Ligue des Champions

Le fabuleux destin de Sébastien Thill, bourreau du Real Madrid avec le Sheriff Tiraspol

Héros du Sheriff Tiraspol face au Real Madrid mardi soir (1-2), Sébastien Thill est rapidement devenu une icône au Luxembourg.

Par Alexis Pereira
7 min.
Sébastien Thill célèbre son but face au Real Madrid @Maxppp

Un but peut changer le cours d'une vie. Et quand, en plus, on parle d'une magnifique reprise du gauche, logée en pleine lucarne de Thibaut Courtois, pour une victoire historique du petit poucet, le Sheriff Tiraspol, qui participe pour la première fois à la plus prestigieuse des compétitions européennes, au bout du suspens sur la pelouse du Real Madrid, 13 fois vainqueur de la Ligue des Champions, les esprits sont marqués à tout jamais. Sébastien Thill (27 ans) peut en témoigner. Le milieu de terrain a vu sa vie basculer dans une autre dimension ce mardi soir, grâce à sa somptueuse réalisation et au succès des Moldaves au Santiago Bernabéu (1-2). Il est devenu le premier Luxembourgeois (Miralem Pjanic a choisi la nationalité bosnienne) à marquer en C1. Forcément, au pays, tout le monde ne parle que lui, comme L'Essentiel et Tageblatt.

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La belle histoire fait le tour de l'Europe, avec des papiers dans Marca ou encore le Daily Mail, son tatouage sur la jambe gauche - lui de dos rêvant de la Coupe aux grandes oreilles - alimentant encore un peu plus le conte de fées. Et il faut dire qu'il y a quelques mois encore, ce scénario aurait été bien difficile à prédire, comme nous l'explique son représentant Ahmed Nouma. «Au début de la saison passée, il était encore ici au Luxembourg (au Football Club Progrès Niederkorn, ndlr), il a joué un match de championnat puis un match de qualification en Europa League. Puis il est parti en Russie, au FC Tambov, où les choses se sont mal passées avec le club, financièrement. Donc, il est parti en hiver, il a signé au Sheriff Tiraspol. Et au bout de pratiquement une saison depuis son départ du Luxembourg, il se retrouve en Champions’ League. Tout est allé très vite», nous a-t-il raconté.

Les pieds sur terre

Pour autant, l'international luxembourgeois (16 sélections, 1 but), qui a fait chavirer de bonheur des deux frères Vincent et Olivier, eux aussi footballeurs professionnels et internationaux A, garde les pieds sur terre. «Sébastien est passionné par le football, il se concentre uniquement sur ça. Il vit les choses calmement et naturellement. On s’est eu au téléphone ce mercredi matin. Mardi soir, on s’est envoyé des messages car ils avaient un vol tout de suite après le match. Il aborde les choses avec beaucoup de calme. C’est quelqu’un qui est très cool dans la vie, dans sa façon d’être, il ne s’emballe pas. Il est très heureux, mais je pense qu’il ne se rend pas encore compte de l’impact que ce but et cette victoire vont avoir sur sa vie. Ici, au Luxembourg, ça va le suivre toute sa vie. C’est le premier Luxembourgeois à marquer en Ligue des Champions. Ça a un impact énorme !», nous a expliqué son agent, pas peu fier de l'exploit de son poulain, mais pas franchement surpris.

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«J'ai vécu ça avec joie et fierté, mais sans trop de choc ou de surprise. C’est une équipe que je suis depuis le début de ses qualifications et quand on regarde tous les matches du Sheriff, on ne s’étonne pas de leur performance contre le Real. Ils ont éliminé l’Étoile Rouge de Belgrade, puis le Dinamo Zagreb. Ils ont battu le Shakhtar Donetsk aussi. J’ai vu tous leurs matches, ils sont toujours solides derrière et disciplinés. Leur rendement ne m’a pas vraiment surpris. Je ne parie pas, mais si j’avais dû miser, j’aurais mis N2 (rires)», nous a-t-il glissé, avouant ensuite qu'il avait eu une prémonition. «La veille du match, je lui ai envoyé un message : je sens que tu vas marquer demain. Je lui ai dit qu’il marquerait un coup franc avec sa patte gauche magique, je n’étais pas loin. Mais je sentais qu’il allait marquer. C’est un garçon très attachant et je sentais que dans une occasion comme celle-là, il allait briller. Bien sûr, c’est surprenant, mais quelque part, c’était espéré et souhaité. C’est extraordinaire».

Un formidable exemple

Sollicité de toutes parts, le représentant, malgré l'impact que peut avoir cette performance sur la suite de la carrière de son protégé, garde une certaine distance. Il voit déjà plus loin, sans s'affoler. «J’ai déjà vécu des situations similaires. Je reste calme. On ne s’emballe pas trop. Il joue, il continue. Après, on verra ce qui se présente pour la suite de sa carrière. On apprécie le moment. Avant d’être agent, j’aime le football. Alors je savoure simplement le moment. Il n’a qu’à continuer sur sa lancée et quand ce sera le moment de voir si on peut aller plus haut, on verra. Il ne faut pas penser à autre chose et vivre le moment présent pleinement. Beaucoup d’agents m’ont écrit, sans doute à Sébastien aussi. Moi, je n’aime pas trop ça. Je suis plus un agent de carrière, j’aime accompagner mes joueurs. Aujourd’hui, on apprécie le moment et on laisse ça pour la suite. Ce n’est pas ma préoccupation», nous a-t-il confié.

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Il espère, aussi, que la trajectoire de Sébastien Thill donnera des idées aux talents du coin. «Il y a du talent au Luxembourg, mais c’est difficile de partir d’ici, parce que la perception du championnat est celle d’une ligue faible, ce qui est vrai. Mais il y a deux ou trois clubs professionnels où il y a du talent. Après, un bon joueur, où qu’il joue, reste un bon joueur. Si je vois qu’il peut aller ailleurs, grâce à ses qualités intrinsèques, on travaille. Beaucoup de Luxembourgeois n’ont pas fait d’académies mais réussissent à l’étranger. Sébastien et son frère Olivier (24 ans, Vorskla en Ukraine) sont de bons exemples. Gerson Rodrigues, à Troyes, lui aussi. C’est très beau. Et ça donne espoir à beaucoup de joueurs», a-t-il conclu.

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