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Agression, racisme : les nouveaux témoignages accablants des supporters de l’OL

Ce dimanche, la Ligue 1 a montré une bien piètre image d’elle-même à l’occasion d’un Olympico qui a finalement été annulée après l’agression de Fabio Grosso et du car de l’OL par des supporters présents à Marseille. En réponse à cette violence, plusieurs supporters lyonnais ont répondu par d’horribles actes racistes dans les travées du Vélodrome. Un racisme que dénonce plusieurs supporters des Gones qui ont également vécu un trajet plus que tumultueux jusqu’à l’antre phocéenne. Témoignages.

Par Chemssdine Belgacem
8 min.
Les supporters lyonnais au Groupama Stadium @Maxppp

C’est une bien piètre image de la Ligue 1 qui a été donnée ce dimanche soir. Alors qu’un Olympico intrigant sur le pré devait se dérouler au Vélodrome, de bien tristes événements ont eu lieu lors du trajet amenant la délégation lyonnaise jusque dans l’antre phocéenne. Pris à partie par plusieurs supporters présents sur place, le car des joueurs a été sous le feu des projectiles. Touché près de l’œil, Fabio Grosso aurait même pu perdre la vue à quelques millimètres près. Incapable de tenir son poste sur le banc des Gones, la rencontre a finalement été annulée. Un dénouement logique et qui a exacerbé les tensions dans le stade entre Ultras des deux clubs. Également visés par des projectiles, les supporters de l’OL ont alors vécu une soirée longue et interminable. C’est alors que certains se sont rendus coupable d’actes absolument inexcusables et odieux. Entre saluts nazis et cris racistes, plusieurs fans des Gones ont, grandement, contribué au capharnaüm qu’aura été cette soirée marseillaise. Interrogés par nos soins, plusieurs supporters lyonnais qui étaient au Vélodrome ont accepté de revenir sur cette soirée chaotique. Leur récit est glaçant et leurs messages limpides : violence et racisme n’ont rien à faire dans le football et dans notre société.

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«La sécurité était inexistante sur notre trajet jusqu’au stade»

Alors que les déplacements de supporters lyonnais au Vélodrome étaient généralement annulés ces dernières années, leur venue sur la Canebière ce dimanche a finalement été autorisée. Alors que les ambitions sportives des deux clubs sont diamétralement opposés sur le pré depuis le début de saison, beaucoup auraient pu penser que cet écart sportif aurait pu calmer d’éventuelles tensions. Il n’en aura rien été. Vitres brisées, carrosserie amochée, les cars des supporters de l’OL ont été saccagés à l’instar de celui de leurs joueurs. Présent dans l’un de ces cars, Jérémy conte le début de cette soirée houleuse et le trajet jusqu’au Vélodrome : «on a reçu la consigne de fermer les rideaux du car pour ne pas être reconnu et minimiser les risques d’un affrontement. Le bus des joueurs, lui, arrivait un peu avant les 10 bus de supporters donc le staff de l’OL a très vite informé les virages que le bus s’était pris des projectiles. Donc à partir du moment où le bus des joueurs avait ramassé, on savait qu’on y passerait sûrement donc les 20 minutes qui suivent sont passés très vite. Il y avait une grande crainte. On ne savait pas à quoi s’attendre sachant qu’on avait quand même une très grosse escorte. On s’est dit pour les joueurs, c’est encore pire, donc on pensait vraiment ramasser et que ça parte en gros affrontement.»*

Malgré cette grosse escorte que souligne Jérémy, d’autres comme Louis pointent une sécurité qui a été quasi inexistante aux abords des bus lyonnais : «on n’était même pas arrivés quand on a vu la nouvelle concernant le car de nos joueurs. On est arrivés dans des rues où il y avait que des CRS et des mecs pouvaient taper les vitres normalement. On était prêt à descendre pour en découdre, mais les CRS nous ont gazés. Niveau sécurité, c’était n’importe quoi. En gros, j’ai été très surpris du trajet emprunté. On est vraiment passé par des petites rues propices au traquenard avec une sécurité presque inexistante. Je ne dirais pas qu’on a été pris au piège mais on s’y attendait un peu.» Et alors que Louis pointe cette sécurité défaillante, cette notion de piège revient dans le discours de Kevin qui estime que quelque chose ne tournait pas rond ce soir-là. Pour lui, et pour beaucoup de ses camarades, tout portait à croire que quelque chose de dramatique allait se passer ce dimanche : «on sentait la tension monter. Apparemment, on passe par l’Avenue du Prado mais là on est passé par une rue adjacente qui ne correspondait pas au trajet habituel. Une sorte de boulevard en travaux, bref, la place typique pour un traquenard. Certains parlent d’embuscade. De ce que j’ai lu, on est passé devant un bar réputé pour accueillir beaucoup d’Ultras marseillais. Je pense que ça a pété à ce moment-là. Je ne pense pas que c’était prévu, je n’espère pas en tout cas. On était à la merci des Marseillais. Plusieurs d’entre nous demandaient avec insistance aux chauffeurs d’ouvrir les portes pour aller en découdre. Au final, on se fait caillasser. J’ai reçu un énorme pavé juste à côté de moi. C’était de la pure folie.»

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Arrivés au stade, les quelque 600 supporters lyonnais ont alors vécu une autre drôle de soirée. Passant des heures au Vélodrome, les Rhodaniens ont ensuite dû patienter jusqu’à 2h30 au stade, dans des conditions loin d’être idoines : «on arrive au stade après des fouilles pas croyables et le chef de la sécurité commence presque à nous menacer en disant qu’il sait qui on est etc… On apprend ensuite que le match n’aura pas lieu. On croyait que le match allait se jouer. On est restés dans le parcage jusqu’à 23h et on était comme enfermé dans cette tribune, on ne pouvait vraiment pas sortir à cause de leur sécurité. On sort à 23h30 et on est juste dans le parking. On reçoit des messages qui nous avertissent que des supporters marseillais nous attendent dehors donc on ne part du stade qu’à 2h30 alors qu’on nous suggérait même d’attendre 6-7h du mat. Nous étions 600 dans un parking souterrain pendant plusieurs heures.»

«Le club n’a jamais réellement sanctionné les auteurs de ces débordements racistes»

Outre ce trajet définitivement tumultueux, plusieurs autres supporters lyonnais ont clairement terni l’image du public rhodanien en étant auteurs d’actes innommables. Sur les réseaux sociaux, de nombreux clichés ont montré quelques visiteurs faire des signes nazis face aux sifflets des supporters marseillais. Alors que le public lyonnais est très souvent reconnu à travers la France comme un public composé de fervents supporters nationalistes, cette soirée a définitivement entériné cette triste image qui leur colle à la peau. Alors que Louis se désolidarise de cette empreinte politique, il reconnaît que plusieurs supporters lyonnais ont dépassé les bornes ce dimanche : «Marseille, tu sais qu’il y a beaucoup d’origines différentes. Quand tu arrives, tu vois des drapeaux de la Palestine, de l’Algérie et ils nous regardaient avec leurs drapeaux. Je pense que certains sont donc allés loin et ont répondu par le racisme. Vu comment on est réputés…Après moi, je m’en fous de la politique. Ce n’est pas mon délire. Mais je tiens à dire que les signes qui ont été faits sont des actes isolés.»

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Pour Jérémy, cette bêtise raciste existe encore chez les supporters lyonnais qui, pour la plupart, ont conservé un encrage d’extrême droite qui est à la racine de plusieurs groupes de supporters de l’OL : «Faut savoir que le virage sud Lyon est né à Gerland avec une suite de groupe orienté droite voire même extrême droite. Lugdunum par exemple ou encore le plus connu Mezza Lyon. Aujourd’hui, ces groupes-là ont été dissous et le groupe Lyon 1950 se veut apolitique et contre toute forme de racisme. Du coup, ces débiles et leur propos entachent la réputation d’un virage désireux de redorer son image. Lyon 1950 a sorti un communiqué indiquant que les caméras sont en train d’être visualisées et que si la personne est reconnue, il y aura expulsion du groupe. Mais mon avis dessus, c’est simplement que c’est débile et que ça n’apporte rien. Ils se sont rabaissés au niveau des Marseillais et au final, il va avoir des sanctions tout comme les Marseillais. D’accord, ils sifflent la Marseillaise, interdisent le drapeau français dans le stade mais le racisme ne changera rien et tâche juste notre drapeau qui, aujourd’hui, dès qu’il est sorti, te catégorise d’extrême droite.»

Kevin regrette également ce qu’il s’est passé ce dimanche dans les tribunes de l’Orange Vélodrome. Pour lui, le racisme affiché par les supporters lyonnais est tout aussi grave que l’agression de Fabio Grosso et le trajet plein de péripéties qu’ils ont vécu jusqu’à leur arrivée au Vélodrome : «*au-delà des débordements survenus devant le stade, il y a des choses impardonnables qui se sont produites dans le parcage. Des actes de haine et de racisme avec sans cesse pendant presque 4h des insultes (sales n*/bougn, rentre dans ton pays…etc) des imitations de singe, des saluts nazis, la Marseillaise lancée à plusieurs reprises comme une provocation pour les supporters marseillais de couleur, c’est plus que honteux. Ça fait des années que ça dure, le club n’a jamais réellement sanctionné les auteurs de ces débordements racistes, à chaque fois c’est toujours les mêmes. Malheureusement, les vrais supporters lyonnais qui condamnent ces comportements pitoyables sont en fait pris en otage par ces minorités d’individus extrémistes qui infiltrent les rangs et qui viennent uniquement pour des raisons politiques. La conséquence ? Tous les Lyonnais sont mis dans le même sac et pris pour des racistes. Franchement ça ne peut plus continuer comme ça, Lyon, ce n’est pas une ville de racistes, ici tout le monde grandit ensemble, peu importe la couleur ou l’origine, c’est même l’ADN du club et de notre académie et les supporters doivent représenter ça. Et franchement, tu comprends que ça ne donne pas envie aux gens d’aller supporter l’OL. Dimanche dans le parcage, il y avait de nombreux jeunes supporters qui faisaient leur premier déplacement, et tu pouvais en voir pas mal qui ont été surpris par la tournure des événements, à leur tête ça se voyait qu’ils se disaient, mais qu’est-ce que je fais ici ?*» Face à ces agissements racistes odieux, la lanterne rouge de Ligue 1 a annoncé ce lundi que des mesures allaient être prises. Une grande majorité du public lyonnais semble désormais espérer un vrai coup de ménage anti-racisme chez les supporters de l’OL.

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  • : les prénoms ont été modifiés afin de garder l’anonymat des témoignages.
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