Premier League

Newcastle : une révolution frenchie qui fait jaser

Avec 11 Français dans son effectif, dont 5 débarqués cet hiver, Newcastle est devenu un club à part au sein de la Premier League et aux yeux des observateurs. Si le club anglais a réalisé de bonnes affaires, il joue aussi très gros avec cette politique de recrutement.

Par Aurélien Léger-Moëc
5 min.
Newcastle United @Maxppp

Il y a 18 ans, David Ginola surprenait son monde en rejoignant Newcastle United. C’est à cet instant que le public français a massivement découvert Saint-James Park et le maillot noir et blanc. 18 ans plus tard, Newcastle est à nouveau au cœur de l’actualité dans nos contrées. Comment ? En venant piocher allègrement en Ligue 1. Et la tendance est lourde. Entamée avec Hatem Ben Arfa en août 2010, elle prend aujourd’hui une toute autre ampleur avec l’arrivée de quatre Français en l’espace de quelques jours. Yanga-Mbiwa, Gouffran, Haïdara et Sissoko ont en effet rallié le camp des Toons, portant le nombre de Tricolores à 11 au sein de l’effectif. Aucun club étranger n’en compte autant.

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L’origine de ce recrutement frenchy ? Graham Carr. Le chef recruteur de Newcastle est un habitué de notre championnat qu’il observe avec attention. L’actuel entraîneur Alan Pardew est lui étranger à cette arrivée massive, même si les belles performances de Ben Arfa et Cabaye depuis l’année dernière ont achevé de le convaincre de la qualité des joueurs français, souvent jugés parfaitement formés sur les plans techniques et tactiques, et auxquels le football anglais donne ce surplus d’âme nécessaire pour prendre une dimension supplémentaire. Outre les caractéristiques techniques des joueurs, leurs prix sont encore et toujours plus bas que la plupart des éléments évoluant déjà outre-Manche. Toutefois, il convient de noter que lors de ce mercato hivernal, Newcastle a ciblé des hommes à forte valeur marchande mais dont le contrat, qui arrivait prochainement à expiration, leur conférait un statut de très bonne affaire financière.

En recrutant ce lot de Français, les Toons n’ont peut-être pas garanti leur avenir en Premier League, mais ils peuvent logiquement espérer une forte plus-value lors de la revente. Déjà, Ben Arfa avait été acheté pour 6 M€ quand il en avait coûté 12 M€ à l’OM. Cabaye est arrivé contre seulement 5 M€, Marveaux était lui libre. Finalement, le plus cher des Frenchies débarqués à Newcastle se nomme Yanga-Mbiwa, dont le contrat le liant à Montpellier jusqu’en 2015 a forcé les Anglais à débourser 8 M€, soit le prix du marché. Newcastle flaire donc les bons coups, mais prend aussi des risques.

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Comment éviter les clans ?

En 2006, Alan Pardew, alors entraîneur de West Ham, avait taclé la politique de recrutement d’Arsenal, tournée vers l’étranger et principalement la France. « J’ai vu des titres disant "Arsenal porte haut le drapeau de la Grande-Bretagne". Pourtant, je me demande où est l’investissement britannique quand je regarde leur équipe. Il est important que les meilleures équipes gardent en tête qu’il s’agit de la Premier League anglaise et que des joueurs anglais doivent y être impliqués. (…) Nous avons appris des joueurs étrangers et des entraîneurs étrangers. Mais à un certain point, nous allons perdre l’âme du football britannique, les joueurs anglais ! » Aujourd’hui, ce même Pardew peut bâtir un onze compétitif avec neuf Français sur onze joueurs. Moqueurs, les médias anglais l’ont déjà rebaptisé Alan Depardew…

Quid des joueurs britanniques de Newcastle ? Leurs réactions à cette arrivée massive de Français seront-elles positives ? On peut en douter, à l’image des quelques tensions apparues au PSG lorsqu’ont débarqué quantité de joueurs en provenance de Serie A. Forcément, les clans se forment selon la langue pratiquée et il faut du temps pour que l’osmose s’installe. « Pour Newcastle, attention, avec tous ces Français ça risque de créer des clans dans le groupe ça peut poser un vrai problème », affirmait Lizarazu hier sur RTL. Un avis partagé par Gérard Houllier. « Le vestiaire sera totalement déséquilibré. Il y aura des problèmes », expliquait-il au Parisien. Le clan français nouvellement constitué dépasse même le nombre d’Anglais apparus cette saison sous le maillot des Toons (10) !

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Cette crainte d’un fossé au sein de l’effectif est justifiée par les premières déclarations des quatre derniers arrivés. « On se croirait en France (rires). C'est une équipe de L1 dans le championnat anglais. (...) Je suis encore très jeune, j'ai besoin qu'on m'assiste. Partir à l'étranger, c'est un peu partir dans l'inconnu. Là, ça va faciliter mon adaptation » (Haïdara). « C’est rassurant tous ces Français. Je les connais bien et cela facilitera mon intégration » (Sissoko). « Pour l’intégration, il y a beaucoup de Français, je me dis que si des joueurs comme Cabaye, Debuchy ou encore Ben Arfa sont venus ici, c’est que c’est une bonne maison » (Yanga-Mbiwa). Entre intégration facilitée et bande à part, la frontière est dans ce cas précis particulièrement mince.

Maintenant, il faut prouver

Hatem Ben Arfa, cité par Yanga-Mbiwa, n’est lui aussi pas étranger à cette vague française. Son conseiller Simon Stainrod expliquait que chaque joueur français débarqué à Newcastle n’avait eu que des échos positifs de la part de l’ancien Marseillais. Tout comme Cabaye a su convaincre son ami Debuchy de le rejoindre. Bien sûr, ce ne sont pas eux qui impulsent le recrutement des Magpies mais leur épanouissement est évidemment un élément de séduction important. David Ginola, précurseur dans le domaine, ne voit lui aucun mal à cet exode. « Si tous ces joueurs se retrouvent à Newcastle, ils le doivent à leur talent et parce qu’ils ont des qualités à apporter à ce club. J’étais un des premiers à arriver en Angleterre et c’est très sympa de voir se constituer une espèce d’équipe française. Ce sont de très bons renforts et pas seulement un effet de mode. Ils vont apporter au groupe ».

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Pour apporter, il va surtout falloir prouver. Car les Anglais ne s’intéressent que très peu à notre championnat. Pour eux, les arrivées de Debuchy et consorts représentent bien peu de choses par rapport à la crainte de voir le capitaine Coloccini quitter le navire cet hiver (il a depuis accepté de rester jusqu'à la fin de saison). Plus qu’un engouement, les Tricolores de "Châteauneuf" provoquent une série de blagues sur Twitter, entre les détournements de logo (avec l’apparition du drapeau français) ou de maillot (avec le traditionnel béret-baguette en bonus). Du confort d’intégration prévu pour nos Frenchies fraîchement débarqués découle un inconvénient de taille : ils n’auront pas d’excuses si jamais ils échouent à s’imposer et à séduire Saint-James Park.

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