? Pour le moment, ses résultats et la vie de groupe parlent pour lui. De quoi poursuivre son intérim encore quelques semaines, et pourquoi pas plus…
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