L’UNFP FC, le stage de l’espoir pour les joueurs sans contrat !

Organisé chaque année depuis 1990, le traditionnel stage de l’union syndicat des footballeurs professionnels (UNFP) s’est, une nouvelle fois, déroulé au complexe Leonard de Vinci de Lisses (91). Du 26 juin au 5 août dernier, une quarantaine de footballeurs professionnels sans contrat ont ainsi foulé les pelouses d’une structure en plein essor. Blessés, en échec, à court de forme ou tout simplement en crise de confiance, les profils sont multiples mais l’ambition reste la même : retrouver au plus vite un club. Retour sur une aventure humaine de six semaines où chaque membre de l’organisation est animé par l’esprit de dévotion.

Par Antoine Grasland - Josué Cassé
12 min.
L'UNFP FC, le stage estival des joueurs sans contrat @Maxppp

«L’existence n’est qu’une question de seconde chance et tant que nous serons en vie, jusqu’à la fin, il restera une autre chance». Élevée à Accrington dans le Lancashire, au nord de l’Angleterre, Jeanette Winterson a, sans doute, résumé la philosophie véhiculée à l’espace Leonard de Vinci de Lisses (Essonne). Déterminée à l’idée d’offrir une seconde chance, l’Union Syndicat des Footballeurs Professionnels (UNFP) propose ainsi, depuis 1990, un stage estival aux footballeurs professionnels sans contrat. L’occasion pour ces derniers de se maintenir en forme et d’être prêts si une formation les contacte. Loin du feuilleton Kylian Mbappé et dans un contexte de plus en plus concurrentiel, une quarantaine de footballeurs au chômage, réunis du 26 juin au 5 août dernier, postulaient ainsi à un avenir plus radieux.

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L’UNFP FC, un club pas comme les autres…

Sortis du centre de formation, débarqués d’une première expérience douloureuse, anciens joueurs de Ligue 1 ou forts d’une expérience sur la scène européenne, tous les profils se retrouvent ainsi dans le sud de la région parisienne avec l’objectif de retrouver un défi à la hauteur de leurs attentes. Du jeune Mattéo Rabuel, libre de tout contrat depuis son départ de Valenciennes à l’expérimenté Mathieu Dossevi, prêt à s’offrir un dernier challenge après une expérience à Versailles, en passant par Wesley Jobello, formé à l’OM, Ibrahim Karamoko, Yacouba Sylla ou encore Saliou Ciss, vainqueur de la dernière CAN avec le Sénégal, l’objectif est commun : trouver un contrat pour la saison à venir. Ancien footballeur professionnel évoluant sous les couleurs du Stade de Reims ou encore des Chamois Niortais, Pascal Bollini - responsable de ce stage entièrement pris en charge par l’UNFP - nous confiait d’ailleurs, fin juillet dernier, les coulisses de cette aventure humaine.

«On est un club avec un cadre, des terrains de qualité, un encadrement compétent, des coachs, des adjoints, un préparateur physique, un préparateur mental, on a aussi un staff médical avec kiné, ostéopathe, masseur. Aujourd’hui, on s’est aussi développé au niveau des réseaux sociaux par l’intermédiaire de Philippe Rossi et Barkley (Miguel Panzo, ndlr). Ils nous aident beaucoup pour la visibilité de l’UNFP. Moi, je m’occupe de toute la partie logistique. Cela représente beaucoup de monde mais c’est ce qu’il faut aujourd’hui pour être cohérent et pour que les joueurs se rendent compte qu’on n’est pas en vacances, on est là pour travailler sérieusement et cela donne toute la crédibilité à ce club UNFP FC». Au milieu d’un cadre proche de l’idylle, ces profils multiples enchaînent alors séances d’entraînement intensives et matches amicaux de prestige.

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Deux staffs appelés pour l’édition 2023 !

À noter, par ailleurs, que des suivis de performance sont également réalisés chaque jour et peuvent être envoyés aux clubs qui souhaitent prendre à l’essai les membres de l’effectif. En dehors des terrains, l’UNFP FC agit également avec différentes interventions émaillant ces semaines chargées. «On a évidemment l’aspect pôle emploi, on leur explique leurs droits et leurs devoirs, une personne de pôle emploi vient leur expliquer la démarche, on a aussi le service juridique qui vient expliquer les différents contrats qui existent et on a aussi une petite réunion sur l’aspect formation. On a aussi fait notre stage de cohésion avec l’armée pour trouver rapidement cette alchimie car les joueurs viennent de partout. Les garçons adhèrent et on retrouve cette solidarité sur le terrain». Particularité de cette édition 2023, la mise en place de deux staffs.

«On a eu un premier staff avec Jérôme Arpinon, entraîneur principal, Anthar Yahia, entraîneur adjoint, et Jean-Marc Branger, entraîneur des gardiens. On a mis en place un deuxième staff à partir du 17 juillet avec Corentin Martins en tant qu’entraîneur principal, Jean Jacques Pierre comme adjoint et qui connaissait déjà le stage car il y avait participé en tant que joueur et adjoint par le passé. Enfin, on a pris Sébastien Monce pour le rôle d’entraîneur des gardiens», résumait, à ce titre, Pascal Bollini. Autant de compétences mises à disposition des participants, prêts à tout pour retrouver un challenge et conscients de la chance offerte. Au-delà du football et de la préparation, avec ce stage à l’UNFP FC, j’ai débuté une véritable aventure humaine, j’ai rencontré des gens formidables que ce soit les joueurs ou le staff. On ne se connaît pas forcément, même si j’en avais croisé quelques uns sur les terrains. Ici, on a tout, les infrastructures sont incroyables, on a un staff plus élargi qu’en club professionnel. C’est même mieux que dans certains clubs professionnels, nous confiait Mattéo Rabuel, jeune défenseur central de 23 ans.

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Des profils multiples, une ambition commune !

Au sortir de deux expériences non concluantes au FC Botosani (Roumanie) puis au RE Virton (Belgique), Yacouba Sylla reconnaissait, lui aussi, les bienfaits de cette aventure. «Je m’étais déjà entraîné seul et c’est très dur, je n’avais pas la force de le refaire, ce qui explique aussi ma volonté de venir ici. C’est une belle opportunité pour se préparer. Seul, c’est très compliqué mentalement de préparer les séances et d’aller au bout de soi-même. L’apport de l’UNFP, c’est exceptionnel, c’est convivial, c’est familial. Humainement, c’est une aventure à vivre. Sur l’aspect sportif, ça me permet aussi d’être prêt physiquement pour rebondir. On nous propose un cadre de qualité, on a tout à disposition». Même son de cloche pour l’ancien défenseur de l’AC Nancy-Lorraine, Saliou Ciss, avouant se sentir «comme dans un club professionnel».

Déjà présents la saison dernière, certains joueurs n’hésitent d’ailleurs pas à retenter l’expérience. C’est le cas de Wesley Jobello, revenu d’un passage en Roumanie ou encore Matthieu Dossevi, libre de tout contrat depuis son départ de Versailles. «Honnêtement, le stage UNFP la saison passée m’a donné la chance d’être prêt. J’ai joué directement, je n’avais pas de temps à rattraper car j’étais bien physiquement, j’ai eu des statistiques rapidement et malheureusement c’est le changement de coach qui a entraîné une fin d’expérience prématurée. C’est mieux de faire ce stage, en étant à la maison on se retrouve seul, c’est plus dur de se préparer, même avec l’aide d’un préparateur physique. Le téléphone sonne moins aussi, les clubs ne voient pas que tu t’entraînes. L’UNFP apporte cette visibilité et mentalement c’est plus simple», justifiait, notamment, l’ancien ailier de l’OM. De son côté, l’ancien attaquant du Toulouse FC pointait, quant à lui, les difficultés du contexte actuel.

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Un environnement de plus en plus concurrentiel pour les jeunes…

«Ici à l’UNFP, on a de très jeunes joueurs qui sont présents et c’est aussi expliqué par cette pression des clubs. Il faut faire les sacrifices dès le début pour garder sa place. Aujourd’hui, il n’y a plus le temps. La pression économique enlève le temps et la marge d’erreur est plus faible. Pour les jeunes, il doit y avoir une prise de conscience sur cet aspect et ne jamais prendre les choses pour acquis. Il faut batailler individuellement même si le football est un sport collectif. Mon rôle au sein de ce stage est mélangé. Je viens avec humilité ici. Avec mon expérience, c’est vrai que les coachs s’appuient forcément plus sur moi, pour faire le lien et partager avec les autres joueurs. J’essaie d’être à l’écoute, de beaucoup parler, de transmettre, de donner des conseils aux jeunes. Tout ce qu’on dit ici sert pour l’après-stage, une fois qu’on se retrouve à nouveau livré à nous-même. Tout ce que les jeunes peuvent prendre ici, il faut le faire pour éviter de revenir l’année d’après».

Prisé, ce stage UNFP représente, quoi qu’il en soit, une opportunité indéniable pour tous ces joueurs, plus ou moins populaires aux yeux du plus grand public. Dans cet antre de la renaissance, chacun court alors vers un horizon plus dégagé. L’occasion, également, de gommer certains défauts accumulés selon Jean-Jacques Pierre, ancien joueur du SM Caen passé par ce stage à deux reprises (en tant que joueur puis en tant qu’adjoint) : «l’UNFP permet aussi de mettre l’accent sur les choses oubliées au cours de la saison ou pas faites du tout. On peut faire un point et comprendre pourquoi le joueur se retrouve ici. Ici, je reste sur l’aspect football, je suis proche des joueurs et je regarde ce qui peut leur manquer. Ceux qui sont en retard, ceux qui ont des sautes de concentration. Je ne demande pas aux joueurs de faire des trucs sensationnels, je veux juste une implication de tous les instants, qu’ils donnent le maximum d’eux-mêmes. Ils doivent montrer qu’ils sont au-dessus pour rebondir».

Pour rebondir, ces footballeurs à la recherche d’un nouveau défi ont d’ailleurs disputé, avec des fortunes diverses, 8 matches amicaux tout au long de l’été. Du FC Annecy (0-5, 7 juillet) à Châteauroux (1-1, 4 août) en passant par l’AS Saint-Etienne (2-5, 12 juillet), Valenciennes (1-2, 15 juillet), le Paris FC (0-1, 19 juillet), Grenoble (0-4, 22 juillet), Bastia (1-0, 25 juillet) ou encore Orléans (1-1, 29 juillet), chacun a ainsi pu mettre ses qualités en exergue. Si les résultats ne leur ont pas forcément permis de se mettre en valeur (5 défaites, 2 nuls, 1 victoire, 19 buts encaissés, 6 buts marqués), les pensionnaires de Lisses conservaient la même détermination. À l’instar d’Ibrahim Karamoko, prometteur défenseur central de 22 ans passé par le Torino ou encore Guingamp.

L’UNFP FC, un management à part entière !

«Depuis petit, j’aime gagner et là encore plus car on est sans club et on veut montrer qu’on a le niveau, qu’on peut jouer à leur place et le fait de perdre ça peut baisser le moral. C’est pour ça qu’ici, pour moi, c’est vraiment important de gagner. Que ce soit à l’entraînement ou en match, je vois tous ces matches comme une finale. Tous les matches qu’on fait ce sont des finales». Successeur de Jérôme Arpinon et chef d’orchestre de ce collectif soudé et animé par la même ambition, Corentin Martins, ancien sélectionneur de la Mauritanie, nous confiait, malgré tout, les difficultés de coacher un tel groupe. «C’est une aventure particulière car on entraîne pas un club, on entraîne des joueurs qui sont dans des situations difficiles avec un téléphone qui ne sonne pas. C’est une autre forme de management mais on essaie de leur apporter du plaisir, de les encadrer et puis certaines idées aussi pour qu’ils puissent s’améliorer au fil des jours».

Et d’ajouter : «je suis arrivé au cours de la quatrième semaine, les joueurs avaient connu un autre staff pendant 3 semaines donc je n’ai pas voulu tout chambouler pour garder une certaine continuité, j’ai au fur et à mesure apporté quelques idées et principes. Je veux aussi donner du temps de jeu à tout le monde mais chacun doit montrer qu’il le mérite. Je ne veux pas qu’ils lâchent. La manière de manager est différente, on est plus dans l’accompagnement, moins dans l’exigence même si on est pas chez Jacques Martin, on ne donne pas des 10 à tout le monde mais il faut essayer de donner du jeu pour que chacun soit vu. L’UNFP FC, c’est tellement bien que ça peut aussi endormir un peu les joueurs. Ils sont logés, il y a des conditions optimales, un staff top, tout comme dans un club mais c’est là le danger. Ce n’est pas un club, ils ont 6 semaines où il faut travailler et qu’ils profitent de la compétence qu’il y a autour pour se montrer auprès des clubs et repartir au plus vite».

Des clubs fragilisés et plus frileux…

Fort de 28 joueurs à la fin du mois de juin dernier, ce groupe de professionnels sans contrat a d’ailleurs évolué au gré du mercato estival. Initialement présent au stage, Mehdi Jeannin défend désormais les couleurs de Pau. Toujours en Ligue 2, Jean Louchet s’est engagé avec Valenciennes alors qu’Ayman Ben Mohamed a, lui, décidé de faire confiance au projet guingampais. En National, Lenny Montfort a signé en faveur de Dijon. Thibault Tamas (Saint-Brieuc), Victor Glaentzlin (Andrézieux) et Babacar Leye (Chateaubriand) ont, quant à eux répondu favorablement à la N2. À noter, enfin, plusieurs départs à l’étranger avec Jérémie Vachoux, aujourd’hui, à Lausanne Ouchy (D1 Suisse), Benjamin Besic à FC Schifflange 95 (D1 Luxembourg), Hassimi Fadiga au Levski Sofia (D1 Bulgarie) ou encore Lucas Margueron, récemment recruté par le RFC Seraing (D1 Belgique). Au total et parmi les 36 joueurs passés par Lisses cet été, 11 ont ainsi retrouvé un club. Un chiffre contrastant, malheureusement, avec le taux de réussite oscillant plutôt autour de 80 % sur les cinq dernières années. Pas de quoi entamer la confiance d’un certain Pascal Bollini, lucide sur la situation actuelle des clubs…

«J’ai le message de dire à mes joueurs de s’accrocher. On le voit sur le mercato c’est encore hésitant, il y a cette DNCG, des problèmes d’argent pour plusieurs clubs. Les clubs regardent pour certains postes et je dis à mes joueurs de s’accrocher car ça peut venir», assurait, à ce titre, celui qui n’oublie pas de rappeler l’ensemble de ses protégés une fois le stage terminé. Si cette aventure de six semaines est désormais terminée, la situation pourrait, en effet, se décanter dans les jours à venir. En attendant ce coup de fil tant espéré, les éléments restants pourront continuer de croire en leur bonne étoile en regardant certains parcours inspirants… Non retenu par Lens après son passage au centre de formation, Akim Zedadka, désormais au LOSC, avait ainsi profité du stage de l’UNFP FC en 2018 pour relancer sa carrière. Au même titre que Chaker Alhadhur, dernier rempart aussi héroïque qu’insolite des Comores lors de la CAN 2022, ou encore Arnaud Souquet, passé par la case chômage en 2014 avant de signer à Dijon puis Nice et de défendre, aujourd’hui, les couleurs de Chicago. Autant d’exemples qui ne cessent de renforcer, année après année, les bienfaits et la légitimité du stage UNFP…

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