Liga Portugal

Le phénix Adel Taarabt raconte sa résurrection à Benfica

Donné pour perdu pour le football il y a quelques mois encore, Adel Taarabt a renversé la vapeur, au point de devenir incontournable à Benfica. Le Marocain raconte sa rédemption.

Par Alexis Pereira
6 min.
Adel Taarabt sous les couleurs de Benfica @Maxppp

Très rare sur la scène médiatique, Adel Taarabt (31 ans) a accordé une très longue interview à Record. Le Marocain évoque le début de saison de Benfica, l'arrivée de Jorge Jesus, le rendement des recrues comme Darwin Nuñez, la rivalité avec le FC Porto et Otavio. Mais le milieu de terrain a surtout évoqué, en longueur, sa longue traversée du désert après son arrivée à Benfica, avec presque deux ans d'inactivité forcée et des prêts au Genoa. «Au bout du compte, j'ai presque perdu la passion», a expliqué l'international marocain (24 sélections, 4 réalisation) avant de poursuivre.

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«J'étais à Lisbonne, j'allais m'entraîner avec l'équipe B et je rentrais chez moi pour voir des matches de foot. J'ai perdu presque tous mes amis. Quand tu es au top, tout le monde veut être ton ami. Quand j'étais en bas, il n'y avait plus personne à mes côtés. Je suis très généreux, j'ai un grand cœur, j'emmenais tous mes amis en vacances avec moi autour du monde, je payais tout. Quand j'étais mal, j'ai compris ce que mon père me disait : "les vrais amis sont ceux qui te font pleurer, pas ceux qui te font rire". Maintenant, j'ai trois ou quatre amis, mais j'ai appris. Mon père me dit : "la meilleure chose qui te soit arrivée Adel, c'est d'avoir signé à Benfica et d'avoir vécu ces moments-là". C'est la vérité : Benfica a été la meilleure chose qui me soit arrivée», a-t-il confié, avouant même avoir pensé à arrêter.

La mauvaise réputation

«Quand je ne jouais plus, j'ai pensé à arrêter. J'étais fatigué. Je n'aime pas qu'on juge sans connaître. Je ne jouais pas depuis deux ans, mais tous les jours, des articles sortaient sur moi pour dire que j'avais fait quelque chose de mal. Moi, ça ne me dérangeait pas, mais ça touchait ma famille. Il y a tellement de gens faux dans le football. Tellement ! Je ne suis pas comme ça. Si je ne t'aime pas, je te le dis en face. Si tu ne m'aimes pas, dis le moi. Ne fais pas de détours, comme un serpent, je n'ai pas le temps. Mais quand tu es franc et direct, les gens pensent que tu es méchant», a-t-il raconté, balayant cette image et les rumeurs qui ont longtemps circulé à son sujet.

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«Je suis célibataire, je joue un match et je suis de repos le lendemain : je suis en droit de sortir un peu. En Angleterre, c'était cette mentalité. Voulez-vous que je reste enfermé chez moi ? On a tout exagéré parce que Benfica est un grand club et qu'il savait tout ce que je faisais. Je n'ai jamais été du genre à sortir tous les jours, ce n'est pas vrai. Je pouvais sortir de temps en temps, mais jamais très tard, au maximum jusqu'à 2h. Pas ou 6 ou 7h du matin. Les gens qui me connaissent me disaient : "Adel, quand on parle de toi, on dirait un monstre. Mais quand je discute avec toi, tu es un type complètement différent". Tous les gens qui me connaissent m'apprécient. Si je commets une erreur, j'assume. Je ne rejette pas la faute sur les autres. Je suis le premier à dire : "j'avais tort". C'est ce que j'ai dit à Benfica : je me suis trompé, c'est la situation. Et j'ai compris que la meilleure façon de me relever, c'était de jouer pour ce club, qui est fantastique», a-t-il lâché, revenant ensuite sur les dessous de son rebond.

Bruno Lage a tout changé

«Tiago Pinto (qui rejoindra l'AS Roma le 1er janvier 2021 au poste de Directeur Général du Football), Rui Costa et le coach (Bruno) Lage, qui avait travaillé en Angleterre, ont été importants. Le coach m'a donné du temps, il m'a motivé. Il était en réserve, il ne savait pas qu'il irait en équipe première et il m'a dit qu'il croyait beaucoup en moi. J'aidais l'équipe B, il voulait que je sois en exemple pour les jeunes, que j'élève le niveau de qualité des entraînements, que je montre l'exemple. Il disait : "ce type est cool, tout le monde dit du mal de lui, mais regardez-le s'entraîner, toujours à fond". Et quand j'allais à l'entraînement, je ne voulais pas le décevoir. Si quelqu'un te donne quelque chose, tu veux lui rendre. On connaît la suite de l'histoire», a-t-il conté, précisant en détails son nouveau positionnement.

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«Quand j'ai commencé ma carrière, j'étais complètement différent. Je jouais n° 10, les autres défendaient et moi, je devais juste faire la différence. Aujourd'hui, si tu ne cours pas, tu ne joues pas. Quand le coach Lage m'a donné ma chance et m'a motivé, il m'a dit qu'il me voyait bien en relayeur, parce que je lisais très bien le jeu et que j'arrivais à faire des passes entre les lignes. J'ai commencé à jouer à ce poste et j'ai pris du plaisir. Je joue pour l'équipe, j'ai arrêté de jouer pour moi. Avant, j'étais plus égoïste, je jouais pour moi, pour marquer des buts et donner des passes décisives. Maintenant, je n'y arrive plus. Pour moi, Benfica est au-dessus de tout», a-t-il décrit avant de poursuivre.

Un nouveau poste pour une résurrection

«Je regarde beaucoup de matches, parce que je suis passionné de football. Avant, je jouais n° 10 et, maintenant, je dois donner les ballons que j'aimais recevoir. Quand je jouais n° 10, je demandais juste à ce qu'on me passe le ballon entre les lignes pour que je puisse dribbler, tirer ou passer en me retournant. Quand je suis descendu d'un cran, je savais que les joueurs offensifs aiment ce genre de passes. Pour des joueurs de haut niveau, il faut faire des passes appuyées, car cela empêche le central d'intervenir. Je dois encore apprendre sur le volet défensif, car je préfère quand même attaquer», a-t-il résumé, avouant une certaine plénitude sur le plan physique. «Je n'ai jamais autant couru que maintenant. En Premier League, je courais 8 ou 9 km. Je crois qu'ici, au maximum, je suis monté à 12,7 ou 12,8 km par match», a-t-il décrypté, fier de lui. En regardant dans le rétroviseur, le Lion de l'Atlas a conscience d'être passé, peut-être, à côté d'une immense carrière.

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«Si tu demandes à ceux qui m'ont vu jouer quand j'avais 19 ou 20 ans, ils te diront tous que j'aurais dû jouer au Real Madrid ou à Barcelone. Ma carrière aurait-elle dû être meilleure ? Sans aucun doute. Luka Modric (à Tottenham) avait l'habitude de m'appeler Zizou, il disait que j'étais comme Zidane. Mais la pression ne m'a pas aidé. J'étais en Angleterre et, là-bas, ce n'est pas comme ici à Benfica. Ils m'ont recruté et je devais me débrouiller tout seul. Il n'y avait personne pour me dire de ne pas faire ci ou d'aller travailler à la salle de musculation pour faire du travail supplémentaire. J'étais jeune, je vivais seul à Londres, une ville où il se passe beaucoup de choses. J'ai un entraîneur à QPR que me disait parfois : "ne viens pas t'entraîner. Tu fais un bon match et tu nous fais gagner". Je n'avais que 19 ou 20 ans», a-t-il conclu. S'il s'est parfois brûlé les ailes, le phénix Adel Taarabt a su renaître de ses cendres. Et à 31 ans, le natif de Berre-l'Étang, près de Marseille, en a encore sous le capot.

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