Info FM : à la découverte de Yassine Benrahou, jeune gaucher adroit des Girondins de Bordeaux
De ses premiers pas à l'AS Bondy, aux côtés de Kylian Mbappé, aux Girondins de Bordeaux, en passant par la sélection française puis marocaine, le milieu de terrain Yassine Benrahou évoque ses débuts dans le monde du football. Rencontre avec l'une des belles promesses de la formation girondine.
Les portes du Haillan, centre d'entraînement des Girondins de Bordeaux, se sont doucement refermées sur Jocelyn Gourvennec et son staff, remerciés par la direction girondine après une mauvaise passe dont personne ne semblait pouvoir prédire la fin. Avant de laisser la place, pénalisé par les nombreux blessés et les suspensions en cascade d'un effectif en plein doute, le coach avait pris le soin de faire glisser, l'une après l'autre, de jeunes pouces girondines dans le grand bain du football professionnel. En défense, Jules Koundé ou Thomas Carrique, au milieu Ervin Taha et Zaydou Youssouf. C'est de ce groupe de moins de vingt ans qu'est en train d'éclore le milieu de terrain franco-marocain Yassine Benrahou.
Il ne faut pas très longtemps au jeune Yassine pour passer de la maternité du Blanc-Mesnil, en Seine-Saint-Denis, aux terrains de football. A peine tient-il debout que ses pieds miment les gestes du footballeur. Le joueur qui vient tout juste de fêter ses 19 ans raconte qu'il est venu au foot assez naturellement. Comme une évidence. Et c'est à six ans qu'il débute à Aulnay-sous-Bois, là où il grandit avec ses parents et son frère, de trois ans son aîné. Sa petite sœur, elle, arrivera plus tard. Une famille à laquelle Yassine ne laisse pas le choix. Footballeur ou rien. «Dès petit, le football est une source de motivation pour tout,» raconte-t-il. Mais la priorité, à la maison, c'est les études. Passe vite le bac, lui conseille sa mère. Piqué au vif, Yassine saute une classe et obtient son bac S, alors que sa tête est en permanence tournée vers le terrain.
La génération dorée de l'AS Bondy
«Je l'ai fait pour le foot», raconte Yassine, sans fierté particulière. «Mes parents m'ont toujours dit que si ça n'allait pas à l'école, le foot on arrêterait. Evidemment, j'ai fait le nécessaire.» Comme un détail pour le jeune homme, qui cherche à casser l'image du footballeur stupide qui arrête l'école très tôt. «C'est un cliché de dire que les footballeurs qui font des études sont rares. Je pense que les personnes qui critiquent ne connaissent pas le processus de formation de l'intérieur. Ils ignorent que l'on quitte nos familles tôt, avec un rêve en tête. Si un joueur parvient à percer tôt, il est évident qu'il lui sera difficile de continuer ses études,» raconte celui qui poursuit un cursus de STAPS, en marge de sa carrière footballistique. Un jeune qui signe pro à 16 ou 17 ans n'aura forcément plus les mêmes disponibilités que ses camarades toujours en formation.
Après de très jeunes débuts dans le club de sa ville, Yassine évolue rapidement, passant, au rythme des titres remportés, d'un club séquano-dionysien à un autre. FC Aulnay, FC Villepinte, puis AS Bondy. À Bondy, Yassine, tout juste âgé de 10 ans, tape le ballon avec Kylian Mbappé, Jonathan Ikone ou encore Metehan Guclu. La génération 98-99 bondynoise. Une période dont il garde un souvenir amusé. «Lors d'un tournoi à Caen, avec l'AS Bondy, le coach des U13 m'avait pris dans l'équipe avec Kylian. J'étais surclassé pour disputer le tournoi avec eux, mais on avait rapidement été éliminés. Nos U11 étaient parvenus en demi-finale et alors que tout le monde était venu les soutenir, le papa de Kylian, coach à Bondy, nous cherchait. On était les deux seuls absents, occupés à tirer des coups francs sur un terrain annexe. Dans notre monde, on voulait juste jouer,» raconte Yassine, qui a conservé des liens avec l'attaquant du Paris Saint-Germain.
Buteur, passeur, travailleur
Après Bondy, le joueur fait alors un court passage au Paris Saint-Germain. Là-bas, il conserve le statut amateur, pour ne pas se fermer de portes. Le club parisien et l'Institut National du Football se disputant les jeunes talents d'Ile-de-France, Yassine se voit rapidement poser un ultimatum par le PSG. Le club ne souhaitant pas que le joueur, comme de coutume, s'entraîne à Clairefontaine la semaine et dispute les matches avec Paris le week-end. Yassine choisit donc de quitter le club. Il poursuit son apprentissage à Clairefontaine et évolue, le reste du temps, à l'US Créteil-Lusitanos. Lors du stage finale à l'INF, Yassine, 15 ans, tape dans l'oeil des recruteurs de Bordeaux et signe un contrat aspirant chez les Girondins. Un nouveau défi.
Un peu gêné au moment d'évoquer sa personnalité, ce gentil au regard perçant est quelqu'un de simple et laisse filtrer que ses proches le trouvent attachant. Lorsque l'on bifurque sur ses qualités de footballeur, le milieu de terrain de formation est un peu plus volubile. «Les coaches ont souvent rapporté à mes parents que j'étais quelqu'un de demandeur. Très demandeur. Je suis un gros travailleur, j'aime ça, je suis très exigeant. Un peu trop parfois.» Ses entraîneurs en U17 Nationaux chez les Girondins lui conseillent de se laisser une marge d'erreur. Sur le terrain, le milieu offensif se sent plus à l'aise derrière l'attaquant, mais il peut également évoluer sur les côtés. Fin techniquement, il dispose également d'un certain talent de buteur. Cette saison, Yassine émarge à quatre buts avec la réserve girondine, en National 3. Toujours dans la retenue, il glisse que sa qualité de passe est l'un de ses points forts. Courtes, longues. Son pied gauche fonctionne bien.
Champion de France U19 avec Bordeaux l'an passé
Du haut de son mètre soixante-douze, Yassine n'est pas réputé pour son jeu de tête, même si aucun problème de ce côté là. Son truc à lui c'est les coups francs. Depuis petit, il nettoie les lucarnes de sa patte gauche. Dernière victime en date, les Chamois Niortais, contre qui le Francilien a inscrit un splendide coup franc à la mi-janvier, toujours avec la réserve girondine. «Je regarde les coups francs d'autres joueurs, juste pour le plaisir, avec un œil extérieur. Mais je ne m'inspire d'aucun tireur en particulier,» explique Yassine, pas obnubilé par le mimétisme naturel des jeunes joueurs envers leurs aînés. S'il ne reproduit pas les mouvements de ses illustres prédécesseurs, Yassine a ses préférences lorsqu'il s'agit d'évoquer ses modèles. Petit, Cristiano Ronaldo remporte tous les suffrages. Des qualités de dribbleur et de percussion qui ne le laissent pas indifférent. Aujourd'hui, Eden Hazard, Philipe Coutinho, le Mohammed Salah de cette saison, Nabil Fekir aussi, de petits joueurs techniques...«Messi aussi, bien sûr. Mais lui c'est la référence. J'essaie de regarder ce qu'ils font le mieux pour prendre leurs points forts,» raconte-il.
À son arrivée en Gironde en 2014, comme à l'école, Yassine saute une classe. Il évolue dès ses débuts avec la génération 98, d'abord avec les U17 Régionaux, avant de rapidement rejoindre les U17 Nationaux. Avec cette équipe, il atteint les demi-finales de play-offs, battu par le Paris Saint-Germain après avoir terminé en tête de la phase régulière. L'année suivante, Yassine est de nouveau surclassé et évolue avec les U19 une partie de la saison. Il oscille entre U17 et U19 et n'a aucun mal à justifier pourquoi. «J'évoluais parfois avec les U19, parfois avec les U17. Soit parce que je n'étais pas au top à certains moments, soit pour aller essayer d'aller chercher des résultats avec la catégorie inférieure,» avoue-t-il, sans détour. Les deux catégories qu'il fréquente terminent 2e de leurs championnats respectifs. La consécration arrive l'année suivante. Pour sa deuxième année chez les U19, Yassine devient champion de France. Opposés au Havre, en finale de play-offs à Saint-Nazaire, les joueurs de Jean-Luc Dogon s'imposent 2-0. Un premier trophée majeur pour Yassine.
De la porte du groupe pro à la sélection du Maroc
Cette saison est dans la continuité de la précédente. Yassine tape à la porte du groupe pro. Dès la préparation estivale, Jocelyn Gourvennec le convoque régulièrement pour participer aux entraînements. Il dispute même une rencontre amicale contre Biarritz, facilement remportée par les Girondins (9-0) et lors de laquelle il ouvre le score et délivre une passe décisive. Il est de nouveau aligné face à Eibar, remplacé à la pause par un certain Malcom. S'il s'entraîne encore avec les pros à la mi-janvier, le changement de coach met cette ascension fulgurante en stand-by. Mais pour Yassine, l'arrivée de Gustavo Poyet ne va rien changer à son quotidien. Le joueur s'attend à ce que le néo-coach s'appuie tout d'abord sur son effectif pro avant de s'intéresser aux jeunes. «Cela ne va rien changer parce que je pars du principe que je serai récompensé de par mes performances le week-end, sur le terrain. Après, c'est sûr que s'il fait appel à moi je ferai tout mon possible pour ne plus redescendre,» déclare-t-il, prudent, mais optimiste.
À côté de ça, celui qui a fréquenté les équipes de France U16 et U17 il y a quelques années s'est vu dernièrement appelé par la sélection marocaine. Né d'un papa marocain, Yassine a tout simplement laissé parler ses envies de découverte. «Ce n'est pas une décision, parce que pour moi la question ne se pose pas encore de choisir entre la France et le Maroc. J'ai de très bons souvenirs avec la France. Avec le Maroc, je voulais surtout découvrir un nouveau football, une nouvelle façon de jouer, le football africain. En équipe de France on est souvent apte à jouer contre des équipes européennes, mais moi je voulais découvrir autre chose.» Yassine garde de très bons souvenirs de ce premier déplacement au Maroc, puis au Sénégal. Deux matches amicaux disputés face à la Mauritanie et aux Lions indomptables et une envie de vite recommencer.
Sous contrat stagiaire chez les Girondins de Bordeaux jusqu'en 2019, Yassine n'a qu'une idée en tête. Passer pro dans le club qui l'avait accueilli il y a quatre ans. «En France, j'ai de l'affection pour Bordeaux. On peut se dire que c'est normal, mais je n'aurais pas choisi un club que je n'aime pas,» déclare-t-il. «Je suis concentré uniquement sur Bordeaux, où j'espère percer. J'aimerais m'imposer ici. Pour la suite, on verra.»
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