PSG, Braga : l’aventure de Cher Ndour prend un tournant inattendu
En quelques mois, la carrière de Cher Ndour a pris un tournant surprenant. Grand espoir de Benfica, le jeune milieu de terrain a rejoint libre le Paris Saint-Germain quand est venu le mercato d’été. Puis, six mois après son arrivée, l’Italien a été envoyé en prêt à Braga afin d’engranger du temps de jeu, de l’expérience et de la confiance. Où en est-il aujourd’hui ?
Véritable fournisseur de talents, Benfica est devenu une machine à cash en vendant à prix d’or ses meilleurs éléments. L’écurie portugaise avait certainement cette idée en tête quand elle a déniché en 2020 Cher Ndour, grand espoir du football italien passé par San Giacomo, Brescia et l’Atalanta Bergame. Certains le comparaient déjà aux plus grands à son arrivée au Portugal comme nous l’explique Marco Martins, correspondant pour Record. «Dans la pratique et quand il a été recruté, beaucoup voyaient en lui Rui Costa, c’est-à-dire un numéro 10 qui peut jouer derrière les attaquants. On sait que Rui Costa aimait bien se décaler sur le côté gauche. Moi, je trouve qu’il est un peu comme ça. C’est la comparaison qu’on peut faire quand il arrive à Benfica.» Un club qui croyait beaucoup en lui.
«À Benfica, Ndour était perçu comme un joueur d’avenir. Il est arrivé très tôt, très jeune et il était déjà très courtisé. Il a commencé avec les U19 puis l’équipe B avant d’arriver avec l’équipe A. Moi, je trouve ça très intéressant par rapport à son évolution. Tant en U19 qu’en réserve, c’était lui le meneur de jeu, mais plus sur une pointe basse, en 8 et parfois en 10 pour essayer de porter le ballon vers l’avant. Il avait ce rôle de jeune joueur mais avec des responsabilités et il savait les prendre, surtout lors de sa dernière saison. Il a marqué 4 buts, joue 30 matches et il a gagné la Youth League. Ce n’est pas un hasard. Il fallait un joueur qui fasse la différence. Même si d’autres étaient intéressants, Ndour était l’un des éléments principaux. C’était un leader malgré sa jeunesse. Sur ses trois saisons, il était en apprentissage. Mais il a vraiment fait deux années de formation.»
Un départ trop rapide ?
Il poursuit : « il y avait tout pour continuer ainsi (…) Une saison de plus et je pense qu’il aurait pu gagner sa place. Dans la rotation, il aurait été une option. C’est dur de s’imposer chez les trois gros clubs portugais. Il faut des résultats tout de suite.» Sauf que le natif de Brescia, qui était en fin de contrat et donc en position de force, a décidé d’aller voir ailleurs. «Je pense qu’il n’a pas reçu la proposition de Benfica qu’il souhaitait pour continuer son évolution. De nos jours, il faut offrir aux jeunes joueurs des salaires qui peuvent être difficiles à offrir pour un club comme Benfica, surtout quand ils sont courtisés. Quand on a faim de plus et que d’autres proposent un projet et un salaire plus élevé, c’est dur de refuser. On lui a proposé le PSG, de côtoyer Mbappé, d’être dans la rotation (…) De ce que j’ai entendu, le fait de ne pas avoir été libéré pour participer à la Coupe du monde U20 l’aurait aussi blessé», nous explique Marco Martins.
D’autant que Ndour n’a pas été utilisé par la suite par Benfica, rappelle le journaliste. «Si tu ne joues pas le Mondial, tu t’attends à jouer. Roger Schmidt ne l’a presque pas utilisé l’an dernier, il était dans la rotation, sur le banc pour essayer de glaner des minutes mais il en a pas eu tant que ça. Il attendait plus de temps de jeu. C’est ce qu’il laisse transparaître. Malgré tout, d’habitude, quand un joueur refuse de prolonger son contrat avec Benfica, il est écarté de toutes les équipes. Ndour n’a pas vraiment été écarté. Au départ, peut-être. Mais il a été rapidement rappelé dans le groupe.» Une preuve de plus que les Lisboètes comptaient malgré tout sur le joueur de 19 ans, qui a décidé de dire oui au PSG le 12 juillet dernier. Les Franciliens ont fait un vrai pari sur l’avenir avec le footballeur sous contrat jusqu’en 2028.
Une gestion particulière à Paris
Présent durant la pré-saison, Ndour a ensuite enchaîné les désillusions. Tout d’abord, il n’a pas été inscrit dans la liste des joueurs retenus par Luis Enrique pour disputer la Ligue des champions. Ensuite, il s’est contenté de miettes, lui qui a joué son premier match le 3 septembre dernier face à l’OL. Il était entré sur la pelouse du Groupama Stadium 5 minutes (victoire 4-1). Puis, il a passé 9 minutes sur le pré face à Strasbourg le 21 octobre (victoire 3-0) avant de rejouer 14 minutes le 11 novembre à Reims (victoire 3-0). Même si on ne s’attendait pas à ce qu’il joue beaucoup du fait de la concurrence, la gestion particulière de Luis Enrique à son égard a interpellé. L’Espagnol s’était d’ailleurs expliqué : «c’est un joueur très jeune, international avec les espoirs italiens. Il a des conditions physiques et techniques de très haut niveau. Il serait titulaire partout en L1. »
L’Asturien avait ensuite précisé : «mais ici, il y a de la compétition et c’est difficile de lui donner des minutes. C’est une merveille et un exemple de ce que doit être un jeune joueur. Il n’a jamais raté un jour en termes de niveau technique et physique. En sachant qu’il n’est pas dans la liste de C1, il s’entraîne toujours de manière professionnelle. C’est un joueur avec un grand avenir.» Après une première titularisation et un but contre Revel en Coupe de France le 7 janvier dernier (90 minutes jouées), Cher Ndour a été envoyé en prêt à Braga durant le mercato d’hiver. Un choix qui n’est pas synonyme d’échec pour Marco Martins. «Il faut se rappeler du contexte. Il arrive dans une équipe qui change énormément, il ne connaît personne. Il était sur le banc donc c’était quand même une option. Il a fait quelques bouts de match et il a même marqué un but. Ils l’ont prêté, mais pas n’importe où, à Braga qui joue des compétitions européennes. Je pense que c’est un choix raisonné de le prêter.»
Un prêt peu évident à Braga
Un avis qui est aussi celui du joueur. « Je suis très heureux et motivé. Je suis arrivé dans un grand club, avec une grande structure et qui investit beaucoup dans la formation. J’avais besoin de minutes et je pense que le SC Braga est le club idéal pour moi. Je connais le championnat et le SC Braga est une équipe qui joue bien au football, qui a un bon style de jeu et je pense que ce sera très bon pour moi. Je pense rapidement, je joue comme si j’étais avec des amis. Je suis très compétitif et je veux toujours gagner chaque match. J’espère aider l’équipe à gagner des matches, faire le maximum en championnat et en Europa League. Je veux améliorer mes performances individuelles et aider l’équipe à atteindre ses objectifs. Je donnerai tout pour ce maillot. Vous pouvez toujours compter sur moi sur le terrain.» Après la parole, place aux actes donc. Depuis son arrivée, le milieu a disputé 7 rencontres toutes compétitions confondues, mais aucune en tant que titulaire (164 minutes jouées, 1 but).
Son bilan est plutôt moyen pour le moment comme nous l’explique Matthieu Monteiro, chroniqueur chez Golaço TV et analyste vidéo. «Au début, il n’est pas arrivé en tant que titulaire. Il a plus fait des entrées en jeu, qui ont été correctes, c’est-à-dire rien de mauvais mais rien d’extraordinaire non plus. Il a un profil intéressant et arrivait aussi pour un peu prendre le relais d’André Horta et d’Al-Musrati, pour apporter quelque chose que ces deux garçons étaient capables d’apporter, comme la qualité dans les transmissions, la capacité à faire progresser le ballon, à la fois par la passe que par le dribble et la conduite. On attendait qu’il soit un milieu de terrain qui par ses actions balle au pied fasse plus de différences et plus progresser le jeu de l’équipe. On n’a pas eu ça. C’est un milieu finalement de contrôle, avec peu de prises de risque. Il a fait un peu de bien à la récupération. Mais sur les entrées en jeu, on n’a rien eu finalement d’extraordinaire jusqu’au match retour face à Qarabag (victoire 3-2).»
Un avenir incertain
Un tournant dans son prêt. «Il a fait globalement une bonne entrée. Il a remplacé Rodrigo Zalazar qui, sur ce retour, était catastrophique. Mais Ndour est un peu passif sur le coup franc que Braga prend. Depuis il ne joue pas beaucoup, il n’a fait que 2 entrées. Je pense que ça a beaucoup joué dans les têtes. C’est un moment de déconcentration qui te laisse une sacrée mauvaise image auprès des décideurs et du staff. Depuis, il ne joue presque plus. C’est vrai que le comportement en match est celui d’un joueur prêté. Tu ne le valorises que pour un autre club. Donc entre le match contre Qarabag et le fait que sur les entrées avant ce match-là il n’y a pas eu la sensation d’un joueur tellement au-dessus qu’il est indispensable et qu’il va vraiment faire évoluer et augmenter drastiquement la compétitivité de l’équipe notamment la capacité de l’équipe au milieu de terrain, Ndour n’a pas donné l’impression de pouvoir reprendre le flambeau après le départ d’Al-Musrati, ni d’être un pendant de João Moutinho et un joueur capable de faire de vraies différences dans l’entrejeu pour améliorer le jeu de l’équipe en construction.»
Difficile de l’imaginer poursuivre à Braga. «Je pense que c’était plus une opportunité de marché. En plus, avec le départ d’Al-Musrati, c’était censé être une option encore plus valide. Il n’est que prêté, sans option d’achat. Si je ne compte pas le fait que João Moutinho est le taulier au milieu désormais, ça veut dire que si tu le mets tu ne valorises pas un joueur comme Vitor Carvalho ou Rodrigo Zalazar, qui sont des joueurs appartenant au club et qui sont beaucoup plus à valoriser. Ils ont une meilleure connaissance du jeu de l’équipe naturellement. Ndour fait office de 4e milieu dans cette hiérarchie (…) Son avenir, c’est peut-être d avoir du temps de jeu. De commencer sur le banc certes, de faire bonne impression et gratter du temps de jeu et essayer d avoir des titularisations car il en a aucune depuis son arrivée. Pour l’année prochaine, je ne sais pas si ça passera par un nouveau prêt à Braga. Je pense que si ça ne marche pas cette année, le club ne s’empressera pas de le prendre.»
Le PSG a fait un pari
Il poursuit : «je pense que c’est un prêt caractéristique du mercato d hiver. Ce n’est pas dans la politique de Braga de prendre des joueurs sans avoir une option à terme, surtout pour un jeune comme lui. Donc si ça ne marche pas à Braga, je ne pense pas que ça marchera à Paris, en tout cas pas tout de suite. Ça passera sûrement par un nouveau prêt.» C’est certainement un investissement sur le long terme pour Paris qui en récoltera peut-être les fruits pour Marco Martins. «Ce n’est pas une erreur de casting ou un flop, c’est une opportunité de marché comme Xavi Simons. Des jeunes joueurs avec un futur, qui sont bons à leurs âges. On ne sait pas s’ils réussiront mais ils arrivent pour 0 euro. Soit ils rapporteront de l’argent, soit ils arriveront à exploser et apporteront toutes les garanties pour intégrer l’équipe première. C’est un choix sportif qui permettra une plus-value.»
Il conclut : «Ndour est arrivé au milieu, dans un secteur souvent critiqué au PSG. Mais quand on regarde bien, Luis Enrique a beaucoup d’options. Il n’a aussi lancé aucun jeune puisque Bradley Barcola jouait à l’OL, Warren Zaïre-Emery avait eu des minutes avec Christophe Galtier. Lucas Beraldo était titulaire à São Paulo. C’est le petit pas qui manque à Ndour. Il doit engranger de l’expérience autre part avant de jouer à Paris. À Benfica, il se partageait entre les U19, les U23, l’équipe B puis la A. Il n’a pas joué une année complète avec les pros. Il a été poli par Benfica mais surtout formé par l’Atalanta. Il faut finir de le polir avec une saison pleine. Ce n’est pas un flop et ça n’en sera pas un au PSG. S’il ne joue pas, il sera vendu. Le PSG sera toujours gagnant avec ce joueur.» Un joueur récupéré gratuitement et qui a le potentiel pour faire des choses intéressantes. La balle est dans son camp.
En savoir plus sur