Que vaut vraiment Stevan Jovetic, la cible offensive du mercato de l’OM ?
Annoncé dans le viseur de l'OM, l'attaquant monténégrin Stevan Jovetic ressemble à une bonne affaire. Comment est-il passé d'immense promesse du foot mondial à bon coup du mercato ? Des spécialistes des différents championnats où il est passé nous éclairent.
La nouvelle est d'abord sortie en Italie avant qu'elle parvienne également en France quelques jours plus tard : Stevan Jovetic est dans le viseur de l'Olympique de Marseille. Stevan Jovetic, ou un joueur que beaucoup connaissent sans vraiment le connaître. Que faut-il penser de l'international monténégrin, seulement âgé de 27 ans ? Est-ce toujours ce joueur soyeux, qui a fait les belles heures de la Fiorentina, avant de perdre dans les méandres de transferts ratés et de blessures à répétition ? Ou est-ce seulement un joueur à temps partiel, capable du meilleur, parfois, mais terriblement irrégulier et transparent dans les grands rendez-vous ? Pour mieux vous (re) présenter Jovetic, nous avons demandé à des spécialistes des championnats italiens, anglais et espagnols, autant d'endroits où l'attaquant a posé ses valises, de nous donner leur sentiment.
Evidemment, c'est en Italie que Jovetic a le plus marqué les esprits. Friande de joueurs en provenance des Balkans, la Fiorentina n'avait pas hésité à investir 8 M€ pour le recruter au Partizan Belgrade lors de l'été 2008, à seulement 18 ans. « En Italie, il y a eu deux Jovetic. Le premier, de la Fiorentina, le petit jeune qui arrive. La Fio a toujours eu un filon avec les jeunes des Balkans, par exemple Ljajic et Savic. Généralement, c'est une valeur sûre. Ils s'adaptent très rapidement au foot italien. Avec leurs caractéristiques, ça marche bien. Il a explosé à seulement 18,19 ans. Il avait obtenu déjà pas mal de temps de jeu », nous raconte Valentin Pauluzzi, spécialiste de la Serie A et fondateur du site calciomio.fr.
« Il a loupé un an pour une grosse blessure. Ça aurait pu le couper dans son élan. Ça l'a ralenti un peu mais derrière il a fait une de ses meilleures saisons d'un point de vue comptable (en 2011-2012, il termine avec 14 buts en 27 matches de Serie A, puis 13 buts la saison suivante, ndlr). Ce qui est intéressant, c'est qu'il est arrivé en milieu offensif, voire ailier, bref plus un joueur de la dernière passe, et il termine, avec Montella, en faux numéro 9. Il s'est rapproché de plus en plus du but, c'est pour cela que ses stats ont augmenté. Il est très technique, il a de la prestance, il en jette balle au pied, il a une grosse intelligence de jeu et ne fait pas trop de grigris », poursuit Valentin Pauluzzi.
Un physique qui craque
Après 5 années séduisantes à la Fiorentina, qu'il a souvent portée à bout de bras, le voilà prêt à rallier un cador européen. La Juventus Turin lui fait les yeux doux, mais c'est Manchester City qui empoche la mise, grâce à un chèque de 26 M€ et l'envie de construire un secteur offensif inégalé avec Agüero, Dzeko ou encore Negredo. En réalité, Jovetic vient compléter le banc de touche, débutant même la saison, dans l'esprit de l'entraîneur d'alors Manuel Pellegrini, en tant que 3e choix. Peu de temps de jeu et quelques légères blessures qui en font malgré lui un simple joueur de rotation d'effectif. Peu de titularisations en Premier League et quelques matches de Coupe pour se dégourdir les jambes, même lorsqu'Agüero est blessé. Journaliste pour le Manchester Evening News, Simon Bajkowski nous raconte son Jovetic.
« Je dirais que son passage à Manchester City a été une véritable déception. Il a peu apporté au regard de son potentiel. Un peu comme Valeri Bojinov quelques années auparavant, il était un talent prometteur, buteur en Serie A, qui aurait pu amener sa touche à l’attaque de City. Sa technique inquiétait les défenseurs de Premier League et en faisait un bon deuxième attaquant. Cela a marché, jusqu’à un certain point, durant la saison 2013-2014, mais les blessures récurrentes en ont fait un 4e choix. » Manchester City ressemble effectivement au début des ennuis (physiques). Il multiplie les petits pépins qui le condamnent peu à peu.
« La saison suivante, il semblait plus affûté mais les blessures l’ont encore rattrapé », poursuit Simon Bajkowski. « Et lorsqu’il est revenu, Pellegrini avait décidé de passer à un seul attaquant de pointe. Wilfried Bony a ensuite été recruté en janvier 2015 et cela a achevé les chances de Jovetic. C'était dommage de le voir partir mais en réalité, il n’a jamais montré son véritable niveau à City sur un temps assez long.» Jovetic quitte donc Manchester City par la petite porte mais ne laisse pas un mauvais souvenir aux fans mancuniens, conscients de ne pas avoir pu profiter pleinement de son talent.
Une relance ratée à l'Inter, le boost de confiance à Séville
Retour en Serie A donc pour se relancer. A seulement 25 ans et après deux ans médiocres en Angleterre, Jovetic ressemble au bon coup du mercato quand l'Inter le débauche, sous la forme de prêt avec option d'achat. Valentin Pauluzzi de nouveau à la barre : « en Italie, on l'a un peu perdu de vue quand il est parti à Man City. C'était un peu la bonne affaire quand l'Inter l'a récupéré. Il démarre très bien et puis après ça s'est moins bien passé. Mais il n'a pas grand-chose à se reprocher, l'Inter c'est un peu le foutoir permanent. C'était un peu un pari. Ça s'est bien passé au début, ça a coulé petit à petit. Mais l'Inter avait trop de joueurs. Il jouait attaquant de soutien, avec Icardi devant lui ». Au milieu des Icardi, Palacio, Ljajic, Brozovic et compagnie, Jovetic n'est qu'un parmi d'autres. Au moins a-t-il le mérite de rester sobre et de ne pas étaler ses états d'âme dans la presse devant un temps de jeu loin de correspondre à ses attentes.
Face au nouvel échec qui se dessine, le voilà de nouveau sur le départ, prêté au FC Séville après avoir été proche d'un retour à la Fiorentina. Habitué à flairer les bons coups ou à relancer efficacement des éléments en perte de vitesse, le club andalou saute sur l'occasion au mercato hivernal. Et pense avoir dégoté le gros lot après les deux premiers matches du Monténégrin. Avec un but 5 minutes après son entrée en jeu en Coupe du Roi face au Real Madrid (3-3) puis le but de la victoire face au même Real trois jours plus tard (2-1), Jovetic fait forte impression dès ses débuts. Une constante (hormis à Manchester City) dans sa carrière.
Mais là encore, ça ne va pas durer. Malgré des statistiques honorables au final (7 buts et 5 passes décisives en 24 rencontres toutes compétitions confondues), Jovetic laisse un sentiment étrange. Car l'entraîneur argentin des Andalous, Jorge Sampaoli, ne fait pas systématiquement appel à lui. Pourtant, comme le raconte Carlos Pérez, journaliste pour Estadio Deportivo (journal andalou), lui trouve essentiellement des qualités. « Ses six mois à Séville ont été très bons, tant au niveau de ses sensations que de ses statistiques, même si cela aurait pu être encore mieux. Etrangement, Sampaoli l'a laissé sur le banc plusieurs matches alors qu'il était l'un des meilleurs de l'équipe. Il a appris l'espagnol grâce à une série (Los Serrano) et ça a énormément facilité son adaptation. Dès ses débuts, contre le Real Madrid, il a brillé. Il a le plus souvent joué attaquant de pointe alors qu'il ne l'est pas. Il a en grande partie retrouvé le niveau qui avait poussé Manchester City à investir 26 M€ pour le recruter. »
Quel avenir ?
La somme est aujourd'hui divisée par 2. Le FC Séville avait la possibilité d'acheter définitivement Jovetic à l'Inter pour 13 M€ mais n'a pas donné suite. Le salaire du joueur serait trop élevé pour le club espagnol. Mais une autre raison est évoquée : Séville pense que le prix du joueur pourrait être revu à la baisse par l'Inter. Une pensée partagée par Valentin Pauluzzi. « L'Inter doit réaliser 30 M€ de plus-value pour être dans les clous du fair-play financier et ne gardera pas Jovetic. A mon avis, l'Inter peut se contenter d'une dizaine de millions pour vendre Jovetic » Une certitude : il ne rejouera pas pour l'Inter, où il est sous contrat jusqu'en 2019.
Le moment est donc opportun pour séduire le talentueux mais inconstant Jovetic. L'Olympique de Marseille, qui a coché son nom au milieu des Germain, Balotelli, Gomis et Giroud, doit-il réellement tenter sa chance ? « Je pense que c'est mentalement qu'il a des limites. Il n'arrive pas à conserver un rendement intéressant sur la durée. Ça dépend des ambitions de l'OM. Ce n'est pas un leader, c'est un excellent joueur d'équipe. Pour concurrencer le PSG, lui seul ça sera insuffisant mais pour ramener le club dans le top 3, il peut être d'une grande aide. Dans un 4-3-3, sur une aile, il n'a pas les caractéristiques adéquates. En 9 et demi, ça peut être une bonne idée », pense Valentin Pauluzzi. Si la direction olympienne s'accorde sur son utilité, il ne faudra pas traîner. Car le joueur aurait confié à certains coéquipiers sévillans vouloir absolument rester en Andalousie. Histoire de retrouver une stabilité propice à son épanouissement.
En savoir plus sur