L’Équipe de France fait toujours peur en Belgique mais…

Par Jordan Pardon
6 min.
L'équipe de France avant France - Pologne @Maxppp

Si sa surpuissance et son réservoir infini instaurent toujours la peur en Belgique, l’équipe de France a affiché certaines limites lors de la phase de groupe. Et dans le plat pays, on est bien conscient de la possibilité de créer l’exploit ce lundi.

L’équipe de France intimide-t-elle encore autant qu’il y a cinq mois ? Favoris à la victoire finale avant le début de l’Euro, les Bleus ont enregistré la plus forte baisse des prédictions Opta ces derniers jours (la France est passée de 19,1% de chances d’être sacrée, à 13,4%, selon les chiffres de l’outil de prédiction). La faute à une première partie de tournoi trop peu consistante, durant laquelle l’équipe de France n’aura pas su trouver la recette pour marquer de ses propres moyens dans le jeu, et qui l’aura vue terminer deuxième de sa poule dans un tournoi majeur pour la première fois sous l’ère Deschamps. Forcément, l’actualité entourant l’état d’esprit du vestiaire - où frustration et fracture avec le sélectionneur semblent prendre de plus en plus d’ampleur - vient renforcer l’idée d’une équipe possiblement en fin de cycle. En Belgique pourtant, on reste mesuré sur tout ce qui peut se dire, se lire, ou s’entendre, au sujet de l’équipe de France.

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Sacha Tavolieri, journaliste belge et suiveur des Diables Rouges, ne perd pas la face : «l’équipe de France est une équipe paresseuse au regard de ce qu’elle est capable de faire dans le contenu, un peu à l’image de l’élève toujours au fond de la classe, qui ne fait pas ses devoirs, mais qui a toujours 8/10 à ses examens, métaphore-t-il. Mais évidemment qu’elle reste crainte, même si elle est menée 2-0, on l’a vu contre l’Argentine. Ici, en Belgique, tout le monde a conscience de ses capacités à hausser son niveau en phase finale. Battre l’équipe de France, ce serait l’exploit d’une vie», insiste-t-il. Loïc Woos, journaliste indépendant pour Walfoot.be et actuellement sur place en Allemagne pour suivre les Diables, va dans le même sens : «ce serait un exploit de battre la France. La Belgique est dans une phase de transition générationnelle. Je comparais les lignes des deux équipes avec un confrère. Même si un match ne se joue pas sur le papier, la ligne défensive de la Belgique est composée de joueurs de milieu de tableau de Ligue 1, de Premier League, et d’Anderlecht. La France, c’est Barcelone, Liverpool, Arsenal… On ne boxe pas dans la même catégorie. Puis je ne pense pas qu’il y ait d’immenses inquiétudes à avoir pour la France. Même si sa phase de groupe n’a pas été rassurante, personne ne s’est créé plus d’occasions qu’elle. »

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Des motifs d’espoir pour croire à l’exploit

Néanmoins, tous les spécialistes belges sollicités s’autorisent le droit d’espérer. D’abord, parce que l’équipe de France a, quand même, montré certaines limites en phase de groupe, mais aussi parce que la Belgique n’a jamais été aussi forte que lorsqu’elle enfilait le costume d’outsider : «oui, il y a quelque chose à faire. Quand elle est dans cette posture de petit canard, elle peut vite devenir la grande méchante oie, sourit Tavolieri. On a aussi vu sur la phase de groupe qu’il pouvait y avoir des opportunités contre cette équipe de France, ce sera un match ouvert, mais la Belgique ne va pas perdre 5-0.» Patrick Gaparata, fondateur du compte Belgium Touch sur X, va dans le même sens : «la Belgique de Tedesco a montré qu’elle savait élever son niveau de jeu selon l’adversité, et on l’a vu contre l’Allemagne et l’Angleterre. Aujourd’hui, au regard de la phase de groupe de l’équipe de France, je pense que c’est le meilleur moment de tomber dessus. Si ce serait un exploit ? Historiquement, oui, mais sur ce début d’Euro, non», tranche-t-il. Loïc Woos, suiveur des Diables, reste lui aussi conscient des faiblesses des Bleus, sur lesquelles il faudra appuyer : «la puissance de la France est reconnue en Belgique, mais on a aussi vu qu’elle n’était pas injouable. Koundé n’est pas latéral de formation et il y a quelque chose à faire avec Doku, Upamecano est un super défenseur mais peut parfois être rattrapé par ses sautes de concentration, on peut aussi les prendre dans le dos en transition…», décrypte-t-il.

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Autre donnée à prendre en compte, et pas des moindres, la méforme des leaders techniques de l’équipe de France, à savoir Antoine Griezmann et Kylian Mbappé. «Je préfère tirer la France que l’Espagne par rapport à la confiance. Mbappé sort d’une saison statistiquement exceptionnelle, mais après une année éprouvante, on n’a pas l’impression qu’il soit en mesure d’appuyer sur l’interrupteur comme il a pu le faire par le passé. Griezmann, lui, n’est plus capable d’être ce milieu tout terrain comme en 2022. Lorsqu’il est en forme, la France fait trois finales, lorsqu’il l’est moins, la France est éliminée en 1/8es de l’Euro en 2021», rappelle Patrick Gaparata. Pour Sacha, il faut plutôt se méfier d’une bête blessée. Car Antoine Griezmann pourrait bien être le facteur X de cette rencontre. «Je pense que ça va dépendre de sa forme, dans les moments comme ça, par sa fraîcheur, sa solidarité, son empreinte, il est capable de permettre à la France de gagner. Et il a quelque chose à jouer par rapport à son début d’Euro, il a une revanche à prendre. Ce serait aussi une façon de terminer en beauté après, car après, il ne sera sûrement plus là».

Même 6 ans après, l’esprit de revanche toujours là

L’eau a coulé sous les ponts depuis la demi-finale de Coupe du Monde 2018. Roberto Martinez n’est plus là, Eden Hazard a pris sa retraite, alors que côté français, seulement 3 titulaires de l’époque le sont encore aujourd’hui (Kanté, Mbappé, Griezmann). Pourtant, en lisant les quotidiens belges, revient souvent cette idée de «revanche». «Jouer contre la France, c’est comme quand tu joues contre ton cousin qui se moque toujours de toi. Quand tu lui mets enfin sa raclée, c’est jouissif, mais ça arrive tous les 15 ans. Ce que font transpirer les médias belges, c’est quelque part leur fantasme. Tout le monde a conscience de la qualité de l’équipe de France ici, mais elle est aussi jalousée», estime Sacha Tavolieri.

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«L’esprit de revanche est là, mais je n’ai pas spécialement l’impression que ce soit contre la France, nuance Loïc Noos. Il y a eu un vrai traumatisme en 2018, pas causé par la France, mais par le fait que pour la première fois de son histoire, la Belgique avait l’espoir de gagner un trophée, mais il a été balayé sur un corner.» Clément Pierard, Community Manager du compte Joueurs belges sur X, reste quand même d’avis que la rencontre de 2018, et l’histoire qui en a découlé derrière, a créé une rivalité entre les deux nations : «comme avec les Pays-Bas, il y a la frontière linguistique qui fait que cet esprit de rivalité sera toujours là entre la France et la Belgique. Aujourd’hui, ça a tourné, la France est bien plus forte, mais ça reste toujours un match spécial», insiste-t-il. Un match spécial, de nature à booster l’ego des joueurs selon Tavolieri : «dans la tête des Diables, l’idée c’est de montrer à tout le monde qu’on n’est pas si petit que ça, c’est l’état d’esprit en Belgique. L’ego des joueurs est poussé à fond quand on joue contre la France, même plus que leur propre honneur de représenter le blason en tant que tel», considère-t-il.

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