Ligue 1

Entretien avec… Benoît Costil : « À Rennes, je n’ai pas le droit à l’erreur »

À 24 ans, Benoît Costil s'impose enfin comme étant l'un des tous meilleurs gardiens de but de Ligue 1. Après avoir brillé à l'étage inférieur avec Sedan, le portier se fait un nom dans l'élite du football français au Stade Rennais. Pour Foot Mercato, le dernier rempart revient sur son parcours et sur sa saison en Bretagne.

Par Khaled Karouri
10 min.
Stade Rennais FC Benoît Costil @Maxppp

**Foot Mercato : Tout d'abord Benoît, comment allez-vous ?

Benoît Costil :** Ça va très, très bien merci.

**FM : Vous êtes arrivé à Rennes cet été, comment vous sentez-vous dans ce club ?

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BC :** Je me sens bien. J'ai été bien accueilli. Je connaissais un peu ce club pour l'avoir déjà affronté, je connaissais aussi quelques joueurs. Ça a facilité les choses, d'autant que le groupe est jeune. Ce n'est donc pas difficile de s'adapter, tout se passe bien depuis le début. Je suis content d'être ici.

**FM : Le groupe étant jeune, cela n'a pu que faciliter votre intégration...

BC :** Oui. Je suis dans le même âge que pas mal de joueurs du club. Même si, à 24 ans, je suis dans le tiers des plus vieux et pas celui des plus jeunes dans ce groupe, c'est assez particulier (rires). Mais voilà, je connaissais aussi Christophe Revel, l'entraîneur des gardiens, que j'ai eu comme coéquipier quand j'étais en prêt à Vannes. Ça m'a aidé aussi, il m'a mis à l'aise.

**FM : Pourquoi votre choix s'est-il porté sur le Stade Rennais ?

BC :** Tout simplement parce que c'était le meilleur club à m'avoir contacté pour me proposer du temps du jeu. Je voulais poursuivre ma progression en évoluant à l'échelon supérieur, j'avais des opportunités, mais Rennes était le meilleur club. Mon objectif initial était d'évoluer en Ligue 1 avec Sedan, ça ne s'est pas fait. Il aurait pu y avoir une grande ferveur en Ligue 1 avec Sedan, un club qui a une grande histoire et de grands supporters. J'avais d'ailleurs l'opportunité d'avoir une prolongation d'une saison en cas de montée. Maintenant, ça n'a pas été possible. J'ai donc dû monter en Ligue 1 par moi-même, même si j'aurais aimé monter avec Sedan car c'est avant tout un sport collectif.

**FM : Et puis rejoindre la Ligue 1 à Rennes, il y a pire comme point de chute...

BC :** Oui, bien sûr, c'est clair ! À la base, je n'avais pas la prétention de viser un club qui jouait l'Europe. Moi, ce que je voulais, c'était évoluer en Ligue 1, c'est ce à quoi j'aspirais. Le rôle de gardien est fait d'opportunités, cette opportunité du Stade Rennais s'est présentée, et je l'ai saisie. Je ne pouvais que la saisir, je ne pouvais pas fuir cette opportunité. C'était un club que j'aurais pu rejoindre étant jeune, qui m'avait toujours intéressé. C'était une occasion rêvée. Les contacts sont intervenus tard, très tard même. J'avais des contacts avec d'autres clubs de Ligue 1, mais mon choix s'est finalement porté sur Rennes.

**FM : Aviez-vous tout de même hésité à rallier la Bretagne, le fait de passer de la Ligue 2 à une équipe solide de Ligue 1 qualifiée en Ligue Europa étant un sacré grand écart...

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BC :** Je n'ai pas eu peur. Si j'avais eu peur, je ne serais pas venu, tout simplement. C'était une opportunité exceptionnelle, j'avais confiance en moi. Je ne me prends pas pour un autre, mais il faut savoir foncer, saisir les opportunités et ne pas calculer. Après, si ça se passe moins bien, on va dans un club inférieur et basta. Dans ma tête, je me suis dit que j'allais à Rennes, que j'allais m'entraîner, bosser, et montrer que j'avais le niveau, les qualités pour réussir. C'est un challenge élevé, mais super passionnant. Ça m'a branché, ça me booste au quotidien.

**FM : Arriver à Rennes, c'était succéder à Nicolas Douchez. Avez-vous fait abstraction de cette donnée, dont on vous a sans doute beaucoup parlé ?

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BC :** J'ai fait abstraction. Après, c'est sûr que des gens m'en ont parlé, les supporters par exemple. Mais c'est logique, je ne peux pas y échapper, c'est normal. Il y avait un gardien qui avait fait de belles choses ici. C'est quelqu'un que j'ai appris à connaître un petit peu, c'est quelqu'un de très sympa, qui a de grandes valeurs humaines. Il a mis la barre haut, mais je ne suis pas là pour faire aussi bien que lui ou mieux que lui. Je suis venu là pour faire ce que je savais faire, essayer d'être le plus performant possible. J'ai beaucoup de respect pour lui, je ne suis pas là pour le faire oublier. Je suis là pour apporter ma pierre à l'édifice et faire que le club brille sur la scène européenne et en Ligue 1.

**FM : Avant de briller à Rennes, vous avez eu droit aux honneurs de vos pairs avec le Trophée UNFP de meilleur gardien de Ligue 2. Une sacrée satisfaction...

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BC :** Oui, c'est une grande satisfaction. J'étais très content, je ne l'ai pas pris à la légère. Pour moi, c'est une belle récompense, la récompense du travail fourni toutes ces saisons. J'ai connu certaines galères, dont j'ai réussi à sortir. C'est aussi une récompense pour tous ceux qui m'ont aidé à m'en sortir. Ça montre que j'ai progressé chaque saison, et après ce trophée, il m'a semblé que la Ligue 1 était la suite logique. Après, le trophée de meilleur gardien de Ligue 1, je n'y pense pas du tout. Ce n'est pas un manque d'ambition, c'est juste que je vis au jour le jour, chaque chose en son temps. Je suis ambitieux, mais je garde la tête sur les épaules. J'ai quand même de grandes ambitions, il faut que ce soit bien clair ça (rires).

**FM : Vous attendiez-vous en tout cas à être aussi rapidement en vue en Ligue 1 ?

BC :** Je ne m'étais pas donné de temps d'adaptation. J'avais cette exigence, je me suis dit que même si je découvrais la Ligue 1, je n'avais pas à me donner deux-trois mois pour être performant. En arrivant à Rennes, je n'avais pas le droit à l'erreur. Si je faisais une erreur, on me sautait et on passait à un autre gardien. Il fallait donc que je sois performant dès les matches amicaux pour montrer ce que je savais faire. Je veux qu'il n'y ait pas de doute quant au fait que je mérite ma place au Stade Rennais. Ce sont des questions qu'on pouvait légitimement se poser après mon arrivée. Si, déjà, on ne se pose plus ces questions et qu'on me considère comme étant un bon gardien, ce sera déjà bien.

**FM : Quel regard portez-vous sur la saison de Rennes en Ligue 1 ?

BC :** On a fait un bon début de saison. On a réussi à empocher beaucoup de points. Le rythme des équipes de tête est dur à suivre, il faut s'accrocher. On a plutôt bien réussi à supporter l'effet Coupe d'Europe, car ce n'est pas facile de jouer tous les trois jours. Mais je pense que ces matches européens nous ont tout de même été préjudiciables sur le plan comptable. On a manqué de fraicheur sur certains matches, mais quand on est bien on voit qu'on peut faire des choses. On a gagné à Marseille, à Lyon... Ce n'est pas rien.

**FM : Ces victoires contre l'OM et l'OL vous ont-elles fait prendre conscience du fait que vous pouviez réaliser quelque chose de grand dans ce championnat ?

BC :** Oui, complètement ! Pareil pour les matches de Coupe d'Europe, je trouve d'ailleurs que les gens sont durs avec nous sur ces matches. On n'a que trois points en Ligue Europa, mais il faut regarder nos prestations. On a mis en danger l'Udinese, qui était premier il y a peu en Serie A. On a mis en difficulté Madrid, le Celtic on les a bougés au match aller même si ça a été dur au retour. Mais ces matches peuvent nous servir pour le championnat. Et puis bien sûr, les performances contre Paris, Marseille et Lyon sont très bonnes. Mais on doit aussi en faire de même contre des équipes “inférieures”, sans leur manquer de respect. On a perdu des points à domicile, et chaque point a son importance en championnat.

**FM : Vous parliez de la Ligue Europa. Nourrissez-vous des regrets quant au fait de ne pas avoir su concrétiser ces prestations encourageantes par des victoires, ce qui condamne aujourd'hui le Stade Rennais dans cette compétition ?

BC :** Oui, il y a beaucoup de regrets en Coupe d'Europe, il faut être honnête. Il y a des matches qu'on aurait dû gagner, notamment contre l'Atlético Madrid et l'Udinese, ça nous reste en travers de la gorge. Maintenant, on a manqué d'un petit quelque chose, d'expérience de la Coupe d'Europe. On est pas mal à avoir découvert la Ligue Europa, et on voit que ça se joue à rien, le contexte est différent de celui du championnat. On a des regrets, mais ça sera bénéfique. On prend notre pied à la jouer, ce sont des matches extras, avec de sacrées équipes à affronter. Je suis sûr que si vous demandez aux coaches et aux joueurs de ces trois équipes, ils vous diront qu'ils ont eu des difficultés à jouer contre le Stade Rennais.

**FM : Frédéric Antonetti était d'ailleurs monté au créneau pour répondre à certains spécialistes qui n'admettaient pas que la jeunesse du groupe puisse être invoquée pour expliquer les résultats de Rennes en Ligue Europa. Trouvez-vous le jugement de certains spécialistes et de certains supporters trop dur envers vous ?

BC :** Oui, je trouve qu'on a été très dur avec Rennes après le match de Glasgow. En gros, on ne donnait pas une bonne image du football français. Il ne faut pas exagérer non plus. Sur les cinq matches, la plupart était de grande qualité, les supporters ont vu du spectacle à chaque fois. Après, la jeunesse de l'effectif ne doit pas non plus être une excuse, mais c'est une réalité. C'est un groupe composé de jeunes, qui iront loin j'en suis persuadé. Mais l'expérience, ça ne s'invente pas. Ça vient en jouant ce genre de matches et plus le Stade Rennais en jouera, plus le club sera compétitif. Lille est par exemple passé par ce genre d'expériences, ils sont passés par quelques désillusions, et c'est désormais un grand club français qui fait de belles choses en Ligue des Champions.

**FM : Comme vous le disiez plus tôt, vous avez la tête sur les épaules mais restez toutefois ambitieux. Du coup, avez-vous dans un coin de votre tête l'équipe de France en ligne de mire ?

BC :** À l'heure actuelle, je n'y pense pas du tout. J'ai fait toutes les sélections jusqu'aux Espoirs. Je suis un vrai passionné de foot, j'écoute ce qui se dit, je lis ce qui s'écrit sur l'équipe de France, je regarde les matches. Je suis supporter de l'équipe de France. Bien évidemment, j'en rêve, parce que c'est pour moi le summum d'une carrière, le top niveau. Mais je ne suis pas là à espérer la sélection, à suivre les convocations à la télé. Je pense que l'Euro se profile et que la hiérarchie des gardiens est précise. Moi, avec mes 20 matches de Ligue 1 et de Coupe d'Europe, je ne vais pas arriver et dire que je prétends à l'équipe de France. Il y a des mecs qui vont lire l'article en se disant “Mais c'est qui celui-là” ! Il y a des gardiens comme Stéphane Ruffier ou Mickaël Landreau qui ne sont pas appelés alors qu'ils font des choses incroyables, plus que moi. Mais je vais travailler, tout faire pour être bon avec Rennes, et si un jour je peux être appelé... Alors ce sera parfait pour moi. À très court terme, ce n'est pas un objectif. Mais je suis quelqu'un d'ambitieux, je veux atteindre le plus haut niveau, et ça passe par l'équipe de France.

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