Euro 2024 : ce qu’il faut savoir de la Belgique
En reconstruction après plusieurs échecs de la fameuse génération dorée portée par la superstar Eden Hazard, la Belgique compte bien revenir sur le devant de la scène lors de cet Euro 2024. Pour cela, le nouveau sélectionneur Domenico Tedesco compte sur quelques anciens revanchards et de jeunes talents qui veulent prendre le pouvoir et écrire leur histoire avec les Diables Rouges.
Le parcours de qualification et le groupe :
Ces dernières années, les Diables Rouges ont parfois vécu un enfer lors des grandes compétitions auxquelles ils ont participé. Demi-finalistes du Mondial 2018, ils ont été sortis dès les 1/4 de finale de l’Euro 2020 par l’Italie avant de toucher le fond lors de la Coupe du monde 2022 au Qatar, où ils ont été éliminés dès la phase de poules. Un terrible fiasco qui a eu des conséquences importantes. En poste pendant 6 ans, le sélectionneur Roberto Martinez a quitté le navire. Même chose pour la superstar Eden Hazard ou Axel Witsel, quelques mois après. Dans ce contexte particulier, la Belgique a lancé un grand chantier mené par le Germano-italien Domenico Tedecsco, dont l’objectif prioritaire était de qualifier le pays pour l’Euro 2024. Une mission accomplie puisque les Diables Rouges ont terminé invaincus et premiers de leur groupe de qualification (groupe F, 6 victoires, 1 nul et 0 défaite) dans lequel figuraient la Suède, l’Azerbaïdjan, l’Estonie et l’Autriche, l’adversaire le plus coriace. D’ailleurs, la Belgique a assuré sa qualification lors de la 7e journée et a terminé en tête avec 20 points, soit un de plus que la sélection autrichienne. Du voyage en Allemagne, la Belgique, qui va participer à son sixième Euro, le troisième consécutif, va croiser le fer avec la Slovaquie, la Roumanie et l’Ukraine dans un groupe E a priori à sa portée. Quart de finaliste des deux derniers Euro et favori de son groupe, le Plat pays veut redorer son blason. Pour cela, il faudra s’extirper du piège tendu par les Slovaques, deuxièmes derrière le Portugal lors des éliminatoires, les Roumains, premiers de leur groupe devant la Suisse, et les Ukrainiens, qualifiés lors des barrages. L’occasion parfaite pour voir si la Belgique a digéré ses récents échecs…
Les qualités et faiblesses
Si elle ne figure pas parmi les favoris du tournoi, la Belgique peut être l’un des outsiders de cet Euro. Véritable fournisseur de talents, le pays classé troisième au classement FIFA, derrière l’Argentine (1ère) et la France (2e), a de nombreux atouts à faire valoir, notamment une puissance offensive de feu. Malgré le départ d’Eden Hazard, les Diables Rouges demeurent redoutables en attaque puisqu’ils ont marqué 22 buts lors des éliminatoires de l’Euro (dont 1 pénalty), soit une moyenne de 2,75 buts par rencontre. Douze ont été inscrits du pied gauche, six du pied droit et un de la tête. Ils ont d’ailleurs tiré 119 fois au but, mais 42 tirs ont été cadrés (43 tirs non cadrés, 34 tentatives arrêtées). Il faudra donc s’appuyer là-dessus en Allemagne comme nous l’explique Christophe Franken, chef de la rubrique football de La Dernière Heure. «La qualité première est le secteur offensif. C’est une équipe qui est naturellement tournée vers l’attaque, surtout quand Romelu Lukaku est là. Il a un profil différent. C’est un pivot et tout autour de lui ça bouge un peu partout, entre Jérémy Doku, Dodi Lukebakio, Johan Bakayoko, plus le milieu de terrain qui est assez offensif aussi avec évidemment Kevin De Bruyne. Mais des garçons comme Youri Tielemans, Amadou Onana ou Orel Mangala adorent s’infiltrer et l’équipe est aspirée par l’attaque. C’est une attaque qui peut embêter tout le monde à l’Euro, sans exception.» On ne dira pas le contraire. Mais la Belgique a aussi des points à améliorer comme la défense. Si elle n’a encaissé que 4 buts durant les éliminatoires, elle devra faire sans son gardien n°1 Thibaut Courtois, qui a annoncé son forfait et dont les relations avec le sélectionneur sont glaciales, depuis un conflit lié au brassard de capitaine en l’absence de KDB. Courtois n’a pas accepté de partager ce rôle avec Lukaku. Quoi qu’il en soit, il manquera aux Diables Rouges selon le journaliste de La DH. «On n’a plus Thibaut Courtois pour le moment comme c’est compliqué avec le sélectionneur. On a plein de bons gardiens mais plus un top gardien. Pour le moment, c’est un match entre deux joueurs. Il y a Koen Casteels, titulaire à Wolfsbourg. Il a une malchance incroyable, il est toujours blessé au mauvais moment. Il n’a pas joué les rencontres de mars alors qu’il aurait dû. L’air de rien, Matz Sels, que vous connaissez bien en France depuis son passage à Strasbourg, fait son petit bonhomme de chemin. Il fait aussi de bonnes choses à Nottingham Forest. Pour le moment, c’est un match entre les deux. C’est difficile de dire qui sera titulaire. Même le sélectionneur se montre un peu plus hésitant là-dessus.»
Pourtant, il faudra un dernier rempart solide car la défense ne rassure pas vraiment. «La grosse faiblesse, c’est la défense. C’est une équipe qui peut embêter tout le monde à l’Euro, mais la défense peut souffrir face à tout le monde à l’Euro. Malgré un tournoi à 24, des équipes moins expérimentées, on peut se faire surprendre par tout le monde aussi. La défense a été critiquée car elle était vieillissante donc elle a été rajeunie. Il n’y a plus que Jan Vertonghen, le Diable avec le plus de sélections de toute l’histoire de notre équipe nationale (154 capes, ndlrà. Il est encore là et il est toujours titulaire. Pour le reste, ce sont des joueurs plus jeunes et qui se cherchent un petit peu. Wout Faes, qui est titulaire à Leicester en D2 anglaise (ils vont monter en Premier League, ndlr), est une solution tout comme Zeno Debast, qui joue avec Vertonghen en club à Anderlecht. Ils forment d’ailleurs une bonne paire défensive. Faes et Debast ont des qualités différentes mais encore pas mal de manques. Ce ne sont pas encore des défenseurs de classe européenne. Debast pourrait le devenir mais il est encore jeune (20 ans). Pour Faes, il est un peu plus âgé (26 ans). À droite, Thomas Meunier et Timothy Castagne sont des valeurs sûres. À gauche, c’est un peu plus délicat.» Idem au milieu, ce qui n’était pas un problème initialement. «Sur le papier, ça doit être l’une des grandes forces car il y a une densité de talents. C’est rare pour un petit pays comme la Belgique, avec beaucoup de bons joueurs, beaucoup de jeunes qui doivent encore arriver comme Roméo Lavia, qui avait tout pour se mettre en valeur à Chelsea et peut-être être la "surprise" à l’Euro. Mais il a fait une saison quasiment blanche et on ne le reverra pas encore. Onana est un excellent joueur. Un milieu box to box et défensif mais qui peut tout faire dans l’entrejeu. Mais à Everton, ça ne se passe pas si bien que ça. Il espérait un transfert, ça ne s’est pas fait. Il n’est pas toujours titulaire. Ne parlons pas de Mangala, qui joue très peu à Lyon alors qu’il était une valeur sûre à Nottingham Forest. Le sélectionneur l’adore, mais il joue très peu en club. Tielemans revient bien, même s’il a eu une période où il jouait moins à Aston Villa.» Tedesco et son staff devront composer avec ces données, tout en espérant ne pas avoir de pépins physiques entre-temps.
Le sélectionneur : Domenico Tedesco
Après le départ de Roberto Martinez, la Fédération royale belge de football a reçu un nombre impressionnant de CV. Claude Puel, Hervé Renard ou encore Thierry Henry ont notamment été liés aux Diables Rouges. Mais dans la dernière ligne droite, deux profils se sont dégagés. Ceux de Peter Bosz et de Domenico Tedesco. Et c’est ce dernier qui a été l’heureux élu. Très motivé, le Germano-italien, passé par Schalke 04, le Spartak Moscou ou encore le RB Leipzig, savait qu’il s’attaquait à un chantier colossal en Belgique. Une nation en reconstruction marquée par de récents échecs. Mais le technicien de 38 ans a su prendre ses marques et mener son équipe au succès, puisqu’elle n’a pas perdu sous ses ordres (8 victoires, 4 nuls). Il a aussi géré avec poigne le dossier Courtois. Une attitude ferme qui a beaucoup plu chez nos voisins selon le journaliste de La DH. «Il est très apprécié en Belgique. Il est arrivé avec un petit nom mais il était moins connu qu’un Roberto Martinez qui était là avant lui. Il fallait lui succéder et il a fait ça de façon très pragmatique. Même si c’est très cliché, il est plus dans l’organisation allemande que dans la fantaisie italienne. En tout cas au niveau du caractère, pas du foot, il est très clair et direct dans tout. Donc ça plaît beaucoup, notamment à la fédération qui l’a déjà prolongé avant même de savoir ce qu’il va se passer à l’Euro. Donc c’est un gars qui s’est très vite fait à la Belgique, même s’il continue de vivre en Allemagne avec sa famille il est très souvent ici. On le voit souvent dans les stades du championnat belge.»
Pointilleux et impliqué, le natif de Rossano veut aussi mettre en place un football offensif tout en ayant une certaine discipline défensive et tactique. D’ailleurs, son onze pour l’Euro se dessine, bien qu’il reste encore quelques incertitudes à certains postes. «Tedesco utilise un 4-2-3-1 ou un 4-3-3, c’est à peu près la même chose. Dans le but, Koen Casteels reste le favori pour débuter, même si ça va se jouer de très peu avec Matz Sels. Au poste de latéral gauche, je pense que ce sera Arthur Theate. Ce n’est pas un vrai latéral mais il dépanne à ce poste depuis les débuts de Tedesco. Il l’a testé et ça s’est plutôt bien passé mais si on voit que ce n’est pas son poste. Dans l’axe central, Jan Vertonghen, à gauche, devrait être associé à Wout Faes, qui part favori face à Zeno Debast. À droite, ce sera Timothy Castagne, malgré le retour de Thomas Meunier. Le duo de milieux défensifs serait Amadou Onana et Orel Mangala, mais Youri Tielemans revient bien et a bien joué en Angleterre en amical. Ça va être serré mais a priori Onana et Mangala ont eu plus de temps de jeu avec Tedesco. Et pour les quatre offensifs, en n°10 évidemment Kevin De Bruyne. À gauche, ce sera Jérémy Doku et à droite, on peut avoir un doute entre Dodi Lukebakio et Johan Bakayoko, qui se sont partagés le temps de jeu. Mais un petit avantage à Bakayoko du PSV, qui part un peu favori même si Leandro Trossard est aussi apprécié. En pointe, on retrouvera Romelu Lukaku. Il y a beaucoup de possibilités, c’est la force de l’équipe nationale en attaque. Il y a de la variété. En défense, il y a quelques doutes.» Tedesco a encore quelques jours pour les dissiper.
La star : Kevin De Bruyne
Considéré depuis toujours comme l’une des stars de la sélection belge, Kevin De Bruyne endosse encore un peu plus seul ce rôle depuis la retraite d’Eden Hazard et l’absence de Thibaut Courtois. Épaulé par son vice-capitaine Romelu Lukaku, le joueur de Manchester City sera le leader des Diables Rouges en Allemagne. Avec 99 sélections au compteur, le joueur de 32 ans, qui soufflera ses 33 bougies le 28 juin prochain, est un redoutable passeur mais aussi un bon finisseur, puisqu’il totalise 26 réalisations avec son pays. Malgré une saison difficile d’un point de vue physique, puisqu’il a manqué 147 jours de compétition (35 rencontres toutes compétitions confondues) dont 127 en raison d’une blessure à l’ischio, il a souvent brillé une fois sur le terrain avec Manchester City. En effet, il a marqué 6 buts et délivré 14 passes décisives en 20 apparitions seulement cette année (15 titularisations). Moins usé que d’autres qui ont joué toute l’année, KDB devra malgré tout faire attention à sa santé pour éviter d’être à nouveau trahi par son corps à l’Euro. Il devra aussi réussir à retrouver ses automatismes avec les Belges, lui dont la dernière cape remonte au 28 mars 2023 contre l’Allemagne, soit plus d’un an. Mais ce n’est pas ce qui inquiète le plus Christophe Franken.
«Le cas de De Bruyne est assez particulier parce que c’est le capitaine de l’équipe. Ce qui a d’ailleurs fait un peu mal à Thibaut Courtois, on le sait. Mais finalement, on l’a très peu vu durant l’ère Tedesco. Il a repris l’équipe après la Coupe du monde au Qatar. Il a joué les premières rencontres de l’ère Tedesco en Suède et en Allemagne, qui était un amical. Il a été très bon. Le système de Tedesco était fait autour de De Bruyne, son capitaine. Mais finalement, on ne l’a plus vu. Il a été blessé puis il devait jouer les matches amicaux de mars sauf que c’était un peu délicat. En plus, Pep Guardiola a demandé à ce qu’il puisse rester en club. Ce que Tedesco a accepté. Donc finalement, on ne le reverra qu’à l’Euro. Il y a les deux matches amicaux en juin. Maintenant, De Bruyne c’est De Bruyne. On le voit toutes les semaines en championnat. Il reste toujours aussi impressionnant. Le problème, c’est qu’il ne peut peut-être plus jouer tous les trois jours comme avant et donc il faudra un peu le gérer ou savoir jouer sans lui lors de certains matches. Il ne faut surtout pas qu’il se blesse avant la fin du tournoi. À l’Euro 2020 (joué en 2021), on n’avait plus eu un De Bruyne au top lors des 1/4 de finale contre l’Italie. Évidemment, on avait beaucoup souffert, sans Eden Hazard également. C’était une autre époque. Là clairement, on aura besoin d’un super De Bruyne pour aller loin. Sans doute pas pour franchir la poule qui est assez simple, mais pour aller loin dans le tournoi. On aura besoin de lui, ça c’est clair.» Brassard vissé sur le bras, KDB est prêt à mouiller le maillot et à tout donner pour mener les Diables vers les sommets.
L’attraction : Jérémy Doku
À 22 ans, Jérémy Doku ne cesse de gravir les échelons les uns après les autres. L’été dernier, le natif de Borgerhout est passé sans problème du Stade Rennais et de la Ligue 1 à Manchester City et la Premier League. Et ceux qui pensaient que le prix de son transfert, à savoir 60 millions d’euros, pourrait être un problème, ont eu tout faux. Rapidement, le joueur né en 2002 a montré des choses intéressantes avec les Skyblues. Que ce soit en tant que remplaçant ou titulaire, le remuant belge a souvent apporté sur le côté gauche, où il a fait de l’ombre à Jack Grealish. Une bonne pioche donc. Cette saison, il a ainsi pris part à 38 rencontres toutes compétitions confondues, dont 19 dans la peau d’un titulaire. Le temps de marquer 5 buts et de délivrer 8 assists, lui dont la vitesse, la percussion mais aussi l’efficacité sont appréciées en Angleterre. En Belgique, le rôle de Doku est différent. Leader de la nouvelle génération, il est un élément très important du groupe de Tedesco, du haut de ses 20 sélections (2 buts). Outre son talent balle au pied, ses qualités et sa personnalité font de lui l’un des visages qui compte chez nos voisins belges à écouter le journaliste de La Dernière Heure.
«C’est clairement le nouveau chouchou du public belge. On le voit bien quand il y a un match à Bruxelles, c’est lui qui a repris le rôle abandonné par Eden Hazard "d’ambianceur" sur le terrain. C’est celui qui excite le public d’un seul geste. Il prend ce rôle avec beaucoup de plaisir, on le sent. Donc clairement, Doku est devenu l’un de nos gros atouts. Il est quasiment au même niveau qu’un Lukaku ou un De Bruyne dans l’importance qu’il peut avoir footballistiquement sur l’équipe, même s’il reste très jeune. Il part titulaire sur le côté gauche a priori, même si Tedesco l’a déjà utilisé à droite comme ça arrive à Manchester City. Il mise ainsi sur les gauchers Lukebakio et Bakayoko (…) Doku est devenu un cadre, une attraction. L’équipe nationale belge peut parfois faire peur. Il n’y a personne qui se réjouira de jouer contre la Belgique, même si en 1/8e ou en 1/4 les Diables ne seront plus favoris. Ils seront parmi les outsiders, s’ils y sont toujours. Mais clairement, Doku sera le facteur X qui pourrait faire basculer un match. On l’a vu le dernier match du dernier Euro contre l’Italie, le meilleur Diable, le seul qui avait été bon était Doku. Il avait presque été l’homme du match. Malgré la défaite, il avait été impressionnant. On se dit que s’il arrive en Allemagne avec quelques planches en plus et les conseils tactiques de Guardiola dans la poche, ça peut faire mal.» La Belgique n’attend que ça !
Le calendrier de la Belgique
Belgique - Slovaquie : le lundi 17 juin à 18 heures à la Francfort Arena
Belgique - Roumanie : le samedi 22 juin à 21 heures au stade de Cologne
Ukraine - Belgique : le mercredi 26 juin à 18 heures à la Stuttgart Arena
La liste de 25 joueurs :
Gardiens : Koen Casteels (Wolfsbourg), Thomas Kaminski (Luton Town) et Matz Sels (Nottingham Forest)
Défenseurs : Timothy Castagne (Fulham), Maxim De Cuyper (FC Bruges), Zeno Debast (Anderlecht), Wout Faes (Leicester), Thomas Meunier (Trabzonspor), Arthur Theate (Stade Rennais) et Jan Vertonghen (Anderlecht)
Milieux : Yannick Carrasco (Al-Shabab), Kevin De Bruyne (Manchester City), Orel Mangala (Olympique Lyonnais), Amadou Onana (Everton), Youri Tielemans (Aston Villa), Aster Vranckx (Wolfsbourg), Arthur Vermeeren (Atlético de Madrid) et Axel Witsel (Atlético de Madrid)
Attaquants : Johan Bakayoko (PSV Eindhoven), Charles De Ketelaere (Atalanta), Jeremy Doku (Manchester City), Romelu Lukaku (AS Roma), Dodi Lukébakio (Séville), Loïs Openda (RB Leipzig) et Leandro Trossard (Arsenal)
En savoir plus sur