Transfert avorté de Kevin Danso : pourquoi les visites médicales sont-elles si particulières en Italie ?

Par Valentin Feuillette
4 min.
Kevin Danso @Maxppp

Alors qu’il devait s’engager avec l’AS Roma, Kevin Danso est finalement revenu au RC Lens en raison d’une visite médicale jugée insatisfaisante par le club romain. Un événement exceptionnel qui est finalement assez courant en Italie en raison d’une réglementation strict et d’une procédure administrative unique au monde.

C’était pourtant l’un des gros dossiers de cette fin de mercato et tout portait à croire que Kevin Danso allait enfin quitter le RC Lens après plusieurs mercatos mouvementés en rumeurs. Un accord avait été trouvé avec l’AS Roma pour un transfert avoisinant les 25 millions, mais alors même que le défenseur avait atterri dans la capitale italienne pour passer sa visite médicale et parapher son contrat, le club italien a fait machine arrière : «En étroits pourparlers avec l’AS Rome après un accord total trouvé avec le Racing, Kevin Danso ne rejoindra pas le club de la Louve. La longue interprétation d’un examen médical est à l’origine de ce transfert avorté. Le club s’interroge sur les raisons profondes de la non-validation de ce mouvement pour un joueur minutieusement suivi qui enchaîne les saisons à plus de 30 matches sur les terrains français comme internationaux, a ajouté le club du bassin minier. Il maintient son absolue confiance en son roc défensif», a écrit le club artésien dans un communiqué la semaine dernière. Ainsi, le transfert a capoté et les différentes théories du complot se sont multipliées, certains accusant l’AS Roma d’avoir volontairement fusillé le deal pour avancer sur d’autres pistes à un meilleur rapport qualité-prix dont Manu Koné et Mario Hermoso.

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En effet, si la première visite médicale effectuée avec le club romain n’a pas détecté de problèmes, c’est le second examen médical obligatoire en Italie pour respecter le protocole des autorités sanitaires italiennes qui a trouvé quelques pépins physiques, rendant le transfert impossible. De retour en France, Kevin Danso avait d’ailleurs réagi à sa situation compliquée : «Je suis déçu et en colère contre la façon dont se sont déroulés ces derniers jours et l’échec du transfert à l’AS Roma. Surtout, je suis très surpris de la prétendue raison de l’annulation du transfert. Tant les médecins de l’ÖFB que le service médical du RC Lens m’ont suivi de près et m’ont examiné régulièrement ces dernières années. J’ai récemment été minutieusement contrôlé lors de la préparation du début de saison à Lens. Aucune anomalie n’a jamais été découverte ici. C’est pourquoi les interprétations du contrôle médical à Rome sont extrêmement irritantes pour mon entourage et pour moi et ne sont en aucun cas compréhensibles». Si on peut comprendre la frustration de l’Autrichien de 25 ans, la procédure est loin d’être rare et inédite en Italie, pays à la réglementation médicale très pointue. Pour rappel, Christian Eriksen, alors joueur de l’Inter, n’avait pas été autorisé à rejouer au foot avec un défibrillateur.

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Une procédure unique et particulière

L’Italie a un système particulier, unique au monde, qui exige par la loi un certificat d’aptitude pour ceux qui s’entraînent et concourent auprès d’une fédération ou d’un organisme reconnu par le Comité olympique national italien (CONI). Deux arrêtés ministériels, adoptés en 1982 et 1983, réglementent le protocole obligatoire auquel doivent se soumettre ceux qui pratiquent une activité physique de compétition en Italie. Pour la plupart des disciplines, les antécédents médicaux, l’examen clinique, l’électrocardiographie (ECG) au repos et à l’effort, la spirométrie et l’analyse d’urine sont requis sur une base annuelle. Selon l’activité, les contrôles et la durée de validité peuvent varier. Le certificat est spécifique à la discipline pratiquée et chaque Fédération détermine l’âge minimum et maximum pour l’activité compétitive. Le médecin du sport est le spécialiste compétent en la matière, chargé de réaliser les examens et de délivrer le jugement d’aptitude. Le club du joueur est alors responsable de vérifier que tous les membres possèdent un certificat valide. Pourquoi l’Italie a-t-elle choisi de s’appuyer sur un système législatif aussi complexe et d’élaborer un protocole d’éligibilité obligatoire ? Les concepts fondamentaux sont la culture de la prévention et celle de la protection de la personne, avant même celle du sportif.

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L’association de ces tests s’est en effet révélée être un outil de prévention pour la protection de la santé, agissant comme un dépistage dès le plus jeune âge, conduisant à une réduction des morts subites sur les terrains de compétition. Le football italien est encore traumatisé de la mort de Davide Astori, joueur de la Fiorentina et international italien décédé subitement le 4 mars 2018. Les visites de remise en forme sportive ont contribué au développement d’une branche de la médecine nommée la cardiologie du sport. Au fil des années, les connaissances sur des pathologies autrefois inconnues ou relatives au diagnostic précoce et aux thérapies possibles se sont enrichies. L’ECG de ceux qui pratiquent un sport peut présenter certains changements que le médecin du sport reconnaît comme bénins et liés à l’entraînement. D’autres types de modifications ECG peuvent plutôt représenter l’expression d’une maladie cardiaque sous-jacente et ils font alors l’objet d’une enquête avec des tests de deuxième niveau. La plupart des maladies cardiovasculaires responsables de mort subite chez les jeunes sportifs sont cliniquement silencieuses et rarement suspectées ou diagnostiquées sur la base de symptômes. Ce dernier point est l’élément qui a fait capoter le deal entre Lens et Rome après la détection de problèmes cardiaques chez Kevin Danso, de même pour Tiago Djaló, le plan B de la Roma, qui a vécu le même sort en revenant à la Juventus.

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