Conflit au Moyen-Orient : quel quotidien pour les sélections d’Israël et de Palestine ?
Les sélections d’Israël et de Palestine doivent également composer avec l’épée de Damoclès d’une terrible guerre, dont l’escalade débutée le 7 octobre dernier a plongé les deux équipes dans un doute total quant à leur avenir sportif respectif.
Depuis le 7 octobre 2023, le conflit israélo-palestinien, entamé officiellement en mai 1948, a pris une nouvelle tournure dramatique. Le mouvement islamiste et nationaliste palestinien du Hamas, considéré comme organisation terroriste par l’Union Européenne et les Etats-Unis notamment, a coordonné une série d’attaques terroristes (bombardements, pillages, kidnappings, assassinats…), faisant un bilan total de près de 1 400 victimes israéliennes et entraînant ainsi les terribles ripostes de l’armée israélienne ordonnées par le premier ministre israélien, Benyamin Netanyahou, en Palestine, et notamment à Gaza, où plus de 11 000 palestiniens ont perdu la vie. Près de 1,5 million de personnes ont dû se déplacer à cause de la guerre, d’après le comptage de l’Office de secours et de travaux des Nations unies pour les réfugiés de Palestine dans le Proche-Orient (UNRWA). Un désastre humanitaire et des crimes insoutenables qui plongent la région dans un déséquilibre toujours plus accru, à l’heure où la communauté internationale continue de se diviser sur le sujet entre le bloc occidental, grand soutien d’Israël, et les pays voisins tels que l’Iran et le Liban qui se rangent du côté de la Palestine.
Et à l’image du conflit entre la Russie et l’Ukraine, commencé le 24 février 2022 avec le lancement d’«une opération militaire» sur le territoire ukrainien par Vladimir Poutine, l’Israël et la Palestine voient leur quotidien culturel et sportif bousculé par les multiples tragédies que connaissent ces deux pays. Les sélections israéliennes et palestiniennes, qui ne figurent pas dans la même confédération, avancent dans un épais brouillard quant à leurs échéances sportives. Pour rappel, les Bleu Ciel et Blanc sont encore en lice pour un ticket qualificatif pour l’Euro 2024, organisé l’été prochain en Allemagne du 14 juin au 14 juillet, faisant partie de l’Union des associations européennes de football (UEFA) depuis 1991, suite à son exclusion de l’AFC. Tandis que les Lions de Canaan sont membres de la Confédération asiatique de football (AFC) et s’apprêtent à disputer leurs premières rencontres du 2ème tour qualificatif pour la Coupe du Monde 2026, organisée conjointement par les États-Unis, le Canada et le Mexique. Derrière les désastres et les horreurs de cette guerre, le football représente parfois un échappatoire mais l’organisation en est malheureusement impactée…
Un calendrier chargé pour Israël
Lors de la dernière trêve internationale en octobre, les rencontres prévues face au Kosovo et à la Suisse ont été reportées par la Fédération internationale de football association (FIFA). Le match face au Kosovo a finalement eu lieu le 12 novembre, sur la pelouse du stade de Fadil Vokrri à Pristina. Les joueurs d’Alon Hazan ont chuté sur la plus petite des marges (1-0). Les autorités du Kosovo, pays à majorité de confession musulmane, avaient décidé de placer le match sous haute sécurité : «Nous étions concentrés et nous voulions apporter un peu de réconfort aux Israéliens. C’est dommage que nous n’ayons pas pu faire ça, mais c’est le premier de quatre matchs et nous verrons ce que nous pouvons faire. Notre pays avait besoin de quelque chose pour relever la tête et nous n’avons pas gagné ici, mais maintenant nous devons regarder vers l’avenir», a longuement expliqué le sélectionneur israélien après la rencontre.
L’hymne israélien a d’ailleurs été copieusement sifflé par le public kosovar avant la rencontre, alors que le bus israélien avait connu une frayeur sur le chemin vers l’aéroport pour se rendre au Kosovo. Les 31 joueurs convoqués par Alon Hazan et son staff ont dû sortir du car et se mettre à l’abri après une alerte roquette dans le ciel de Tel Aviv. Malgré ce contexte, les internationaux israéliens ont conscience de l’importance qu’ils peuvent avoir ces dernières semaines pour le peuple d’Israël : «Le sélectionneur dit toujours que nous avons un cadeau : provoquer un sourire sur le visage du plus de monde possible. Nous ne sommes pas des héros. Nous sommes là pour le pays. Les hommes et les femmes qui se battent pour le pays sont les véritables héros. Nous sommes juste là pour faire tout ce qui est possible», a précisé le milieu Neta Lavi (12 sélections), ancien joueur du Maccabi Haïfa. Actuellement 3ème du groupe I avec un match en moins, Israël va jouer son deuxième match en retard ce mercredi soir face à la Suisse, avant de jouer contre la Roumanie et Andorre, ce qui fera quatre matchs en 10 jours.
Des problèmes logistiques pour la Palestine
Entraînée par Makram Daboub depuis 2021, la Palestine, qui a participé à la Coupe d’Asie en 2015 et 2019 et s’est qualifiée pour le tournoi continental 2023 qui se déroulera au Qatar, connaît une belle croissance ces dernières années mais le contexte actuel est compliqué pour constituer un groupe avec de nombreux joueurs bloqués à Gaza. Le sélectionneur souhaitait faire appel à Ibrahim Abuimeir, Khaled Al-Nabris et Ahmed Al-Kayed mais ils n’ont pas pu sortir de Gaza à cause de la guerre entre Israël et le Hamas, qui en est à son deuxième mois : «Jusqu’à présent, tout va bien. Beaucoup de leurs proches sont cependant morts à la suite des bombardements. Avec les morts et les destructions à Gaza, les joueurs sont dans un état psychologique difficile. Il n’y a aucun match qu’on peut gagner d’avance. Mais nous avons de bonnes chances d’atteindre le prochain tour des éliminatoires de la Coupe du monde. Nous ferons de notre mieux. Le football est le jeu le plus populaire au monde. Cela rassemble les gens. Nous aspirons à obtenir de bons résultats et à montrer l’identité palestinienne et le fait que c’est un peuple qui mérite la vie et aime la paix», a déclaré le sélectionneur tunisien de la Palestine. Deux joueurs de Gaza, Mohamed Saleh et Mahmoud Wadi, basés en Égypte, devraient rejoindre l’équipe palestinienne en Jordanie. Les préparatifs ont déjà été interrompus auparavant, les joueurs palestiniens n’ont pas pu partir pour participer à un tournoi amical en Malaisie le mois dernier. Désormais, la sélection palestinienne est basée en Jordanie pour être sûre de pouvoir voyager pour les matchs.
D’un point de vue logistique, c’est aussi très compliqué pour les Lions de Canaan. Sur demande de la fédération palestinienne, l’Algérie avait accepté d’accueillir les prochaines rencontres de la sélection palestinienne, notamment le match contre l’Australie, prévu le 21 novembre 2023 dans le cadre des éliminatoires de la Coupe du Monde 2026. Finalement, la Palestine ne pourra pas jouer sur le sol algérien. La FIFA et la Confédération asiatique de football (AFC) ont décidé conjointement de rejeter cette proposition. Mais la Palestine ne veut pas abandonner son rêve de participer à la Coupe du Monde en 2026, surtout que l’attribution automatique de qualification à l’Asie est passée de quatre places en 2022 à huit en 2026 : «C’est un peuple qui veut être entendu et vu par le reste du monde, qui veut vivre normalement comme tout le monde, donc les gens se soucient de leur équipe nationale. Cela représente le désir d’être reconnu comme une nation libre et souveraine», a affirmé Susan Shalabi, vice-présidente de la Fédération palestinienne de football, devenue membre à part entière de la FIFA, l’instance dirigeante internationale du football en 1998. La Palestine peut néanmoins compter sur plusieurs de ses soutiens régionaux : le Koweït a été désigné comme terrain neutre pour accueillir la rencontre entre la Palestine et l’Australie. La rencontre contre le Liban aux Émirats arabes unis la semaine prochaine – le match a également été déplacé de Beyrouth en raison de problèmes de sécurité liés au mouvement libanais du Hezbollah, proche du Hamas.
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