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Comment et pourquoi la France produit des champion(ne)s de foot freestyle ?

À mi-chemin entre le football et la danse avec une grande influence urbaine, le football freestyle est une jeune discipline qui a vu sa cote de popularité exploser au début des années 2010 grâce aux réseaux sociaux et YouTube. Avec Gautier Fayolle et Séan Garnier en tête de file, un vivier français de grand talent a raflé bon nombre de titres mondiaux chez les garçons comme chez les filles. Zoom sur les raisons pour lesquelles la France produit des champions et championnes de foot freestyle avec Gautier Fayolle et Pola Gomez.

Par ThomasCvrK
24 min.
Foot Freestyle @Maxppp

Le foot freestyle est un sport très récent mêlant la jonglerie, l'acrobatie et même la gymnastique. Le seul élément indispensable pour faire du foot freestyle, c'est le ballon qui accompagne les athlètes partout dans le monde. C'est un sport très libre et praticable n'importe où : dans un parc, en pleine rue ou même sur une piste de danse. La créativité, la technique, le style, l’exécution et la difficulté des enchaînements permettent aux freestylers de se démarquer les un(e)s des autres afin d'obtenir le vote des juges.

C'est également une discipline où la communication avec le public a une place primordiale et les Français l'ont rapidement compris avec notamment Gautier Fayolle et Séan Garnier qui ont rapidement utilisé les réseaux sociaux pour donner de la visibilité à ce sport qui a pris une ampleur considérable en France. Si Mélody Donchet, Gautier Fayolle, Lisa Freestyle ou encore Séan Garnier ont une multitude de titres mondiaux à leur actif, ce n'est pas un hasard. Et on va justement le voir avec Gautier Fayolle, et Pola Gomez, jeune étoile montante du freestyle foot français.

Gautier Fayolle et Séan Garnier, les précurseurs et tauliers

« On a rapidement eu l'idée de partager notre passion sur internet et notamment YouTube en faisant des tutos sur des figures ou tout simplement en communiquant autour du sujet. On s'est approprié les réseaux sociaux assez tôt dans cette discipline et ça a forcément joué pour transmettre la passion et permettre à d'autres générations de suivre le mouvement », raconte Gautier Fayolle, 7 fois champion du monde en catégorie show. Un autre freestyler a particulièrement marqué les esprits, Arnaud Garnier, plus connu sous le nom de Séan Garnier. Passé par le centre de formation de l'AJ Auxerre et l'ES Troyes AC, Séan a affolé les compteurs de YouTube au début des années 2010 avec notamment un défi contre Neymar sponsorisé par Red Bull en 2011. C'est la période où le monde du sport français découvre cette discipline grâce aux vidéos YouTube et au buzz généré par des jongles et des dribbles toujours plus créatifs.

Pola Gomez, l'une des têtes d'affiche de la nouvelle génération française de foot freestyle, a commencé le freestyle avec les vidéos des pionniers de la discipline: « ils ont eu une grande influence pour ma génération, quand on voit des Français devenir champions du monde, on se dit « pourquoi pas nous ? » Finalement, on se réfère à eux et leurs publications régulières sur internet. Par exemple, quand j'ai débuté, je me suis beaucoup aidée des vidéos tutos de Gautier Fayolle pour essayer de reproduire ses gestes et m'améliorer. » Les tutos de Gautier Fayolle ont porté leurs fruits puisque Pola Gomez, âgée de 19 ans, est devenue vice-championne de France en 2020.

La France, l'un des premiers pays à s'être intéressé au foot freestyle

Avec le titre de Séan Garnier en 2008 lors des premiers championnats du monde de foot freestyle, une vague française a débarqué dans ce sport et de nombreux titres de champions du monde s'en sont suivis chez les filles et les garçons. Mais avant ça, il ne faut pas sous-estimer l'impact de la campagne publicitaire de Nike axée sur le freestyle en 2003, et dont Ronaldinho ( qui jouait à l'époque au PSG ) était la star, sur l'intérêt des Français envers cette discipline dérivée de la danse de rue.

Septuple champion du monde entre 2011 et 2017, Gautier Fayolle relativise tout de même sur le niveau de la France en compétition: « on a souvent une image de pays qui domine le foot freestyle mais ce n'est pas exact. On ne domine pas tant que ça. La Pologne ou le Japon, par exemple, ont 3 à 4 freestylers régulièrement dans le top 32, ce n'est pas notre cas. En termes de statistiques, notre représentation n'est pas si grande, on est loin de la Chine dans le ping-pong par exemple. Par contre, il est vrai que la France est l'un des pays qui s'intéresse le plus au foot freestyle, on a un énorme vivier et une forte culture urbaine. »

Membre du top 8 mondial, Pola Gomez partage ce point de vue:« la France a sans doute profité du fait d'être en avance sur d'autres pays. Personnellement, j'ai connu un univers freestyle foot en plein essor partout dans le monde avec une concurrence forte. Si le monde du freestyle avait connu un tel essor dès le début à l'international, il y aurait eu plus de freestylers et une fédération internationale. »

Le foot freestyle, un sport à part entière

Comme Séan Garnier et toute la première génération, Gautier Fayolle jouait d'abord au football. Mais fasciné par les gestes techniques de Ronaldinho, l'aspect libre, artistique ainsi que le côté spectacle et show, il a décidé de se lancer dans le freestyle. « Il y a déjà un changement notable au niveau du profil de la nouvelle génération de freestyler, on est loin du footeux en centre de formation qui se blesse, abandonne le football et se consacre au freestyle comme Séan à l'époque. La visibilité que les freestylers français ont apporté à ce sport sur les réseaux sociaux a permis à certains jeunes de se lancer dans le freestyle pour faire du freestyle et non pas en complément du football. Le freestyle est également mis en lumière au Cirque du Soleil et ça aide les jeunes à se lancer », explique Gautier Fayolle qui a mis sa carrière en suspens pour rentrer dans le monde artistique du spectacle vivant au Cirque du Soleil depuis 2019, où il a notamment rendu hommage à Lionel Messi lors d'un show assisté par le génie argentin.

Parmi la nouvelle génération, Pola Gomez ne correspond pas vraiment au portrait décrit par Gautier Fayolle car elle s'est mise au freestyle suite à deux ruptures des ligaments croisés. « On allie trop souvent le foot freestyle au football classique mais ce sont deux sports différents. Personnellement, j'ai connu le freestyle après avoir joué au football mais il faut tout de même les distinguer et ne pas considérer le freestyle comme un sport qui est là en cas de besoin après le football. J'ai des amis qui n'ont jamais fait de football et qui sont très forts en foot freestyle donc il faut bien avoir en tête que le freestyle n'a rien à voir avec le football classique. »

L'importance capitale des équipes

Si les deux pionniers du foot freestyle français ont commencé ensemble, ils se sont séparés et ont aidé la discipline à s'étendre en France sans le savoir au moment des faits : « après quelques divergences avec Séan Garnier, j'ai changé d'équipe. Notre « rivalité » nous a nourris l'un et l'autre. Dans l'adversité, on se surpasse. C'est ce qui a aidé à développer et booster la discipline car aucun de nous ne voulait lâcher. Que ce soit au niveau compétitif ou sur les réseaux sociaux, on s'est tiré vers le haut. » Aujourd'hui, le groupe Footstyle que Gautier Fayolle avait fondé en 2006 compte près de 800 000 abonnés sur YouTube et la Team S3 de Séan Garnier en compte près de 500 000. Outre ses 7 titres individuels de champion du monde Gautier Fayolle en a remporté 4 autres en duo dont le tout premier, avec son coéquipier Clément Reubrecht, en 2010.

« Dans la team Speen qui a été créée il y a 4 ans, on a des ambassadeurs français et internationaux. Notre équipe a été l'une des premières à être mondialement reconnue dans le football freestyle. Dans une équipe, tout le monde se motive pour se faire voir du grand public en faisant des shows et des représentations pour initier les jeunes. On s'entraide beaucoup, on se conseille pour progresser. Les jeunes nous suivent sur les réseaux sociaux et essayent de donner le meilleur d'eux-mêmes pour intégrer notre groupe, ça pousse tout le monde vers le haut et ne fait qu'élever le niveau global du foot freestyle. », argumente Pola Gomez, dont la Team Speen compte déjà 200 000 abonnés sur Instagram.

Un mode de vie avant d'être un sport à part entière ?

À l'instar des skateboarders, de nombreux freestylers identifient leur passion comme étant un mode de vie avant d'être un sport purement compétitif. Avec plus de 40 pays visités grâce à sa passion, des shows devant Zinédine Zidane, Neymar ou Lionel Messi, Gautier Fayolle est un bon exemple de ce que représente cette discipline : « c'est tout un mode de vie, il y a vraiment un côté lifestyle autour des voyages, de la liberté et la chance de pouvoir être avec son ballon partout et pratiquer sa passion. Le foot freestyle, c'est une façon de penser et de voir la vie, une sorte de volonté de s'affranchir de toutes règles. Il va de paire de cultiver le sport et le lifestyle. C'était en tout cas la volonté de premiers freestylers, on verra maintenant ce que nous réservent les prochaines générations mais il est clair que le lifestyle fait partie de l'ADN de cette discipline. »

Comme de nombreux freestylers, Pola Gomez rencontre des stars du football, voyage régulièrement à Dubaï et dans de nombreux pays pour collaborer avec de nombreuses marques tout en continuant d'être compétitive, comme Gautier Fayolle l'était. Elle nous raconte comment elle associe le côté lifestyle à la compétition: « certains font du football freestyle pour le côté compétitif. D'autres veulent faire de leur passion un métier pour tout simplement gagner leur vie. Pour en faire son métier, il faut développer son réseau en proposant des shows, des initiations etc. Il y en a aussi, comme moi, qui essaient d'allier les deux. Ce n'est pas évident de réussir dans les deux puisque la compétition n'a rien à voir avec le côté lifestyle. Pour y réussir, il faut vraiment avoir un bon rythme d'entraînement et si l'on veut également vivre de notre passion, il faut penser à partager nos entraînements sur les réseaux sociaux. En somme, il est plus facile d'être performant en compétition quand on est vraiment concentré dessus mais avec quelques sacrifices, on peut tout faire. »

Quel avenir pour le foot freestyle français ?

Dans chaque discipline récente, plus les années passent et plus les athlètes progressent. L'Homme tend toujours vers le progrès, dans tous les domaines de la vie et le sport n'y échappe pas. De la même manière que le football ne cesse de progresser sur beaucoup d'aspects grâce à des joueurs et des staffs mieux préparés, le foot freestyle progresse aussi. Cette progression pourrait par la même occasion avoir un impact sur les futurs freestylers français.

Finale de freestyle football Redbull 2020

En effet, les championnes et champions français vont sans doute perdre l'avantage qu'ils avaient sur d'autres pays où le freestyle foot n'était pas encore développé. Il faut donc s'attendre à un revirement de situation avec moins de titres à la clé comme nous l'explique Gautier Fayolle: « à vrai dire, il y a déjà un certain déclin en France. À part Mélody Donchet qui continue de performer à très haut niveau, ce qui est une très bonne nouvelle pour nous, nous remportons moins de titre qu'il y a 10 ans. Chez les garçons, il y en a 2 ou 3 qui sortent du lot avec notamment Jordan Meunier, de l'équipe Footstyle. Mais depuis que la concurrence est vraiment forte, il y a moins de titres. C'est donc aux nouvelles générations de prendre le relais. On aura peut-être quelques années de trou mais la génération qui a aujourd'hui 16-18 ans et qui a commencé le freestyle très tôt devrait ramener beaucoup de titres à la France.»

Fer de lance de la nouvelle génération, Pola Gomez reste optimiste: « avant, il n'y avait pas tous les réseaux sociaux pour regarder la progression de chacun, des tutos, des moyens d'envoyer des messages rapidement et de demander des conseils alors que les jeunes ont tous ces avantages et peuvent avoir des « mentors ». Les jeunes sont vraiment motivés pour réussir les gestes des plus grands freestylers en s'entraînant d'arrache-pied. Les freestylers de la nouvelle génération ont toutes les cartes en main pour devenir de véritables champions. » Il y a donc de bons motifs d'espoir pour que l'avenir du foot freestyle français soit encore radieux et que le ciel de la discipline reste bleu... blanc, rouge.

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