Recruté l’été dernier par le FC Barcelone, Antoine Griezmann n’a pas encore le rendement qui était le sien à l’Atletico Madrid et qui a fait de lui un joueur de classe mondiale. Arrivé en fin de mercato estival au PSG, Mauro Icardi n’a pas les mêmes problèmes puisqu’il s’est imposé rapidement dans son nouveau club. Comment expliquer ces différences d’adaptation et existe-t-il une recette pour bien s’intégrer et s’adapter dans une nouvelle équipe ? Voici nos réponses.
Un transfert, c’est souvent un pari. Un pari qui peut s’avérer rapidement concluant ou au contraire, décevant voire même raté. Et le gros problème du foot professionnel, c’est que la patience a une durée très limitée et que les joueurs doivent rapidement être performants sous peine d’être remplacés puis transférés dans la foulée. Dans ces conditions, mieux vaut réussir rapidement son intégration et son adaptation au sein de son nouveau club. Mais ce n’est pas si facile et cela dépend aussi de plusieurs facteurs.
Le contexte
Les joueurs transférés ne sont pas logés à la même enseigne. Certains arrivent comme “des messies” dans leur nouveau club et ont été recrutés pour combler un manque évident dans une équipe. Ces joueurs ont quasiment la garantie d’être titulaires et cela leur enlève un peu de pression. De plus, ils sont souvent choyés par leur club qui font tout pour qu’ils se sentent rapidement comme chez eux. De l’autre côté, il y a des joueurs qui ont été recrutés dans l’optique de doubler des postes et de faire jouer la concurrence pour que l’équipe soit plus compétitive. Ces joueurs doivent gagner leur place au quotidien et leur pression est constante. Griezmann se situe paradoxalement dans un “entre-deux”. Il a été l’investissement le plus important du FC Barcelone l’été dernier mais l’équipe compte déjà dans ses rangs Lionel Messi et d’autres gros talents offensifs. Leader technique incontesté à l’Atletico Madrid, Griezmann se retrouve désormais enfermé au milieu de plusieurs leaders techniques au Barça. Il doit donc encore trouver sa place dans un collectif déjà bien huilé et bien doté techniquement avant son arrivée.
La situation d’Icardi est, au départ, proche du deuxième cas évoqué (doubler un poste) sauf que la blessure d’Edinson Cavani l’a propulsé rapidement en tant que titulaire. De plus, l’Argentin offre un registre différent de celui de Cavani, puisqu’il est naturellement plus à l’aise pour jouer en pivot et combiner avec des joueurs techniques et rapides autour de lui. Ce qui explique en partie son adaptation rapide puisqu’il n’a pas eu à changer son jeu pour s’intégrer dans le collectif parisien. Il a juste comblé un manque. D’ailleurs, ce n’est pas un hasard si la meilleure prestation de Griezmann avec les Blaugranas demeure sans doute son match contre le Bétis Séville, en début de saison, quand Messi était blessé.
Changement de culture et de vie à appréhender
Qui dit changement de club dit souvent changement de culture. Surtout quand on change de pays ou de région. Si Griezmann n’a pas quitté la Liga Santander, il est tout de même passé de Madrid à la Catalogne, où les mentalités et même la langue diffèrent (même si les Catalans savent parler le castillan). De plus, le Barça a une identité footballistique bien marquée et différente de l’Atletico Madrid comme l’a expliqué récemment Clément Lenglet. Ces changements demandent un certain temps d’adaptation comme ce qui concerne la vie privée du joueur, qui a changé de maison et qui n’est peut-être pas encore totalement bien installé. Il faut savoir que de nombreux joueurs dorment à l’hôtel les premiers mois qui suivent leur arrivée dans un nouveau club. Ce genre de détail n’est pas à sous-estimer.
Pour Icardi, le changement de vie a aussi été brutal puisque sa femme et ses enfants sont restés vivre à Milan et doivent faire constamment la navette entre la France et l’Italie. Mais pour le moment, cette situation compliquée ne se reflète pas sur le terrain, preuve de la solidité mentale de l’Argentin et de sa capacité à respecter les principes pour bien s’adapter et s’intégrer dans un nouveau club.
Principe n°1 : se faire accepter par les leaders
La grande réussite de Mauro Icardi, c’est de s’être fait accepter rapidement des leaders de l’équipe. Discret depuis son arrivée dans la capitale française, l’attaquant argentin aurait déjà noué une forte complicité avec Neymar et même avec Cavani, qui demeure pourtant son “concurrent” direct pour une place de titulaire. Même si ses liens avec Di Maria et Paredes, qu’il avait déjà côtoyé en sélection argentine, ont dû faciliter son intégration, savoir faire le dos rond, nouer des liens avec ses coéquipiers et ne pas revendiquer le leadership quand on débarque dans une nouvelle équipe porte souvent ses fruits pour se faire plus rapidement accepter de ses collègues, qui ne voient pas le nouvel arrivant comme un élément perturbateur qui va bousculer l’ordre établi mais comme une nouvelle pièce complémentaire pour atteindre les objectifs du club. De son côté, Griezmann a plus de mal à se faire accepter des leaders à Barcelone et notamment de Messi. Même si rien ne prouve que les deux joueurs ne s’entendent pas, leur complicité sur le terrain est loin d’être évidente. Connu pour sa joie de vivre et sa bonne humeur, comme on a pu le voir dans les différents reportages “Inside” sur l’équipe de France, Griezmann ne devrait pas avoir de mal à se fondre progressivement dans le groupe des leaders du club. L’international français aurait même récemment dîné avec Luis Suarez et Lionel Messi. Créer une complicité avec ses coéquipiers en dehors du terrain est souvent une étape essentielle pour établir une complicité technique sur les prés. Dans l’équation, il ne faut pas oublier que c’est aussi aux leaders actuels d’une équipe de faire l’effort de bien intégrer les recrues et de faire en sorte qu’ils se sentent considérés et respectés.
Principe n°2 : apporter des choses différentes
En débarquant au FC Barcelone, Antoine Griezmann ne peut plus se contenter de tourner autour du “9” comme avec les Bleus et l’Atletico Madrid puisque Messi endosse déjà ce rôle à merveille et demeure le patron incontesté de l’équipe. Pour qu’il trouve sa place au Barça, il doit donc apporter des choses différentes (profondeur, combinaison sur le côté, etc.). Même s’il n’est plus du tout habitué à évoluer comme un vrai ailier, comme il le faisait à la Real Sociedad et lors de ses débuts avec l’équipe de France, Griezmann reste capable d’évoluer dans plusieurs registres et a largement le potentiel pour s’adapter tactiquement aux exigences de son nouveau club et aux préférences de ses coéquipiers. À lui d’effectuer rapidement ces ajustements tactiques quitte à se sacrifier pendant un temps pour l’équipe. Comme évoqué plus haut dans l’article, la situation d’Icardi est différente car ses forces correspondent justement à ce qui manquait au PSG devant. En apportant des choses nouvelles pour une équipe, une recrue va logiquement se faire une place plus rapidement.
Principe n°3 : Attendre son heure et s’imposer progressivement
Enfin, pour s’intégrer et s’adapter dans une nouvelle équipe, il faut savoir être patient. Parfois, la sauce prendra très rapidement pour des raisons que l’on a déjà évoquées. Mais parfois, cela mettra plus de temps et il faut juste accepter cette situation sans perdre confiance en soi et en cherchant des solutions. Avant d’être le leader technique de l’équipe de France, Griezmann n’était qu’un adjoint ou un lieutenant pour Benzema, qui était le leader technique des Bleus. C’est en se montrant irréprochable et en étant au service de l’équipe que Griezmann s’est peu à peu imposé comme un vrai leader pour la France. À Barcelone, Messi a aussi dû attendre son heure et être au service d’Eto’o et Ronaldinho pour montrer sa valeur au sein de l’équipe. C’est comme ça qu’il a gagné progressivement le respect de ses partenaires et obtenu ses galons de leader. Le temps est donc le meilleur ami de Griezmann comme il peut être son meilleur ennemi en cas d’impatience. Arrivé seulement en prêt au PSG, Icardi, qui fait déjà tout ce qu’il faut pour bien s’intégrer, pourrait devenir le pion incontournable de l’attaque parisienne dans les années à venir et devenir le leader technique offensif incontesté de l’équipe comme il l’était à l’Inter Milan. Mais le leadership se gagne seulement avec le temps et surtout, il ne s’impose pas avec des mots mais avec des actes. À bon entendeur !