OM, Grégory Sertic : « pour entraîner Marseille, il faut être tout le temps à fond »
Quatre ans après sa retraite, Grégory Sertic continue d’entreprendre autour du football avec le développement d’une application. Et l’ancien milieu de l’OM garde aussi un œil très attentif à ses anciens clubs Marseille et Bordeaux.
À la retraite depuis 2020 et son départ de l’OM, Grégory Sertic n’a pas tardé à trouver sa reconversion. Contraint d’arrêter le football en raison de douleurs persistantes au genou, l’ancien milieu de terrain est d’abord devenu consultant sur la chaîne Canal+. À côté, l’homme de 34 ans a récemment développé une application « Playse » avec notamment Blaise Matuidi, Moussa Sissoko ou encore Kieran Gibbs. Cette dernière a pour but de proposer des entraînements de football axés sur le développement physique et émotionnel. Les joueurs et les parents peuvent ainsi réserver une séance spécifique sur l’application. « On voulait apporter notre expérience du haut niveau. On a la chance d’avoir aujourd’hui des coachs très ouverts. On n’avait pas cette chance-là à l’époque, nous, on était bien moins accompagné. (…) On veut inclure tout le monde. On veut toucher les gens, du joueur à l’entraîneur. Que tout le monde se développe » nous a-t-il confié avant de donner un peu plus de détails sur l’ambition de ce projet.
«André Villas-Boas n’en pouvait plus d’être coach»
« Ça peut aider à retourner dans les centres de pré-formation pour certains. Quand ils ne sont pas pris, ils se disent que leur carrière est terminée. Mais combien ont su contourner les centres pour terminer pro ? Nous si on peut aider en apprenant aussi à gérer les parents… C’est ce que je dis aux coachs, il faut parler aux parents. Et c’est ce qu’on fait. Si les parents sont heureux, l’enfant est heureux. Un coach qui parle aux parents, c’est un coach qui a tout compris. On voulait essayer d’accompagner sur tous les points. Notre philosophie, ce n’est pas de donner un ballon et 10 chasubles et faire un match. » La place des parents est d’ailleurs un sujet qui revient régulièrement dans le monde amateur. Depuis quelques années, les coachs doivent gérer des parents qui s’immiscent trop dans la carrière de l’enfant. Une réalité qu’a connue Gregory Sertic qui avait tenté de devenir entraîneur du côté de Bretigny, sa ville natale. «Je connais mon métier et chacun à sa place, c’est ce que je dis aux parents. Moi, j’ai vu des gamins qui regardent leur père à chaque passe, chaque action. Il ne réfléchit même plus. Il ne cherche plus des solutions lui-même. Des parents qui disent à leur enfant gardien de but de plonger à droite ou à gauche… Nous, on veut éviter ça et trouver des solutions. On cherche à proposer ça.»
Cette courte expérience au club de Bretigny a d’ailleurs rapidement fini par enterrer les ambitions de l’ancien international espoir français (5 sélections) d’un jour épouser une carrière de coach. «Moi je ne serais pas coach, ce n’est pas mon truc. Tu sais, gérer l’ego des joueurs, c’est compliqué. Quand tu gères les enfants, tu as les parents. Quand tu gères les professionnels, tu as les agents. Tu as aussi le côté financier qui rentre en compte. Aujourd’hui, un coach ne gère plus seulement son effectif, mais il gère tout le monde. Tu dois gérer le président car tu n’as pas les résultats, tu dois gérer le directeur sportif, tu as ta communication à gérer. C’est un enfer d’être coach », a-t-il détaillé avant d’évoquer le cas de l’ancien entraîneur de l’OM André Villas-Boas qu’il a connu deux ans. Depuis son départ de Marseille en 2021, le technicien portugais n’a plus entraîné et s’est reconverti dans un rôle de président du côté du FC Porto.
«Marcelino n’avait pas ce truc, il était trop calme»
«J’en parlais justement récemment avec André Villas Boas, c’est pour ça que lui a arrêté. Il est maintenant président du FC Porto, je l’ai eu au téléphone et il me racontait qu’il n’en pouvait plus. Il me disait "maintenant, je suis président, je gère tout, mais c’est moi le boss, moi, je ne voulais que ça". Il ne voulait plus gérer celui qui vient demander "pourquoi tu n’as pas fait jouer lui" alors que tu sais bien pourquoi tu ne l’as pas fait jouer. Celui qui toque à la porte en demandant pourquoi il est sur le banc, et que tu as juste envie de lui dire : "bah parce que tu n’as pas été bon"» confie-t-il. Depuis sa retraite, Grégory Sertic suit d’ailleurs assidûment l’actualité de l’OM. Et alors que le club olympien négocie actuellement pour faire venir Sergio Conceicao sur le banc (ndlr : désormais l’OM accélère sur la piste Roberto de Zerbi), l’ex-joueur du RC Lens estime qu’il coche toutes les cas pour réussir au Vélodrome (ndlr : cet entretien a été réalisé avant les informations sur la piste De Zerbi).
«Sergio Conceiçao à l’OM ? Ça peut être une bonne idée parce qu’il a un franc-parler. C’est quelqu’un qui est tout le temps à fond. Et à Marseille, il ne faut pas l’inverse… Tu vois Marcelino, il n’avait pas ça, il était trop calme. À l’OM, ce n’est pas comme ça… À Marseille, tu es sur ton banc de touche, il faut que tu sois à bloc. Les gens te regardent. Ils regardent ta posture, comment tu te comportes. Marcelo Bielsa il était sur sa glacière, mais tu sais que dès qu’il envoyait, le Vélodrome arrêtait et l’écoutait. Il faut un coach fort de caractère et je pense que Sergio Conceiçao l’est. C’est un très bon choix honnêtement. J’espérais que Jean-Louis Gasset, que j’ai connu à Bordeaux, fasse un peu plus, mais comme il l’a dit, c’était une belle fin pour lui. Rebondir à l’OM après son échec avec la Côte d’Ivoire. Je pense qu’il a fait ce qu’il devait faire, il a amené l’OM en demi-finale de C3. L’Atalanta était meilleure, il faut être honnête. Mais il a redonné le sourire aux supporters. » Du côté des supporters, ceux de son ancien club les Girondins de Bordeaux, ne doivent pas vraiment avoir le sourire.
«Je cherche des investisseurs pour Bordeaux»
Actuellement en Ligue 2, le club au scapulaire inquiète de par sa situation sportive et financière. Et en tant qu’ancien capitaine et formé à Bordeaux, Grégory Sertic n’a pas caché son inquiétude. «La situation est très compliquée malheureusement et moi, j’ai peur d’une chose, c’est qu’à un moment donné, le club tombe très très bas. J’ai l’exemple du Mans ou même Strasbourg à l’époque. Après, je ne sais pas si c’est un mal pour un bien aussi parce qu’on parle de 50M de déficit, je ne sais pas si un investisseur va mettre de l’argent dedans parce que forcément, tu arrives dès le départ à perte. Pour moi ça me paraît compliqué. Je te dis la vérité, aujourd’hui moi je cherche quelqu’un, un investisseur. Je suis déjà allé dans plusieurs pays, j’ai deux trois contacts. Et c’est pour Bordeaux. Parce que ce n’est pas possible. Et certains joueurs, des grandes gloires du club, cherchent aussi. Le président a amené tout ça malheureusement. Aujourd’hui la situation est très compliquée et si on ne trouve pas vite un investisseur, Bordeaux, on en entendra plus parler. On repartira de plus bas et ça sera en district. Pour remonter, il faudra des années et des années. »
Et concernant la saison prochaine, le pessimisme règne du côté de l’ancien Bordelais. «Ça va être compliqué, je dis toujours que quand tu descends de Ligue 1 tu as un ou deux ans pour remonter après sinon tu commences à t’enfoncer. Et financièrement, on sait qu’à Bordeaux ce n’est pas bien donc tu ne pourras pas recruter. La DNCG est juste derrière et va te taper dessus. Donc c’est compliqué de profiter des bons joueurs de Ligue 2, même pas de Ligue 1. Des joueurs qui sont prêts à jouer en Ligue 2, ça sera très compliqué à attirer. Mais si on retrouve quelqu’un pour racheter le club, on va être bien (rires).»
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